Une refonte en profondeur du système classement des établissements d’hébergement touristique est actée, avec la publication de cinq arrêtés dans le dernier bulletin officiel, daté du 27 mai 2025.
Cette réforme, menée par le ministère du Tourisme, apporte une mise à niveau des normes de qualité, d’accessibilité, de digitalisation et de transparence et vise à opérer une montée en gamme du secteur, tout en améliorant l’expérience des voyageurs.
Le texte phare de cette réforme, portée par la loi 80-14 relative aux établissements touristiques et aux autres formes d’hébergement touristique, est l’arrêté n° 985-24, qui introduit une nouvelle grille de classement applicable à toutes les formes des établissements: hôtels, maisons d’hôtes, résidences, campings. Le classement repose désormais sur deux types de normes.
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D’un côté, les normes dites «A», obligatoires, qui portent sur les infrastructures, la sécurité, l’hygiène, l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite et la digitalisation (réservation en ligne, vidéosurveillance, personnel multilingue). Le deuxième consiste en des normes complémentaires «B», ayant pour objectif de valoriser les établissements qui vont au-delà des exigences de base (durabilité, services innovants, expérience client).
Normes de construction, hygiène, contrôle
Le deuxième arrêté fixe des normes minimales dimensionnelles, fonctionnelles, d’hygiène, de production de service et d’exploitation. Deux autres arrêtés viennent encadrer les aspects techniques et opérationnels.
Le premier fixe les modèles des documents administratifs relatifs aux demandes et autorisations d’exploitation des établissements d’hébergement touristique et aux demandes et décisions de classement des restaurants touristiques. Le second fixe les modèles des documents administratifs relatifs au classement de ces établissements.
Dernier pilier de la réforme: un arrêté fixe les normes des résidences immobilières adossées à un établissement d’hébergement touristique.
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Interrogé à ce sujet par Le360, Faouzi Zemrani, opérateur et expert en tourisme, exprime des réserves quant à la capacité de cette réforme à produire un impact décisif sur la destination. «Ce ne sont pas les normes de classement qui attirent les touristes. Ce sont les expériences à vivre, l’authenticité et la manière de promouvoir le Maroc», explique-t-il.
Selon lui, les voyageurs d’aujourd’hui privilégient de plus en plus les hébergements atypiques, notamment ceux proposés via des plateformes comme Airbnb ou chez l’habitant, bien plus que les hôtels traditionnels.
Une hôtellerie à deux vitesses
Le Maroc compte aujourd’hui deux types d’hébergement: d’une part, les chaînes internationales, qui respectent des standards stricts, d’autre part, des hôtels locaux, souvent à la peine pour satisfaire aux normes de classement, faute de moyens ou de personnel qualifié, selon notre interlocuteur.

Face aux dysfonctionnements observés, notamment le décalage entre le classement affiché (nombre d’étoiles) et la qualité réelle du service, l’expert note que le client reste le meilleur juge. «Les touristes ne se fient plus aux étoiles, mais aux avis en ligne, aux recommandations sur Tripadvisor, au bouche-à-oreille ou aux influenceurs», relève-t-il. Il estime que ce sont ces mécanismes qui poussent réellement les établissements à se remettre en question.
Interrogé sur l’idée d’introduire le concept de «client mystère» (qui consiste à engager des personnes pour se faire passer pour des clients normaux et évaluer anonymement la qualité des services dans ces établissements) évoqué par la ministre du Tourisme, l’expert reste réservé. «C’est un outil utile, pratiqué à l’international, notamment dans la restauration. Mais tout dépendra de la crédibilité, de l’objectivité et de la rigueur du dispositif», estime-t-il.
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À quelques années de l’organisation par le Maroc du Mondial 2030, le défi de la qualité de l’accueil et du service dans les établissements d’hébergement touristique reste posé. Faouzi Zemrani appelle à la vigilance et à la prise de conscience collective. «D’ici 2030, j’espère que la conscience professionnelle progressera. La Coupe du monde, on ne l’accueille pas tous les jours. Il faut s’y préparer sérieusement», insiste-t-il.
Le nouveau système de classement est donc un levier parmi d’autres, mais il ne suffira pas à lui seul à transformer en profondeur le secteur. Pour réussir le pari de 2030, le Maroc devra miser sur la formation, la rigueur, et surtout, l’expérience client, qui reste au cœur de toute stratégie touristique durable.