Associated Press braque ses projecteurs sur les tapis d’Aït Ouaouzguit à Taznakht

Des tisserandes de Taznakht oeuvrant sur un tapis. (AP)

Dans le cadre d’un reportage international sur les atouts touristiques du Sud-Est marocain, l’agence Associated Press met en lumière les tisserandes de Taznakht dans la province de Ouarzazate, gardiennes d’un patrimoine culturel vivant et moteur de développement local.

Le 01/07/2025 à 14h26

Sous les doigts habiles des femmes de Taznakht, les fils de laine se croisent, se nouent et racontent l’histoire millénaire des tribus Aït Ouaouzguit. Ce savoir-faire ancestral, longtemps cantonné aux foyers, s’expose aujourd’hui fièrement dans les showrooms du Centre féminin de promotion du tapis de Taznakht, devenu l’un des piliers économiques de la région.

Ce lieu, qui fédère 35 coopératives et plus de 3.500 tisserandes, a attiré l’attention de l’agence de presse américaine Associated Press (AP). Dans un reportage tourné en juin 2025, AP met en avant les richesses touristiques, artisanales et naturelles de la province de Ouarzazate. Premier arrêt: Taznakht et ses tapis emblématiques.

L’émotion tissée à la main

«Ce tapis n’était pas un bien marchand à l’origine. Il était offert en cadeau, notamment lors des mariages. Les femmes y impriment leurs émotions, qu’elles soient heureuses ou en colère, à travers les formes géométriques choisies», explique Abderrahmane Janah, directeur du centre.

Le tapis Ouaouzguit, composé exclusivement de laine naturelle issue des moutons du mont Siroua, était autrefois un langage intime, symbole d’engagement et de créativité féminine.

Dans l’atelier de la coopérative Aguiness, Fatima Aït Boufker, présidente et artisane, perpétue l’héritage transmis par sa grand-mère: «Le tissage est une passion et un héritage familial. Nous avons grandi avec cela, c’était une source de revenu pour nos parents, et aujourd’hui pour nos enfants aussi. Le tapis Ouaouzguit est encore bien vivant.»

Avec l’aide des coopératives, ces femmes peuvent désormais accéder à un marché plus équitable, loin des contraintes du souk local: «Avant, on tissait chez nous puis on revendait à bas prix au marché. Maintenant, grâce aux coopératives, on peut vendre directement aux touristes à un prix juste», souligne Naima Akhraze, artisane passionnée.

Une teinture 100% naturelle

Le processus reste fidèle à la tradition: lavage à la main, filage au fuseau et teinture à base de plantes locales comme le henné, les pelures de grenade ou encore la Rubia tinctorum (garance des teinturiers). «Ces teintures naturelles sont saines, ne causent pas d’allergies et les couleurs ne dégorgent pas au lavage», assure Naima Akhraze.

Ce tapis, prisé aujourd’hui aux États-Unis, en Allemagne ou en France, devient un vecteur de rayonnement culturel: «La demande a beaucoup augmenté récemment, ce qui a permis une relance de la production et une meilleure promotion. Le tapis Ouaouzguit se vend désormais dans le monde entier», se réjouit le directeur du centre.

Le choix de l’agence de commencer son reportage à Taznakht n’est pas anodin. Il s’inscrit dans un effort plus large de promotion de la province de Ouarzazate, que l’Office national marocain du tourisme (ONMT) souhaite positionner comme destination d’immersion culturelle, à la croisée du désert et du patrimoine.

Outre Taznakht, le reportage met en lumière le ksar Aït Ben Haddou, classé à l’UNESCO, ainsi que l’oasis de Skoura, réputée pour son huile d’olive de qualité, récompensée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dès 1986. Les équipes ont également suivi des groupes de touristes, notamment chinois, dans ces lieux d’exception.

Une opportunité médiatique stratégique

Pour Imane Sabir, présidente du Conseil provincial du tourisme (CPT) de Ouarzazate, ce reportage est une aubaine: il s’agit d’une opportunité majeure pour mettre en avant les atouts de la région, la sécurité, la richesse patrimoniale, l’artisanat et une offre hôtelière en pleine rénovation. Elle souligne la nécessité d’améliorer la connectivité aérienne, condition sine qua non pour concrétiser les ambitions du plan «Rising Ouarzazate», porté par l’ONMT.

Entre savoir-faire séculaire et outils modernes de promotion, le tapis Ouaouzguit incarne la promesse d’un tourisme équitable et durable. Entièrement fabriqué à partir de laine naturelle issue des moutons du mont Siroua, chaque pièce demande plusieurs semaines de travail, selon sa taille et la complexité de ses motifs.

Aujourd’hui, grâce au centre de Taznakht, ce patrimoine vivant connaît un nouvel essor. Avec une capacité de production pouvant atteindre 300 tapis par mois, ces femmes perpétuent un artisanat précieux tout en participant activement à l’économie locale et à l’attractivité touristique de la région.

Par Camilia Serraj
Le 01/07/2025 à 14h26