Pour une Afrique prospère et pacifiée: le rôle clé de l’Intelligence artificielle

Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, à Rabat le 20 mars 2025. (Y.Mannan/Le360)

Le 20/03/2025 à 19h25

VidéoL’Intelligence artificielle (IA) reste «sous-exploitée en Afrique», alors qu’elle constitue «un levier indispensable pour le progrès économique et la consolidation de la paix», a souligné ce jeudi le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, dans une déclaration à la presse ce jeudi 20 mars à Rabat.

Nasser Bourita s’exprimait à l’issue d’une visioconférence africaine qu’il a présidée depuis Rabat, consacrée au thème «L’intelligence artificielle (IA) et son impact sur la paix, la sécurité et la gouvernance en Afrique». Cette rencontre ministérielle, organisée sous la présidence marocaine du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine pour le mois de mars 2025, marque une première: c’est la première fois que ce Conseil traite de l’IA en Afrique, à l’initiative du Maroc.

Selon un document officiel, cette réunion s’inscrit «dans le prolongement, au niveau africain, des efforts déployés par le Maroc à l’échelle internationale en faveur de l’utilisation rationnelle et responsable de l’IA au service de la paix, de la sécurité et du développement».

Dans une déclaration à la presse, Nasser Bourita a rappelé que cette réunion s’inscrit dans la vision du roi Mohammed VI, selon laquelle «l’Afrique doit être impliquée dans les questions mondiales actuelles (…) elle doit être un acteur». Le ministre des Affaires étrangères a insisté sur la nécessité pour le continent de ne pas rester en marge du débat: «L’Afrique ne doit pas être absente de cette discussion, non seulement à cause des défis posés par l’Intelligence artificielle, mais aussi pour exploiter toutes les opportunités et les avantages qu’elle offre. L’Afrique doit maîtriser ce phénomène et ne pas lui être soumise.»

Le ministre a également souligné que «la sécurité et la stabilité en Afrique sont confrontées à des défis classiques, tels que les conflits armés et les groupes séparatistes», tout en mettant en garde contre de nouveaux défis, notamment ceux liés à l’IA.

L’impact de l’IA sur la sécurité et l’économie en Afrique

Nasser Bourita a présenté plusieurs chiffres illustrant l’influence grandissante de l’IA dans le monde et ses répercussions sur l’Afrique:

«40% des groupes terroristes utilisent aujourd’hui l’intelligence artificielle dans leurs opérations».

«Plusieurs pays ont été affectés par des interférences via l’IA dans leurs processus électoraux ou débats nationaux».

«Le nombre de vidéos falsifiées a augmenté de 900% en cinq ans».

«Les informations erronées ont crû de plus de 300% au cours des trois dernières années».

Tous ces éléments démontrent, selon lui, que «l’intelligence artificielle a un impact considérable sur la sécurité et la stabilité en Afrique». Cependant, il a également mis en avant ses opportunités: «environ 10 à 20% de la production agricole pourrait être améliorée grâce à l’IA. L’Afrique, qui souffre de problèmes de sécurité alimentaire, ne peut pas se permettre de laisser passer cette opportunité ».

Il a également insisté sur le potentiel économique de l’IA: «Les investissements liés à l’intelligence artificielle sont estimés à des montants financiers considérables. L’Afrique ne doit pas non plus les laisser passer.»

Une stratégie africaine fondée sur quatre axes

Le ministre a détaillé la stratégie que l’Afrique doit adopter face à ces enjeux, en mettant l’accent sur quatre axes majeurs:

– La gouvernance mondiale de l’IA. L’Afrique ne doit pas être absente des discussions internationales sur la gouvernance de l’IA, contrairement à ce qui s’est produit dans d’autres domaines comme le commerce ou le droit international. Il a rappelé le rôle du Maroc au sein des Nations unies, notamment avec sa contribution à deux résolutions adoptées par l’Assemblée générale. Le Maroc, aux côtés des États-Unis, co-préside également le Groupe des Amis de l’Intelligence artificielle, qui réunit 71 pays. «Nous travaillons pour que la question de la gouvernance de l’intelligence artificielle soit inclusive et ne soit pas réservée à quelques pays seulement», a-t-il souligné.

– La formation. Le déficit en expertise est un défi majeur: «Aujourd’hui, seulement 1% des experts et ingénieurs en Intelligence artificielle sont en Afrique, et chaque année, environ 70.000 d’entre eux quittent le continent.»

– Les infrastructures numériques. L’Afrique accuse un retard considérable dans l’accès aux technologies numériques: «Alors que l’IA se développe rapidement, 60% de la population africaine n’a toujours pas accès à Internet. Il est essentiel que l’Afrique fasse un effort conséquent pour intégrer le monde numérique.» Par ailleurs, la production de données africaines reste très limitée: «L’Afrique ne représente que 3% des données mondiales, un grand retard à combler.»

– L’encadrement juridique. Il est crucial d’établir un cadre réglementaire continental: «Il est nécessaire de mettre en place des lois au niveau africain pour encadrer ces nouveaux domaines.»

En conclusion, Nasser Bourita a réaffirmé l’engagement du Maroc, qui «continue de travailler dans le cadre de la vision de Sa Majesté le roi Mohammed VI, en mettant l’accent sur le renforcement de la coopération africaine dans le domaine de l’intelligence artificielle».

Par Mohamed Chakir Alaoui et Yassine Mannan
Le 20/03/2025 à 19h25

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