La chaîne de production de viande rouge est fragilisée. À la source du problème: cinq années consécutives de sécheresse, qui ont gravement affecté l’agriculture et poussé les éleveurs à vendre une partie de leur cheptel pour maintenir leur production. Résultat: une offre insuffisante, une flambée des prix et une pression accrue sur la filière.
Pour juguler l’inflation, une solution d’urgence s’est imposée: l’importation de viandes rouges, fraîches ou congelées. Une mesure qui, tout en répondant aux besoins des consommateurs, vise à offrir un répit au secteur local, selon Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader).
Pour l’heure, la commercialisation de viandes rouges importées est encore limitée. Casablanca et Fès figurent parmi les premières villes à en bénéficier, mais selon le président de la Comader, cette offre sera bientôt étendue à l’ensemble du territoire marocain, avec des prix, compétitifs, ne dépassant pas 80 dirhams le kilogramme pour le bœuf et 85 dirhams pour l’agneau.
Une mesure ponctuelle pour soutenir l’élevage local
Pour autant, l’objectif de cette initiative n’est pas de concurrencer durablement la production nationale. «C’est une opération ponctuelle destinée à répondre à une situation exceptionnelle», affirme-t-il. La première justification de cette mesure réside dans l’écart considérable des coûts de production entre le Maroc et ses fournisseurs internationaux. «En Europe et en Amérique latine, les conditions climatiques et les infrastructures permettent une production massive et à moindre coût», explique Rachid Benali. Là où l’élevage marocain est pénalisé par la sécheresse, ces régions bénéficient d’une abondance de ressources naturelles et de subventions agricoles, rendant leurs viandes nettement moins chères.
Lire aussi : Importations de viandes rouges: voici comment les opérateurs espagnols répondent aux exigences du label halal
C’est cette compétitivité des prix qui a poussé le Maroc à se tourner vers l’importation, une solution permettant de soulager les consommateurs sans sacrifier la qualité. «Les viandes importées sont de très bonne qualité. Elles ont été rigoureusement contrôlées et répondent aux normes marocaines», rassure le président de la Comader.
Contrairement à certaines craintes, cette mesure ne vise pas à affaiblir le secteur local. Au contraire, l’importation de viandes rouges a été pensée comme un levier temporaire pour stabiliser le marché tout en protégeant l’avenir de l’élevage marocain: «Nous devons permettre aux éleveurs de garder leur cheptel. C’est essentiel pour reconstituer nos effectifs dans les années à venir.»
Parallèlement, des aides spécifiques ont été mises en place pour soutenir les éleveurs en difficulté: distribution d’aliments composés, subventions pour l’achat d’orge et autres dispositifs d’accompagnement. «Ces mesures visent à donner aux agriculteurs les moyens de surmonter la crise et de planifier leur avenir. Pour l’instant, les quantités de viande importée restent modestes. La distribution est encore limitée à quelques villes, mais cela va changer dans les mois à venir. Les prochains arrivages devraient être plus conséquents, avec des volumes accrus de viande fraîche importée ainsi que d’animaux vivants destinés à l’abattage local», annonce Rachid Benali.
Trouver le juste équilibre
Cette augmentation progressive permettra de répondre plus efficacement à la demande croissante des consommateurs tout en équilibrant l’offre sur le marché. L’objectif final est de garantir une disponibilité suffisante pour tous, des grandes villes aux zones rurales.
À court terme, cette mesure répond à une pénurie critique, mais son véritable succès résidera dans sa capacité à préparer l’avenir. En maintenant des prix abordables et en soutenant les éleveurs, cette initiative pourrait poser les bases d’un marché plus résilient et plus inclusif. Mais pour y parvenir, un équilibre subtil devra être trouvé entre importation et production locale, estiment plusieurs professionnels sondés par Le360.