«Aujourd’hui l’Iran, demain l’Algérie»: comment le régime d’Alger a (déjà) perdu tous ses soutiens dans le monde

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et Ali Khamenei, guide suprême de la révolution en Iran.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et Ali Khamenei, guide suprême de la révolution en Iran.

La débâcle que vit le régime des ayatollahs en Iran s’inscrit dans une longue série de chutes de régimes dictatoriaux et d’organisations cataloguées comme terroristes dans tout le Moyen-Orient. Leur point commun: leurs liens étroits avec le régime d’Alger, de plus en plus directement pointé comme sponsor du terrorisme, et qui, après son isolement régional, voit tous ses soutiens dans le monde péricliter comme un château de cartes.

Le 17/06/2025 à 10h44

Le parallèle a semé la panique en Algérie. Il est établi par le très respecté Meir Masri, professeur et politologue israélien, enseignant à l’Université hébraïque de Jérusalem et expert en relations internationales. Commentant l’humiliation que subit actuellement le régime de Téhéran de la part d’Israël, l’éminent analyste n’hésite pas à assimiler l’Iran à l’Algérie. Ce que les deux pays ont en commun, à ses yeux, c’est leur soutien au terrorisme et leur mode d’action par proxies pour faire valoir leurs intérêts.

L’un en activant des organisations comme le Hamas palestinien, le Hezbollah libanais et les Houthis au Yémen; l’autre en faisant jouer un front Polisario de plus en plus pointé du doigt comme une organisation terroriste, mais aussi des groupes terroristes assumés sévissant au Sahel, comme Jama’at Nusrat al-Islam wal Muslimeen (affiliée à Daech) ou encore AQMI, soit Al-Qaïda au Maghreb islamique. Carte à l’appui, Meir Masri en est persuadé et il l’assume sur son compte X: si tout l’arsenal iranien est actuellement sous le feu de l’aviation israélienne, le tour de l’Algérie ne saurait tarder. «Aujourd’hui l’Iran, demain l’Algérie. Israël est en guerre contre le terrorisme», écrit le politologue.

Ce que les deux pays ont en commun, c’est également un antisémitisme primaire, héritage d’une autre ère, mais aussi d’une idéologie qui en fait le ciment d’une terreur semée en interne. Sauf que c’est fini, et l’offensive israélienne contre l’Iran a montré aussi bien l’extrême fragilité de cet épouvantail que le caractère ridicule d’un régime devenu, finalement, un tigre en papier.

Une caractéristique là encore commune avec le régime d’Alger, qui a raison de trembler. Avec la défaite annoncée du régime des ayatollahs, Alger est en passe de perdre son tout dernier soutien, non seulement dans la région, mais dans le monde. Ce sera le dernier d’une longue liste de pays et d’organisations «amies» qui ont périclité comme un château de cartes. Les derniers en date ne sont autres que le régime déchu de Bachar al-Assad en Syrie et le Hezbollah libanais, qui n’est désormais que l’ombre de lui-même.

Ne reste au régime d’Alger que la Tunisie que Kaïs Saïed a vassalisé au duo Tebboune-Chengriha au point qu’un député algérien l’a qualifié de province algérienne. Mais la Tunisie trop dépendante de ses alliances historiques avec l’Occident ne peut rien pour venir en aide aux caciques d’Alger.

De l’infiniment grand à l’infiniment petit, Alger ainsi exposé perd ses appuis. Le grand frère russe lui a tourné le dos depuis des années maintenant, allant jusqu’à lui bloquer le passage aux BRICS et activer son Africa Corps contre ses intérêts au Sahel. La Chine, pragmatique, lui préfère– et de très loin– le Maroc pour ses investissements. Quant aux pays du voisinage immédiat, Alger s’est arrangé pour en faire des ennemis jurés. Il y a toujours eu le Maroc. Il y a désormais également le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Comme il y a la Libye du maréchal Haftar, véritable cauchemar du pouvoir militaro-policier algérien. Même la Turquie, à laquelle Abdelmadjid Tebboune s’est accroché en lui déroulant le tapis rouge et en lui ouvrant l’économie du pays, s’en détourne. Ankara préfère soutenir le même maréchal Haftar en Libye et, offense suprême, installer une usine de coproduction de drones de dernière technologie… avec le Maroc.

Iran-Algérie: même combat

Les liaisons dangereuses entre l’Iran, le Polisario et l’Algérie, un ancien officier, écrivain et journaliste algérien, Anouar Malek, y a consacré tout un livre, paru en mai dernier sous le titre «Le Polisario et l’Iran: les secrets du terrorisme de Téhéran à Tindouf».

Fruit de longues années de recherche, l’ouvrage explore les ramifications du projet iranien dans le Maghreb et apporte des preuves solides d’un enracinement de la doctrine iranienne jusque dans les plus hauts rangs de l’armée algérienne.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et l'ancien président iranien Ebrahim Raïssi.

«L’Iran, incapable de constituer une milice fiable en Algérie, a trouvé un substitut prêt à l’emploi: le Polisario. Celui-ci possède non seulement les armes, mais aussi la logistique nécessaire grâce au soutien des Gardiens de la Révolution et de la Force Al-Qods, le corps d’élite de l’armée iranienne», explique l’expert dans un entretien à Le360. Le tout, avec la bénédiction d’Alger. «J’ai pu recueillir des témoignages de hauts responsables du Polisario confirmant leur alignement idéologique et opérationnel avec l’Iran et le Hezbollah», ajoute celui qui certifie que le Polisario est devenu une extension de la Force Al-Qods en Afrique du Nord. Celle-ci a d’ailleurs sollicité le Polisario, avec l’aval d’Alger, pour opérer dans la région sahélienne et y établir une présence durable.

Anouar Malek souligne également que certains éléments du Polisario ont combattu aux côtés de groupes terroristes dans les années 1990 en Algérie, avant de nouer des liens solides avec Al-Qaïda au Maghreb islamique et d’autres milices sahéliennes. «J’ai aussi obtenu un disque dur syrien contenant plus de 15.000 documents. Ils révèlent un vaste réseau de coopération entre les services secrets algériens et syriens, avec l’envoi d’agents et de combattants “sahraouis” en Syrie pour y être formés à la guérilla, à la fabrication d’explosifs et à la manipulation de missiles. Certains ont été intégrés dans des unités comme les Zaynabiyoun et les Fatimiyoun», témoigne-t-il. De quoi corroborer les fuites opérées par la nouvelle administration syrienne et qui confirment l’existence de ces collaborations, comme le nombre incalculable d’enquêtes, notamment du Washington Post et de Die Welt, qui alertent sur la vocation résolument terroriste du Polisario. Idem pour de très nombreux think tanks américains et, de plus en plus, européens, qui tirent la sonnette d’alarme sur le front séparatiste soutenu par le duo Algérie-Iran.

Ce n’est pas pour rien qu’un projet de loi pour classer le Polisario comme organisation terroriste est en gestation aux États-Unis.

Pour le régime d’Alger, protecteur de la milice, la boîte de Pandore ne tardera pas à éclater.

Ainsi épinglée, l’Algérie «commence à être perçue par ses voisins, par son environnement géopolitique et par un certain nombre de puissances régionales et mondiales comme étant l’équivalent de l’Iran, mais en Afrique du Nord», remarque le journaliste et opposant Abdou Semmar dans une vidéo dédiée. Un glissement qu’il juge dangereux et qui expose l’Algérie à «une menace d’agression extérieure comme la subit actuellement l’Iran». «Ces éléments de langage, qui consistent à dire que l’Algérie, comme l’Iran, est le sponsor du terrorisme, le parrain des organisations terroristes internationales, le facteur de déstabilisation de la région, sont exactement les mêmes éléments de langage utilisés depuis des années contre l’Iran», alerte-t-il, à raison. Le régime d’Alger joue depuis fort longtemps avec le feu et risque fort de s’y brûler.

Le tandem Tebboune-Chengriha l’aura bien cherché, en s’enlisant dans une diplomatie suicidaire. À force de multiplier les paris perdus, le régime contribue à sa propre fragilisation. «En s’aliénant ses voisins essentiels comme le Niger, le Mali, le Burkina Faso, le Maroc ou encore les factions libyennes les plus influentes, Alger creuse un isolement régional dangereux. Pire encore, son soutien à des groupes séparatistes marginaux et à certains courants islamistes en perte de vitesse témoigne d’un positionnement erratique et désuet», résume Abdou Semmar. Cette orientation hasardeuse, nourrie d’un discours idéologique hérité des années 70 et d’un antisémitisme obsessionnel, décrédibilise l’Algérie sur la scène internationale et l’expose à des menaces directes. «À force de vouloir jouer contre les dynamiques régionales au lieu de s’y inscrire, le pouvoir algérien devient son propre fossoyeur», note l’analyste.

Par Tarik Qattab
Le 17/06/2025 à 10h44