L’annonce a été faite en ce mois d’avril, d’abord par le Centre régional d’investissement (CRI) Fès-Meknès, avant d’être confirmée par le département de tutelle, soit le ministère de l’Équipement et de l’Eau. Traversant le cœur du Maroc, l’autoroute Fès-Marrakech s’apprête à sortir de terre. Le ministère pilote actuellement les études techniques et environnementales relatives à ce projet, tout en explorant les modalités de financement public-privé susceptibles de garantir sa viabilité. Et pour cause, ce nouveau programme autoroutier, étalé sur 420 kilomètres et présenté comme le plus ambitieux du genre au Maroc, nécessitera un budget colossal: comptez 28 milliards de dirhams d’après le ministre Nizar Baraka, qui s’exprimait récemment au Parlement en réponse à une question écrite.
Dans le détail, l’autoroute desservira directement plusieurs pôles économiques majeurs, à commencer par Fès, Meknès, Béni Mellal et Marrakech. Elle soulagera ainsi les axes autoroutiers Fès-Rabat, Rabat-Casablanca et Casablanca-Marrakech, empruntés actuellement pour relier Fès à la ville ocre. Elle a également pour objectif de désengorger la route nationale 8 (RN 8), souvent sujette à une forte circulation, en proposant un itinéraire parallèle plus fluide.
Le gain de temps estimé est considérable. Dépassant les 6 heures aujourd’hui en autoroute, et les 8 heures via la route nationale, le temps de trajet futur devrait être réduit à environ 4 heures. Le projet autoroutier traversera également d’autres localités stratégiques telles que Khénifra, Mrirt, Azrou et El Kelâa des Sraghna, contribuant ainsi à leur désenclavement progressif.
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Divisé en trois tronçons (le bi-pôle Fès et Meknès-Khénifra, Khénifra-Béni Mellal et Béni Mellal-Marrakech), le projet représente une avancée majeure pour le maillage territorial du Royaume et le renforcement de la connectivité entre le Nord et le Centre du pays. Pour ses promoteurs, CRI comme tutelle, cette autoroute n’est pas seulement un chantier d’infrastructure, mais une véritable colonne vertébrale destinée à dynamiser les échanges économiques, sociaux et humains à travers les régions qu’elle reliera.
L’amélioration de la sécurité routière constitue un autre enjeu essentiel, cette nouvelle autoroute étant conçue pour offrir de meilleures conditions de conduite aux nombreux automobilistes qui empruntent cet axe chaque jour.
Au-delà des aspects logistiques, l’ambition est aussi de contribuer à la réduction des disparités territoriales, en facilitant l’accès aux services et aux opportunités économiques pour les régions enclavées. Cette infrastructure est pensée comme un levier de stimulation pour les dynamiques économiques locales, notamment dans les secteurs de l’agriculture, du tourisme, du commerce et de la logistique.
Ce projet s’inscrit également dans le cadre des préparatifs pour la Coupe du monde 2030, coorganisée par le Maroc, l’Espagne et le Portugal. À l’approche de cet événement d’envergure mondiale, le renforcement des infrastructures de transport devient un enjeu crucial.
Un montage financier à définir
Si l’ambition est grande, le défi l’est tout autant. Le coût de réalisation de cette autoroute appelle à une gestion rigoureuse des ressources, qu’elles soient étatiques ou issues de partenariats. Le montant de 28 milliards de dirhams soulève des questions quant à sa mobilisation, d’autant que la Société nationale des autoroutes du Maroc (ADM), qui porte ce projet dans son plan 2025, serait confrontée, selon de récents rapports, à des difficultés financières et de gestion. Par conséquent, si les études techniques et de tracé progressent, la structuration du financement demeure un point central pour l’avenir de cette autoroute.
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Élaboré par la Commission des infrastructures de la Chambre des représentants et publié en janvier dernier, un rapport de la mission exploratoire temporaire relative à ADM a précisé que la situation financière d‘ADM est marquée par une dette cumulée d’environ 40 milliards de dirhams, incluant des prêts bancaires, des obligations et des financements obtenus auprès d’institutions financières nationales et internationales.
Pour autant, les pouvoirs publics maintiennent la cadence des investissements. Selon le rapport sur les établissements et entreprises publics (EEP) accompagnant la loi de finances 2025, le programme d’investissement d’ADM devrait atteindre 7,74 milliards de dirhams sur la période 2025-2027. La programmation à moyen terme concerne notamment l’autoroute continentale Rabat-Casablanca et le projet autoroutier Guercif-Nador. L’objectif de ce dernier est de renforcer la connectivité de la région de l’Oriental et d’assurer la connexion du nouveau port de Nador West Med au réseau autoroutier national, en le reliant à l’autoroute Fès-Oujda.
À l’horizon 2030, il est prévu que le réseau autoroutier national, établi actuellement à 2.177 kilomètres, s’étende à 3.000 km. Le Maroc se classe au 16ème rang mondial pour la densité et la qualité de son réseau routier.