Depuis le séisme ravageur qui a fait des milliers de victimes au Maroc le 8 septembre et de grands dégâts matériels, de très nombreux pays, parmi lesquels la France, ont proposé leur aide au Maroc.
Des «pays frères», que le Roi Mohammed VI n’a pas manqué de remercier à l’occasion d’une séance de travail qui s’est tenue à Rabat le 9 septembre. Jusqu’à présent, le Maroc a accepté l’aide de certains pays dont l’Espagne ou encore le Qatar, mais, à en croire certains médias français -qui font abstraction du fait que le Maroc n’ait pas encore répondu aux propositions de nombreux autres pays-, le silence observé par le Maroc quant à la proposition d’aide de la France serait pour le moins étrange, voire anormal.
Depuis deux jours, sur les plateaux de télévision, les critiques et les insinuations se multiplient quant à ce que certains journalistes vont jusqu’à qualifier de «refus du Maroc» d’une aide française. Invitée sur le plateau de la chaîne française d’information en continu BFM TV, Samira Sitaïl, ancienne directrice des rédactions de 2M, a effectué un recadrage qui tombe à point nommé.
«Aide française: le feu vert se fait attendre», titrait ainsi la séquence au cours de laquelle devait s’exprimer Samira Sitaïl et autant dire que celle-ci n’a pas mâché ses mots. «Il y a un vrai sujet en fait et je le sens sur ce plateau par rapport à tout ce qui vient d’être dit (…) C’est très grave de dire sur un plateau de télévision que le Maroc refuse l’aide d’un pays», a réagit d’emblée l’ancienne directrice des rédactions de 2M.
«Je considère que c’est un appel à la rébellion aux populations marocaines! On est en train de dire aux Marocains, on veut vous aider mais votre gouvernement ne nous laisse pas vous aider. Je considère ceci comme étant extrêmement grave et il va falloir le corriger», a recadré Samira Sitaïl avec fermeté.
«L’idée n’est pas de dire que le Maroc a refusé, l’idée est de souligner que les autorités marocaines, contrairement à d’autres pays comme l’Espagne, n’ont pas encore répondu aux propositions françaises», a tenté de justifier de son côté le journaliste Benjamin Duhamel. Ce à quoi Samira Sitaïl a fait remarquer qu’«au moment où nous parlons, avec nos brigades cynophiles, sur le territoire marocain, il y a en effet l’Espagne avec 57 sapeurs-pompiers, il y a les Britanniques (…) qui ont commencé à opérer en fin d’après-midi, il y a les Qataris et les Émiratis. Et à ma connaissance, personne, ni les États-Unis, ni l’Inde, ni la Russie, ni tous les alliés amis (…) qui ont proposé leur aide dans ce genre de situation, ne se sont formalisés de ce que le Maroc dise: “écoutez, ça va prendre un moment, toute cette histoire”».
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À l’interrogation qui sonne comme une accusation sur la raison pour laquelle le Maroc ne répondrait pas sur le champ à l’aide de la France, Samira Sitail répond: «Non, ce ne sont pas les faits, cela ne reflète pas les faits», rappelant que le Souverain marocain a remercié tous les pays qui ont proposé leur aide. Enfin, si ce qui est reproché au Maroc réside dans sa façon de communiquer, Samira Sitaïl a ironisé sur le fait que «chacun s’exprime de la manière dont il veut. Il y a ceux qui gèrent leur pays à travers twitter et il y a ceux qui le gèrent de manière différente».
«On voit donc ça à travers nos lunettes de pays occidentaux? Ce n’est pas la même manière de communiquer?», s’est offusqué le journaliste de BFM TV suite à cette remarque de la journaliste marocaine. «Non, ce serait trop caricatural de le résumer de cette manière», a-t-elle répondu, préférant se concentrer sur un sujet autrement plus grave, à savoir la politisation du séisme au Maroc par certains médias français.
Et pour cause, Samira Sitaïl a dénoncé à juste titre le traitement médiatique politique qu’ont réservé des plateaux de chaînes d’informations en continu, alors même que le sujet principal était le séisme qui frappait le Maroc. «On évoque la question algérienne, on évoque la question du Sahara marocain qui est une affaire de justice éminemment stratégique et géopolitique pour le Maroc. On évoque l’immigration, des questions liées à la sécurité de la France, notamment l’espionnage du téléphone portable du président de la République… Toutes ces questions nous éloignent du fond de la question» a-t-elle rappelé, qualifiant ces sujets de «questions lancinantes qui reviennent sur ces plateaux en continu depuis 48 heures».
Mais ces questions politiques hors-sujet ne sauraient altérer «la souveraineté d’un État», car, rappelle Samira Sitaïl, «la France ne répond à la demande du Maroc que si le Maroc exprime une demande. Le Maroc l’a-t-il fait? Le Maroc a remercié tous ceux qui se sont proposés en disant: “Attendez, ce sont des milliards de dollars qu’il va falloir sortir, il y a un coût social, éducationnel, patrimonial absolument extraordinaire. Il va falloir à un moment donné que chacun de nos partenaires, de nos alliés, se départissent d’une posture politique pour véritablement, et d’une manière sincère, venir aider comme le font les ONG aujourd’hui, sans que personne n’y voit quoique ce soit à redire», a-t-elle précisé.
Quant aux allégations selon lesquelles les Français ne seraient pas les bienvenus, la journaliste conclut en rappelant que «les Français sont les bienvenus, nous avons des relations extrêmement profondes avec la France».