Tourisme: pourquoi les opérateurs prévoient un pic d’activité cet été

Des touristes prennent des photos au lac Yasmina à Merzouga, le 20 octobre 2024. AFP or licensors

Hausse des arrivées, allongement des séjours, diversification des marchés... Les opérateurs touristiques abordent l’été 2025 en capitalisant sur les bons signaux, sans perdre de vue les défis auxquels est confronté le secteur. Analyse.

Le 13/06/2025 à 10h32

«Bien qu’il soit encore trop tôt pour établir un bilan précis, tous les signaux sont au vert», indique le ministère du Tourisme, pour qui «les réservations anticipées, la dynamique positive de marchés émetteurs, qu’ils soient traditionnels comme la France ou émergents comme l’Europe de l’Est, ainsi que la montée en puissance de notre offre hôtelière nous permettent d’envisager la saison avec sérénité».

À fin avril, le Royaume avait déjà accueilli 5,7 millions de visiteurs internationaux, soit une progression de 23% par rapport à la même période en 2024. Un rythme qui, s’il se maintient, permettrait d’atteindre voire de dépasser l’objectif de 21 millions d’arrivées d’ici la fin de l’année, selon Zoubir Bouhoute, expert en flux touristiques.

Du côté des professionnels, les signaux de confiance se multiplient. À Marrakech, plusieurs établissements enregistrent déjà des taux de remplissage de 75% pour l’été, avec des pointes à 80% certains week-ends, confie un hôtelier.

«La saison estivale 2025 démarre sous de très bons auspices ici à Marrakech. Après un printemps déjà encourageant, nous constatons une nette accélération des réservations depuis la mi-mai. La clientèle est très diversifiée cette année: nous accueillons toujours une majorité de visiteurs européens, mais le marché arabe et asiatique est en nette progression. Le tourisme intérieur joue un rôle clé dans cette dynamique», signale notre interlocuteur.

«Chez nous, la durée moyenne des séjours a également augmenté, ce qui traduit une envie de ralentir, de prendre le temps de profiter de la ville, des excursions dans les montagnes ou dans le désert et des expériences bien-être que nous proposons au sein de notre établissement. Marrakech reste une destination de cœur, vivante, chaleureuse. Nous restons optimistes pour le reste de la saison. Les signaux sont positifs, les réservations continuent d’affluer et les retours clients sont extrêmement encourageants», poursuit-il.

Le Nord attire les foules

Dans le Nord, la saison a même commencé plus tôt que prévu, notamment grâce à la concomitance avec les vacances de l’Aïd al-Adha. Rkia Alaoui, présidente du Conseil régional du tourisme de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma, souligne que les hôtels à Tanger, Tétouan ou Tamuda étaient bien remplis dès le début du mois de juin, avec un fort afflux de visiteurs nationaux.

«Habituellement, la saison démarre en juillet, mais cette année, les réservations affluent dès maintenant. Nous espérons atteindre un taux de remplissage moyen de 70 à 75% cet été, ce qui égalerait, voire dépasserait, les résultats de 2024», espère la présidente du CRT.

Cette montée en puissance repose également sur la montée en gamme de l’offre dans le Nord, avec l’ouverture de nouvelles unités hôtelières, tant dans le moyen de gamme que dans le luxe. «Aujourd’hui, les touristes nationaux sont attirés par une offre mieux structurée, avec des plages réaménagées, des activités pour tous les publics et une ambiance familiale», fait observer Rkia Alaoui.

Un autre levier de cette dynamique est sans conteste le renforcement de la connectivité aérienne. Selon Zoubir Bouhoute, l’ajout de nouvelles lignes directes vers le Maroc «contribue directement à la baisse du coût d’accès à la destination et accroît sa compétitivité». Le pays bénéficie désormais d’un réseau dense de dessertes, avec un maillage de plus en plus équilibré entre grandes plateformes et aéroports secondaires.

Ce maillage est aussi stratégique dans le cadre de l’Opération Marhaba, qui marque le retour massif des Marocains résidant à l’étranger (MRE) chaque été. Leur contribution est considérable, tant en volume qu’en valeur. «Entre juin et août, les MRE représentent un flux structurant pour la haute saison. Le tourisme de la diaspora est à la fois économique, affectif et familial et il dynamise également les régions qui sont souvent hors des circuits touristiques classiques», analyse notre interlocuteur.

Mais pour nombre d’acteurs, la clé de la pérennisation du rebond touristique réside dans la relance du tourisme interne. Longtemps sous-estimée, la clientèle nationale représente pourtant un levier essentiel pour lisser la saisonnalité, soutenir les petites structures et amortir les chocs extérieurs.

«Le tourisme intérieur joue un rôle d’amortisseur naturel. Il faut désormais aller plus loin en structurant une offre claire, lisible et adaptée au pouvoir d’achat des familles marocaines», insiste le consultant. Il propose d’instaurer un système de chèque vacances marocain, qui pourrait cibler les classes moyennes et modestes, encourager le départ en vacances et inciter à la découverte des régions. Un tel mécanisme, inspiré de modèles européens, aurait aussi un effet multiplicateur sur l’économie locale, notamment dans les territoires hors des grands circuits.

Le véritable défi des prochaines années ne résidera plus dans le volume des arrivées touristiques, mais dans leur qualité. Diversifier les marchés émetteurs, inscrire le développement dans une logique de durabilité, mieux valoriser l’ensemble des régions du Maroc et intégrer pleinement les clientèles domestiques... Autant d’enjeux que le secteur est désormais prêt à relever, conclut Zoubir Bouhoute.

Par Hajar Kharroubi
Le 13/06/2025 à 10h32