Alors que l’industrie aéronautique mondiale fait face à une pression croissante pour réduire son empreinte carbone, les carburants d’aviation durables (SAF -pour Sustainable Aviation Fuels) s’imposent comme une alternative prometteuse.
Leur production a, en effet, bondi de 1.150% en trois ans, signe d’un engouement certain.
Pourtant, en 2024, ils ne représentaient encore que 0,3% de l’offre mondiale de kérosène. Un paradoxe qui souligne l’ampleur du chemin à parcourir, indique le magazine Challenge.
Le cabinet Boston Consulting Group (BCG) a interrogé plus de 500 professionnels de 207 entreprises du secteur aérien pour comprendre ce frein à l’adoption massive du SAF.
Verdict: les coûts de production, encore très élevés, incitent les acteurs à rester en retrait. Si 80% des entreprises se disent confiantes quant à leur capacité à atteindre les objectifs SAF à l’horizon 2030, seules 14% se déclarent véritablement prêtes à s’y engager dès aujourd’hui.
Le constat est clair: les investissements restent inégaux. Les secteurs de la finance, de l’énergie et de la construction aéronautique avancent, tandis que les compagnies aériennes et les aéroports privilégient des solutions jugées plus rentables à court terme, comme le renouvellement des flottes.
Dans ce paysage en transition, le Royaume peut jouer un rôle de catalyseur, souligne Challenge.
Fort de son potentiel exceptionnel en énergies renouvelables (solaire, éolien), d’un engagement affirmé pour l’hydrogène vert, et d’infrastructures aéroportuaires modernes connectées à l’Europe et à l’Afrique, le Royaume se positionne comme un futur hub régional de production de SAF.
Pour Émile Detry, Managing Director & Partner chez BCG à Casablanca, le pays dispose d’atouts majeurs: une énergie compétitive, une industrie en pleine expansion et une vision claire des enjeux de la transition.
Miser aujourd’hui sur les carburants durables, c’est investir dans la souveraineté énergétique, la croissance verte et l’emploi qualifié.
Mais, pour transformer cette ambition en réalité, le passage à l’action est indispensable.
BCG recommande de fédérer les parties prenantes (pouvoirs publics, énergéticiens, transporteurs, investisseurs) autour d’une stratégie commune.
Le lancement de projets pilotes, adossés aux grands hubs logistiques du pays, marquerait un premier jalon concret.
Cela suppose aussi un cadre incitatif: garanties de rachat, facilitation de l’accès aux financements verts, soutien à l’investissement. Autant de leviers pour attirer les capitaux et accélérer la montée en puissance du SAF, écrit-on.
Les coûts élevés du SAF, notamment des e-fuels produits à partir d’hydrogène vert et de carbone capturé, demeurent un frein.
Mais les nouvelles réglementations européennes, qui imposeront progressivement leur utilisation, ouvrent une fenêtre stratégique.
Les premiers à se positionner profiteront d’un effet d’échelle, capteront des parts de marché-clés, et s’imposeront comme les leaders d’un secteur en pleine structuration.