Figure montante de la scène électro-urbaine marocaine à seulement 21ans, Yas.Weeyzz, de son vrai nom Yassir Rhmt, n’en est pas à son premier coup d’éclat. Après avoir imposé sa signature avec l’EP «Moroccan Culture» et l’album «Oracle», il revient avec Sounds of Morocco, un projet hybride qui mêle l’héritage musical marocain aux textures modernes de la house et du beatmaking.
À travers des collaborations locales et une exploration région par région, du Ribab de Tiznit et l’Aïta de Casablanca à la Rokba de Zagora, en passant par le Malhoun de Fès et le Gnaoua d’Essaouira, l’artiste veut offrir une relecture contemporaine et inclusive de l’identité sonore marocaine. Une quête artistique et identitaire qu’il entame naturellement par «Tamagit», en hommage à ses racines dans le Souss-Massa.
Le360: Tamagit est le premier extrait de «Sounds of Morocco», tourné à Tiznit. Était-ce une évidence pour toi?
Yas.Weeyzz: Oui, c’était même une nécessité. «Tamagit» signifie «identité» en amazigh, et je suis originaire de la région de Souss-Massa. Pour moi, il était impensable de lancer ce projet sans commencer par mettre à l’honneur mes racines. C’est là d’où je viens, là où tout a commencé. Il était donc naturel de rendre hommage à cette terre dans le premier chapitre du projet.
Est-ce que tu as toujours su que la musique était ta vocation ?
Mon premier contact avec la musique s’est fait à l’âge de 10 ans, grâce à mon oncle qui m’a intégré dans une troupe de Daqqa marrakchia. J’étais encore tout jeune, mais déjà très attiré par les percussions: je savais jouer du bendir, du Tarr (des tambours), et même les instruments à vent, comme le Neffar.
Plus tard, vers l’âge de 16 ans, j’ai découvert que je pouvais créer de la musique depuis mon ordinateur portable, dans ma chambre. Ce fut une révélation: à l’aide de logiciels simples, j’ai commencé à composer, enregistrer, mixer. C’est à ce moment-là que j’ai compris que la musique serait bien plus qu’une passion, qu’elle deviendrait un véritable chemin de vie, notamment lorsque j’ai commencé à produire d’autres artistes.
Peux-tu nous parler un peu plus du projet «Sounds of Morocco» ?
C’est un projet musical «audiovisuel» qui réunit une panoplie d’artistes des 12 régions du Maroc. Il vise à créer une fusion entre les traditions musicales marocaines et les sonorités actuelles, dans une logique de transmission et de modernisation. Nous tenons une résidence artistique de 15 jours dans chaque ville. L’idée, c’est de montrer qu’on peut réinventer nos héritages musicaux, les réinterpréter à notre façon, en gardant leur authenticité tout en les ouvrant à un public plus jeune ou international. On veut raconter le Maroc à travers ses sons, ses voix, ses territoires. Un documentaire viendra clore ce long voyage en retraçant l’ensemble de cette aventure.
Comment s’est passée la collaboration avec les autres artistes ?
Au début, j’avais un peu peur que ça ne prenne pas. Chacun vient de son propre univers musical, avec ses habitudes, ses influences. Mais, dès la première session d’écoute, la magie a opéré. Chacun a commencé à jammer, à improviser, à poser des lignes mélodiques et rythmiques. Salah Fafah et Simane El Morabit ont été géniaux. On a passé trois jours enfermés à créer, à enregistrer et à échanger.
Le DJ Yas.weeyzz de son vrai nom Yassir Rhmt lors du tournage de Tamagit
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D’où t’est venue l’idée de ce projet ?
Je crois que ça remonte à l’enfance. J’ai grandi dans un environnement très riche musicalement et pendant longtemps, je me suis demandé pourquoi les sons de chez nous n’étaient pas davantage valorisés, modernisés et partagés. J’ai voulu créer quelque chose qui parle à ma génération: une musique ancrée dans la tradition, mais dans une forme contemporaine. Une musique qui donne envie de danser, de voyager, de ressentir. Et surtout, une musique qui unit les gens.
Quelle est la prochaine étape de ce voyage musical ?
Le prochain rendez-vous est fixé pour ce mois-ci. Nous entamerons une nouvelle étape du projet à Casablanca, en partenariat avec la Fondation Touria et Abdelaziz Tazi. Cette phase mettra à l’honneur l’Aïta marsaouia, que nous avons découverte bien plus riche et profonde que nous ne l’imaginions. Nous avons entrepris de traduire toute la richesse culturelle de Casablanca-Settat à travers une représentation fidèle et inspirée.
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Est-ce que tu estimes que ce projet participe à la promotion du tourisme local ?
Totalement. À travers les clips que nous tournons, on s’efforce de valoriser les décors, les paysages et les monuments des villes où l’on tourne. Par exemple, à Tiznit, on a mis en lumière les kasbahs et les ruelles typiques. L’objectif, c’est de donner envie aux gens d’y aller, de découvrir ces lieux. On essaiera de faire de chaque vidéo une carte postale vivante, en y ajoutant notre vision artistique.
De plus en plus d’artistes mettent en avant le Maroc et son patrimoine. Quel regard portes-tu sur ce mouvement ?
Je trouve ça très beau, très encourageant. On voit que les artistes d’aujourd’hui assument de plus en plus leurs racines. Ils veulent les explorer, les sublimer, les partager avec fierté.Mais je pense aussi qu’il y a encore beaucoup de travail à faire pour exporter notre culture, pour la rendre accessible à l’international, sans la dénaturer. Nos traditions sont riches, profondes, et elles méritent d’être connues au-delà de nos frontières.