Chaque début d’été rime avec résurgence de cas d’intoxications alimentaires au Maroc. Cette année encore, les alertes se multiplient à travers le pays. À Taounate, 13 personnes ont été hospitalisées après avoir consommé des pastèques. Dans la région des Doukkala, 12 autres ont été admises aux urgences pour des symptômes similaires liés à l’ingestion de melons et de pastèques. Plus récemment, à Casablanca, une jeune femme a été prise en charge dans une clinique après avoir consommé un melon, souligne le quotidien L’Économiste dans son édition du lundi 30 juin.
Ces incidents ne sont pas isolés. «Nous avons reçu plusieurs réclamations collectives à nos guichets de consommation à El Jadida et à Taroudant, dont une plainte après un mariage où les invités ont présenté des troubles digestifs après avoir consommé du melon et des plats cuisinés», affirme Ouadie Madih, président de la Fédération nationale des associations de consommateurs (FNAC), cité par le quotidien.
Selon le même responsable, plusieurs facteurs contribuent à cette situation: forte chaleur, défaut d’hygiène, mauvaises conditions de conservation, exposition prolongée au soleil, mais aussi pratiques agricoles douteuses. «Le recours anarchique à des pesticides vendus dans des entrepôts informels ou des garages de fortune en milieu rural est très inquiétant», alerte Madih. Il rappelle qu’un pesticide est un produit à manipuler avec rigueur, au même titre qu’un médicament, et qu’il doit répondre à des normes strictes.
«Or, sur le terrain, le contrôle semble défaillant», déplore L’Économiste. Les produits issus des champs parviennent parfois directement aux marchés hebdomadaires ou aux détaillants, sans passer par les circuits officiels comme les marchés de gros. Résultat: aucun suivi, aucune traçabilité, et une forte exposition du consommateur aux risques sanitaires.
Le Maroc compte plus de 1.280 produits phytosanitaires homologués, comprenant 327 substances actives. L’Office national de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) tient un index phytosanitaire recensant 1.135 pesticides autorisés. Pourtant, selon des rapports d’associations européennes, 40 de ces substances seraient classées comme hautement dangereuses (HHP)
Un professionnel du secteur agricole spécialisé dans l’export tire la sonnette d’alarme. «Le surdosage dans les champs, la prolifération de produits illicites ou contrefaits (insecticides, fongicides, herbicides…) sont des causes majeures de problèmes de santé publique». Un constat partagé par un dirigeant d’une fédération professionnelle: «Notre circuit local de distribution agricole échappe en grande partie à tout référencement ou contrôle. Il y a un marché à deux vitesses: un marché d’export aux normes rigoureuses et un marché local informel et peu surveillé», affirme-t-il.
Autre faille pointée: l’absence de traçabilité chez certains exportateurs eux-mêmes. Plusieurs opérateurs, non producteurs, se contentent d’acheter les cargaisons sans en vérifier la qualité ou l’origine. «Ce manque de rigueur met en péril l’image du produit marocain à l’international et compromet la sécurité des consommateurs locaux», avertit un représentant d’une fédération spécialisée, également cité par L’Économiste.