En bas de la ceinture…sexe ou chasteté?

Zineb Ibnouzahir

Zineb Ibnouzahir . Achraf Akkar

ChroniqueEn voulant absolument maintenir le sujet de la sexualité sous une chape de plomb pour ne pas éveiller le désir et l’intérêt des jeunes et ainsi préserver nos valeurs, c’est tout l’inverse qui se produit. Car modernité oblige, la 4G ne se plie pas aux règles religieuses.

Le 19/07/2020 à 11h37

Il y a quelques jours, le bureau de l’Unesco pour le Maghreb et la représentation du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) ont sonné la mobilisation dans les rangs des médias maghrébins. Objectif, se serrer les coudes pour sensibiliser à l’importance des programmes pédagogiques liés à une éducation sexuelle complète. Il n’en a pas plus fallu pour que des voix s’élèvent contre cette manie de vouloir absolument mettre le sexe au centre de tous les débats, sachant que de l’avis de bon nombre de nos concitoyens, ceci ne nous concerne pas. Après tout, nous sommes des musulmans et en tant que bons musulmans, on ne parle pas de ces choses-là et surtout on ne passe pas à l’acte…Sujet clos. Fin du débat.

Dans un Maroc où l’on peine à concilier traditions, religion, tabous, interdits, désirs et frustrations, l’initiation à la sexualité n’est pas une mince affaire. En parler en famille? No way! En parler à l’école? Encore faudrait-il que les profs osent aborder le sujet car, dénoncent les deux institutions onusiennes, le corps enseignant semble aussi gêné que les parents quand le moment arrive de parler sexe et sexualité reproductive. Un comble!

Leur apprentissage sexuel, les Marocains l’acquièrent donc sur Internet. Ajoutez à cela que plus de 75% de Marocains sont équipés de smartphones… Vous voyez le tableau? Pas étonnant que le Maroc caracole dans le peloton de tête des pays arabo-musulmans qui consomment le plus de pornographie.

«Bon et alors? Un petit porno de temps en temps ça ne fait de mal à personne!», vont arguer certains, au nom de la préservation de la chasteté IRL (in real life). Oui, mais non! Découvrir son corps et le coït à travers le porno sans pour autant expérimenter la sexualité et l’amour, ce n’est pas la meilleure des manières pour faire ses premiers pas dans l’intimité et être en mesure de jauger la notion de respect de l’autre et de consentement.

La violence et la sexualisation des mots qu’entendent les femmes chaque jour dans nos rues témoignent de l’impact de la pornographie sur la formation sexuelle des hommes de ce pays. Et quand le passage à l’acte se fait, c’est pour mieux imiter ce qu’on a vu sur Internet ou à la télévision. Pas étonnant que la culture du viol ait encore de beaux jours devant elle, comme en témoigne le nombre de faits divers aussi sordides qu’affolants qui gangrènent notre actualité au quotidien.

L’impact de ce tabou qui entoure la sexualité est aujourd’hui palpable, visible et chiffrable. Ainsi, selon l’UNFPA, les Marocains prolongent de plus en plus leur célibat, l’étendant du côté des hommes jusqu’à 32 ans, et jusqu’à 27 ans pour les femmes. Et en attendant le mariage, on croise les jambes et on serre les cuisses? Ne soyons donc pas si naïfs ou plutôt de mauvaise foi…au nom de la foi.

D’après les statistiques évoquées, ces jeunes gens qui ne sont pas pressés de se marier batifolent gaiement de plus en plus tôt, dès l’âge de 16 ans pour les garçons et 17 ans chez les filles, quand ce n’est pas beaucoup plus tôt encore.

Alors oui effectivement, le mariage pour accéder au Graal de la première partie de jambes en l’air n’a plus vraiment de sens. Une chose est sûre, en voulant absolument maintenir le sujet de la sexualité sous une chape de plomb pour ne pas éveiller le désir et l’intérêt des jeunes et ainsi préserver nos valeurs musulmanes, c’est tout l’inverse qui se produit. Car modernité oblige, la 4G ne se plie pas aux règles religieuses. Alors que faire? Continuer à rougir, interdire, se taire ou prendre enfin le taureau par les cornes pour donner aux jeunes l’éducation sexuelle qu’ils méritent d’avoir?

Preuve qu’il est grand temps de lever l’omerta sur le sexe, 37% des jeunes entre 15 et 24 ans ayant eu des rapports sexuels, déclarent n’avoir jamais utilisé de préservatifs et 44% d’entre eux ne l’utilisent que parfois.

Côté jeunes filles, elles sont 8% âgées de 15 à 24 ans ayant eu une expérience sexuelle qui s’est soldée par une grossesse non désirée. 70% d’entre elles, ont déjà subi un avortement…

Ces jeunes et ces adultes qui ne résistent pas à leurs pulsions (naturelles) ne sont pas à blâmer. Ce ne sont pas des brebis égarées du troupeau qui se sont mal comportées, n’en déplaisent aux gardiens de la vertu des autres, qui feraient mieux de s’occuper de la leur et de s’y limiter. Car au-delà de la sensibilisation à l’éducation sexuelle, il est plus que jamais important de statuer enfin sur les libertés individuelles, dont celle de disposer de son corps. Sans quoi, c’est le serpent qui se mord la queue.

Et sans quoi, on aura droit dans les tous espaces publics à une séparation des citoyens par genre, à l’image de cette mouqataâ de Temara, où la distanciation sociale en temps de pandémie se mue en distanciation des genres pour mieux préserver les fesses de ces dames des mains baladeuses et des frotteurs intempestifs.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 19/07/2020 à 11h37

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ll faut un homme et une femme pour faire un enfant. Malheureusement, seules les femmes souffrent de grossesses indésirables ... "Pécheresses, hors-la-loi. Comme telles sont jugées au Maroc les femmes qui ont un enfant hors mariage. Rejetées par leur famille, elles se retrouvent à la rue. A Casablanca, une association vient en aide à ces "filles-mères" mises au ban de la société. Depuis vingt ans, l’Institut national de solidarité avec les femmes en détresse (INSAF) leur offre un toit, des soins, et une formation professionnelle. De quoi se reconstruire et se persuader, enfin, qu’elles ont le droit, comme tout le monde, de vivre dans la dignité et le respect "

Bonsoir Madame Zineb Ibnouzahir. J'ai toujours regardé des pornos, avant l'avènement de l'internet. J'y ai appris beaucoup de choses et je ne suis devenu ni obsédé sexuel, ni violeur, ni harceleur, ni refoulé. J'ai une sexualité tout à fait normale. Il y a beaucoup d'hommes et de femmes dans mon cas. Aujourd'hui, je suis vieux et je continue toujours à regarder un porno par-ci par-là sur le net. Les plaisirs sont évidemment toujours les mêmes, mais en même temps si variés. La pire des sociétés c'est celle où tout un chacun peut s'auto-proclamer gardien de la morale publique et même privée! Cordialement.

Je ne comprends pas cette confusion dans nos esprits des valeures humaines et religion, cette derniere parle d'un halal et d'un haram dans notre langage courant,mais qu'on est- il sur le plan relationnel réel ?? Une hypochrisie sociale communautaire par excellence: j'ai l'acte social mais je me permets jouissance ailleurs et si je suis juge, j'applique la loi communautaire religieuse et je condamne..je ne prends le moindre temps ni effort pour s'autocritiquer...! Quand à l' education sexuelle, ce n' est qu' une brique d' un mur solide et d'un répertoire historique qu'il faut revoir , analyser critiquer pour plaidoyer une école qui elle SEULE capable de faire respecter l'humain et ses besoins sans avoir recours interminablement à les politiser... Notre problème crutial innacceptable à mon sens c est on croit profondément au changement par les SOUHAITS.

Nul doute, l’éducation sexuelle est essentielle et l’école est appelée à jouer un rôle au premier plan pour éclairer les adolescents sur leur développement. Cela résoudra la problématique du harcèlement et diminuera les cas des rapports sans consentement. Seulement la religion est une constante dans notre société ; et une telle initiative risque d’être interprétée à tort comme une incitation à la débauche. Un dilemme. Plutôt que d’être fataliste, avançons dans un juste équilibre. D’abord, autant plaider pour une pédagogie sexuelle saine, autant faire front commun contre les lobbys de l’industrie pornographique et bloquer leurs sites qui sont basés à Chypre et en Europe de l’Est.

Je pense qu'un mariage précoce sans festivités est une solution pour les jeunes qui ne veulent pas attendre l'âge mûre de responsabilité.... Celà au moins on peut garantir l'identité des enfants qui naissent de cette relation +- légitime.. Merci

Du grand n'importe quoi ! Ca me rappel les tenant de la dépenalisation de la consommation de drogue dites " douces" dans certains pays occidentaux sous prétexte que ça faisait partie des libertés individuelles et qu'on ne pouvait rien contre ce fléau. Résultat des courses, un fiasco sanitaire pour chacun des pays qui s'est risqué à suivre et mettre en application ce type de raisonnement. Et une fois que les pilliers de nos valeurs auront tous été abattus avec cette mentalité libertaire, on va faire quoi ensuite ? dépenaliser tout ce qui est contraire aux bonnes mœurs ? Avec quelles conséquences sanitaires et sociologiques ? Madame, rappelez vous bien que l'immense majorité de la population est catégoriquement opposée à vos positions radicales et irresponsables sur ce sujet.

Malgré tous les mots dévalorisants, un très joli existe lsane En français, il n'y a aucun joli mot

De quel tabou s'agit-il alos que petits et grands savent de quoi il est question en parlant du sexe. Il n'est plutot temps de revoir notre systeme educatif en instaurant une education/formation basee su la recherche et l'encouragement des bonnes initiatives. Le sece tout le monde en parle.

Chronique impeccable et malheureusement réaliste. Pour le relationnel avec les dames, j'ai été "éduqué" avec les films romantiques made in USA. Ce n'était pas d'une grande qualité, mais en tout cas, ça m'a permis de ne pas devenir une bête dégueulasse n'ayant envie que d'une chose. Il faut aussi confesser que le meilleur exemple furent mes parents qui étaient d'éternels romantiques. Bref, au-dessus de la ceinture il y a un truc qui se balade, si, si, vous vous souvenez : un cerveau. Il sert à plein de choses, alors de grâce, les mecs, si vraiment cela vous démange, prenez du bromure, ça devrait radicalement calmer vos ardeurs bestiales.

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