La rentrée est de retour!

Soumaya Naâmane Guessous.

Soumaya Naâmane Guessous.

ChroniqueOui, mais pour rentrer, il faut être sorti!

Le 01/09/2023 à 11h01

L’année est looooongue quel que soit le bout par lequel on la compte: de janvier à décembre ou de septembre à août!

Au niveau individuel et familial, nous comptons de septembre à août. À partir du mois de mai, nous commençons à rêver de vacances.

Les célibataires doivent prendre leurs congés hors de juillet et août. Priorité aux mariés, dont les vacances sont conditionnées par celles des enfants. Injuste, disent les célibataires!

Les moins jeunes: «Je préfère prendre mes vacances hors de l’été. Les prix sont plus bas, les promotions plus intéressantes. C’est plus tranquille!»

Les plus jeunes refusent cette tranquillité: «Les célibataires doivent aller dans des lieux animés, où il y a des jeunes pour favoriser de belles rencontres. En dehors de l’été, on se retrouve avec des vieux!»

Les couples et leurs enfants sont ceux que l’on nomme juilletistes et aoûtiens.

Avant, la notion de vacances était totalement différente.

Le travail était beaucoup moins stressant. Les hommes travaillaient au rythme du lever et du coucher du soleil, prenaient tout le temps pour discuter autour de plateaux de thé. Les jours du souk hebdomadaire était l’occasion de se distraire avec les hommes de la famille et les voisins, en dégustant des grillades et des tajines accompagnés de thé parfumé.

Les citadines n’avaient pas de congés puisqu’elles étaient enfermées pour ne pas être vues par les hommes.

Les familles rurales se rendaient, en été, après les récoltes, dans les moussems (amoggar en amazigh), grands rassemblements annuels pour honorer un saint ou une sainte, pour resserrer les liens entre les tribus et se divertir après une année agricole.

De nombreuses familles citadines allaient séjourner chez les leurs au bled et profiter des moussems.

A ce jour, les familles qui habitent au bord de la mer ou dans des sites montagneux frais en été sont victimes de débarquement: parents, beaux-parents, oncles, tantes, cousins squattent chez eux quand les moyens ne permettent pas de payer les notes salées de l’hôtel.

Quelques citadins, nantis, partaient en nzaha dans des forêts, à la montagne, au bord des oueds, à la plage pour une ou plusieurs journées.

La notion de vacances liées au voyage est récente chez nous.

Le travail, les transports et la vie urbaine occupent la majorité du temps et deviennent stressant. Les couples se nucléarisent et le poids des responsabilités pour l’homme et pour la femme est intense. Les enfants deviennent une charge morale, physique et financière. Leur scolarité génère chez les parents de grandes tensions. En juin, parents et enfants sont épuisés et n’aspirent qu’à voyager, briser la routine, couper…

Les vacances tant attendues sont un soulagement pour les parents, mais également source de soucis: «Que faire?», et surtout, «Que faire de ses enfants?».

Aujourd’hui nous parlons de la rentrée. Mais toutes les familles n’ont pas eu le privilège de sortir pour pouvoir rentrer… Elles se délectent de la rentrée scolaire!

L’offre de loisirs est bien inférieure aux besoins d’une population à majorité très jeune qui a besoin de loisirs sains. Les quartiers ne sont pas équipés d’espace de loisirs au coût accessible. Les parents ne savent que faire de leurs enfants.

Ceux qui en ont les moyens voyagent ou louent des maisons de plage. Quand les enfants sont jeunes, les parents peuvent les occuper avec peu d’argent. Mais avec les adolescents, les vacances peuvent être stressantes pour les parents car il n’y a pas de choix pour les occuper. On les voit allongés, l’esprit, le regard et les doigts occupés par des smartphones qu’ils triturent à longueur de journée et surtout de nuit.

Qu’on ait des enfants scolarisés ou non, qu’on soit parti en vacances ou non, début septembre est vécu comme une rentrée, un retour à la normale.

Retour difficile quand les enfants sont scolarisés. Les parents peinent à financer les frais d’inscription, surtout dans le secteur privé.

L’école publique, défaillante, pousse les familles à se ruiner auprès des établissements privés, dont les coûts augmentent avec les différentes crises de ces dernières années. Certains établissements profitent de leur succès pour flamber leur prix.

Les fournitures scolaires deviennent multiples et coûteuses. Avant, l’élève avait deux ou trois livres qui passaient de génération à génération. Le niveau à la sortie des écoles et des lycées était satisfaisant.

Aujourd’hui l’école exige plusieurs livres et cahiers, l’ordinateur parfois, le smartphone pour que les professeurs communiquent avec les élèves… Et pourtant, on se lamente sur le niveau catastrophique des apprenants!

Cette année, 4,8 millions d’élèves vont recevoir du ministère de l’Education nationale cartables et kits scolaires. Un soulagement pour les familles.

Nous espérons beaucoup de la réforme de l’enseignement!

La rentrée c’est aussi pour les habitants des grandes villes, Casablanca à la tête, la fin de la paix et la reprise du calvaire avec l’anarchie dans la circulation et l’incivisme des conducteurs.

La rentrée est aussi le moment de prendre de nouvelles résolutions aux niveaux personnel, familial et professionnel, de trouver le moyen de mieux cultiver son bien-être et celui de son entourage.

Je vous souhaite une belle rentrée: une année sans épidémie, la fin de la guerre en Ukraine et ses conséquences économiques, la fin des coups d’Etat en Afrique, la sagesse pour les dirigeants algériens, une réforme du Code de la famille satisfaisante… et surtout un bel hiver.

Que Dieu soit clément avec nous et nous donne une pluviométrie ‘la quade an-nfa’ (selon les besoins). Amine!

Par Soumaya Naamane Guessous
Le 01/09/2023 à 11h01