Casablanca: démolition du souk Dallas à Hay Hassani, les commerçants désemparés

Lors de l'opération de démolition du Souk Dallas à Hay Hassani.(K.Sebbar/Le360)

Le 17/05/2025 à 12h57

VidéoDepuis mardi, les autorités locales de la préfecture de Hay Hassani, à Casablanca, mènent une vaste opération de démolition au niveau du Souk Dallas, célèbre marché informel de la ferraille. Objectif: libérer l’espace public des installations et commerces jugés anarchiques. Bulldozers, agents d’autorité et services de police ont été mobilisés pour dégager trottoirs, ruelles et devantures occupés depuis des décennies. Sur le terrain, les commerçants dénoncent une décision brutale et s’estiment abandonnés par les responsables.

Le célèbre marché de la ferraille de Hay Hassani, connu sous le nom de Souk Dallas, est depuis le début de la semaine au centre d’une vaste campagne de libération de l’espace public. Engins de démolition, remorquages et saisies se succèdent dans cette zone très fréquentée de Casablanca. Du côté des autorités, cette intervention musclée répond aux nombreuses plaintes des habitants de Hay Hassani, excédés par l’anarchie qui règne autour du marché. Mais sur place, de nombreux commerçants expriment leur incompréhension et leur colère face à une démarche qu’ils jugent unilatérale.

Depuis mardi, les bulldozers avancent méthodiquement à travers ce bidonville commercial, rasant tout sur leur passage. Pour les commerçants, ce marché est un espace de vie et de survie, où cohabitent depuis plus de 40 ans des ferrailleurs, marchands de vêtements d’occasion, de fruits et légumes, bouchers, vendeurs d’articles ménagers et autres petits métiers. «Nous sommes là depuis 1987, il y a 943 magasins et nous avons toujours travaillé dans la transparence et demandé une solution durable», déclare Ibrahim Zrik, président de la Fédération de la ferraille du Souk Dallas.

Selon les représentants du souk, des discussions avaient pourtant été engagées avec le conseil de la ville au sujet d’un éventuel relogement du marché. Un terrain situé près de l’ancienne décharge de Médiouna avait été évoqué pour accueillir l’activité dans un cadre organisé. «Ils nous ont parlé d’un espace de 260 hectares, dont une partie serait destinée aux ferrailleurs», évoque Ibrahim Zrik. «Nous avons accepté le principe, comme l’ont fait nos confrères de Sbata et Sidi Moumen. Mais aujourd’hui, c’est l’incompréhension totale. Chez nous, ils démolissent avant de nous donner une solution concrète», se plaint-il.

«Nous leur avons toujours dit que nous étions prêts à collaborer, à déménager, à aménager, à coopérer sur toute initiative. Mais ce qui est étrange, c’est qu’ils nous parlent d’une façon et agissent d’une autre», accuse-t-il.

«Aujourd’hui, nous avons été pris par surprise lorsque les autorités sont entrées dans le marché et ont commencé à démolir», partage à son tour Mohamed Achak, représentant des commerçants. «Nous avons tenu une réunion avec le président de l’arrondissement pour parler du nettoyage du marché et nous avons applaudi cette volonté. Mais aujourd’hui, nous voilà au cœur d’un plan de démolition», partage-t-il encore choqué.

«Nous respectons les autorités mais nous ne sommes pas d’accord», insiste-t-il. «Ce marché est notre gagne-pain et là, on détruit tout sans nous proposer d’alternative claire, ce n’est pas possible», déplore-t-il.

Les commerçants ne contestent pas la nécessité de mettre fin à l’anarchie, mais réclament un plan de relogement digne et équitable. «Nous saluons l’idée d’organiser notre activité, mais cela ne peut se faire sans plus de dialogue», conclut le président de la fédération de la ferraille.

Souk Dallas est aujourd’hui le théâtre d’un bras de fer entre autorités et commerçants. Une chose est sûre: face à ce climat de tension, ce chantier de libération du domaine publique risque de laisser derrière lui bien plus que des gravats.

Par Ryme Bousfiha et Khadija Sabbar
Le 17/05/2025 à 12h57