Héritière d’un passé prestigieux, Grenade séduit chaque année un grand nombre de visiteurs marocains. Entre culture andalouse, expérience shopping et hospitalité à l’Espagnole, la ville s’impose comme une destination de choix. La semaine dernière, à Casablanca, un événement dédié à la promotion touristique de Grenade a mis en lumière ce lien fort, historique et affectif, qui unit la cité andalouse au Maroc.
Pour Francisco Rodríguez, directeur du Conseil départemental de Grenade, ce rapprochement s’inscrit dans une logique naturelle. «Nous partageons avec le Maroc une histoire, une mémoire, mais aussi un avenir», affirme-t-il, chaleureusement. Grenade ne veut plus seulement accueillir des touristes marocains, elle souhaite les honorer comme des invités privilégiés, les intégrer au cœur de son projet touristique. «Les Marocains sont déjà friands de cette destination, ils s’y rendent souvent et la connaissent bien, mais ils méritent d’être au cœur de notre stratégie», insiste Rodríguez, convaincu que cette synergie peut mener loin. «Nous voyons une véritable ressemblance entre nos régions, ce qui peut certainement encourager les Marocains à découvrir Grenade et les Espagnols à explorer le Royaume», déclare-t-il.
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«Lorsqu’on organise des événements de promotion touristique à Pékin, New York ou Buenos Aires, il nous faut parfois plus de dix heures pour y arriver. A contrario, une petite heure a suffi pour que l’on rejoigne le Maroc», entame-t-il. «C’est plus rapide que certains déplacements internes en Espagne», insiste-t-il, avant de conclure que «ce facteur de proximité est un avantage stratégique que nous devons exploiter».
Le président insiste cependant sur un point essentiel: la nécessité d’une meilleure connexion aérienne. «Nous avons besoin de soutien afin de faciliter la création d’une ligne aérienne directe entre Grenade et le Maroc», lance-t-il. «Actuellement, il faut souvent transiter par d’autres provinces, ce qui décourage certains voyageurs», ajoute-t-il. Selon lui, une liaison directe serait bénéfique aussi bien pour les touristes espagnols désireux de découvrir le Maroc, que pour les Marocains établis en Espagne ainsi que leurs familles.
Rodriguez a mis en avant les infrastructures touristiques de Grenade, avec ses hôtels de luxe, ses centres de congrès modernes et sa Sierra Nevada, célèbre station de ski. «Notre province répond à tous les goûts, elle séduit aussi bien les amoureux de nature que les passionnés d’histoire et de culture», affirme-t-il. Ces installations sont nécessaires pour attirer une clientèle diversifiée et renforcer l’attrait de Grenade en tant que destination touristique au même titre que la Costa del Sol, par exemple.
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Dans les allées lumineuses d’El Corte Inglés, le géant du commerce espagnol, le profil du touriste marocain est bien connu. «C’est un client fidèle, informé, qui connaît parfaitement nos promotions, la carte des 10%, le tax free de 15,7%, le plus élevé d’Europe...», détaille Gaël Vignon, responsable au sein de l’enseigne. Présente à travers 80 magasins en Espagne, dont deux à Grenade, la marque sait que l’été venu, les Marocains boostent les ventes dans les points névralgiques comme Marbella ou d’autres villes d’Andalousie. Attentifs aux tendances, ces visiteurs valorisent l’accès à une gamme complète allant de la mode à la parfumerie, en passant par la bijouterie, le sport ou les accessoires. Un potentiel touristique à entretenir et à développer, selon les professionnels du retail.
Mais Grenade ne se résume pas à ses vitrines. Elle est aussi une scène vivante, un lieu où l’art devient un langage universel. Le Festival international de musique et de danse de Grenade, plus ancien rendez-vous musical d’Espagne, qui célèbre cette année sa 74ème édition, incarne cette volonté de tisser des liens culturels entre l’Andalousie et le Maghreb. Grenade, c’est aussi l’Alhambra, le flamenco et une scène artistique foisonnante. Son directeur, Paolo Pinamonti, souhaite aujourd’hui tendre un pont culturel vers le Maroc. «Ces événements procurent à Grenade un rayonnement culturel international, auquel les Marocains pourraient être pleinement associés», affirme-t-il.
«Le festival se déroule dans les lieux emblématiques comme l’Alhambra. C’est un patrimoine extraordinaire, chargé d’histoire», raconte Paolo Pinamonti. Pour lui, le rapprochement avec le Maroc est une évidence. Pour 2025-2026, il prépare un projet ambitieux: reconstituer un concert historique de 1526, donné en l’honneur de Charles Quint, en réunissant musiciens marocains et espagnols. «Nous voudrions ériger des ponts culturels. La tradition musicale du Nord de l’Afrique et le flamenco ont beaucoup en commun», souligne-t-il.
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Et pour consolider ce lien, cela passe également par la gastronomie. Au Templo del Flamenco par exemple, toujours à Grenade, les responsables proposent sur la carte du restaurant un menu spécialement conçu pour ses touristes marocains: poulet et salades marocaines.
Côté hébergement, la ville ne manque pas d’arguments. Le groupe Barceló, implanté à Grenade avec quatre hôtels, du quatre étoiles Occidental au luxueux Royal Hideaway, entend dupliquer ce modèle au Maroc, et plus précisément à Casablanca. «Nous avons adopté le même schéma: un quatre étoiles, un cinq étoiles qui est le phare de l’hôtellerie de la ville, et un Royal en cours de rénovation», explique un cadre de la chaîne. Pour lui, les habitudes nationales pèsent aussi dans les choix des voyageurs. «Les Espagnols ont tendance à choisir les chaînes qu’ils connaissent. C’est un réflexe culturel. Je pense que si nous avions une grande chaîne marocaine, en tant que Marocain, je la choisirais instinctivement à l’étranger», confie-t-il. En attendant, les Marocains à Grenade ont déjà une enseigne qu’ils connaissent.
À travers cette opération de séduction tenue à Casablanca, Grenade affirme haut et fort sa volonté d’approfondir ses liens avec le Maroc. Non pas dans une logique commerciale stricte, mais dans une démarche humaine et culturelle. «Ce que nous proposons, ce n’est pas simplement une destination. C’est un lieu où les Marocains pourraient se sentir chez eux, où ils pourraient retrouver des parfums familiers», conclut Francisco Rodríguez.