Nous sommes à l’écoute de l’eau, comme nous sommes aussi à l’écoute de la lumière. Elles vont ensemble. C’est pour cela que l’homme s’angoisse quand la pluie tarde à tomber ou, pire, ne vient pas du tout. Or, comme il est dit dans le Coran, verset 54 de la Sourate 15, l’eau se trouve à la base de la vie, facteur primordial de la Création.
Les yeux regardent le ciel, le scrutent, le prient puis l’homme attend. Le paysan en particulier. Il attend, espère, prie dans les mosquées, sort en groupe réclamer la clémence du ciel pour sauver la terre et le bétail.
La sécheresse est un drame aux conséquences multiples. Elle distribue la faim, la soif puis la mort. La mort de la terre, blessée de ne pas avoir reçu sa part d’eau, déchirée par endroits d’avoir manqué de tendresse, d’amour, car l’eau et la terre s’aiment. Une terre qui ne boit plus est une terre non aimée, destinée à mourir, à se craqueler et à pousser ses habitants à la quitter pour aller chercher de quoi vivre ailleurs.
Chaque année, les yeux, dès qu’ils s’ouvrent le matin, se dirigent vers le ciel et l’interrogent: où sont les nuages? Qu’as-tu fait des nuages et de la pluie? Quand la miséricorde de Dieu va-t-elle provoquer le ciel et faire pleuvoir suffisamment pour que la récolte soit bonne?
Ainsi, le Maroc est souvent abandonné au ciel limpide et à l’absence des pluies absolument nécessaires pour la vie. Cette année, même s’il a plu au nord, mais pas au centre et au sud, même s’il y a eu quelques averses par-ci par-là, le pays souffre de la sécheresse, comme un corps déshydraté tombe malade.
Alors, le citadin en particulier est appelé à se rendre compte que le robinet, qui lui donne l’eau dont il a besoin quotidiennement, n’est plus une chose naturelle et qu’un jour, il n’y aura plus d’eau.
L’eau est un capital. Une ressource naturelle qu’on peut garder, protéger et utiliser à dose homéopathique. Fini le temps d’arroser les gazons des terrains de golf, de laisser un tuyau d’eau couler sur un trottoir ou dans une baignoire. L’eau est devenue -elle l’a toujours été- précieuse. Mais l’homme l’oublie. Il se lève le matin, se met sous la douche et ne doute pas une seconde que l’eau ne coulera pas. Hélas, arrivera un jour où le robinet ouvert ne donnera rien. Du vent, du rien, de l’absence. Peut-être quelques gouttes nostalgiques, puis plus rien. Ni pour se laver ni pour boire.
La planète ne répond plus à l’attente des hommes. Elle a été si maltraitée, si mal aimée qu’elle fait n’importe quoi. C’est l’eau qui arrive en colère, au point de devenir un ouragan qui emporte tout sur son passage. Des inondations qui submergent les maisons et l’homme marche sur les toits pour sauver sa peau.
Ouragans, tsunamis, pluies torrentielles, dévastatrices, ne laissant rien de vivant après elles.
Ou bien, rien. La sécheresse. Les barrages vides. Les ruisseaux secs. Les rivières nues et les cailloux roulent sous l’herbe sauvage.
La crise s’approche. On espère encore un don du ciel. On ne supporte plus le bleu du ciel. On voudrait peindre ce ciel en gris, en blanc, espérant qu’il contienne des paquets d’eau qui tomberont avec indulgence sur une terre qui les réclame.
L’homme remerciera le ciel et la terre et dira à ses enfants: «Cette année, nous sommes sauvés, mais attention, rien n’est certain». La pluie a ses caprices et n’oublions pas que le climat a tellement changé qu’il fait n’importe quoi et qu’il ne faut plus compter sur la logique d’antan. Alors, que chacun dans sa vie quotidienne fasse en sorte que sa consommation d’eau soit la plus réduite possible. Tout compte. L’eau n’est pas donnée. Elle est espérée et comme une denrée rare et précieuse, sachons la préserver, la garder, l’aimer et la protéger. Car l’eau c’est la vie, ni plus ni moins. Et c’est beaucoup.