Dans un contexte de forte inflation, la Bourse de Casablanca a terminé l’année 2022 dans le rouge. Le Masi, principal indice de la place, a chuté (-19,75%). La capitalisation boursière s’est chiffrée quant à elle à 561,103 milliards de dirhams, soit une perte de 129,613 milliards de dirhams par rapport à 2021.
Contacté par Le360, Farid Mezouar, directeur de FL Markets et spécialiste du marché boursier, explique que cette contre-performance de la place casablancaise en 2022 relève principalement d’un sentiment de méfiance des investisseurs qui ont été influencés par l’actualité boursière internationale, malgré la hausse des revenus des sociétés cotées (+14% à fin septembre) et de leurs bénéfices (+15,8% à fin juin 2022).
Lire aussi : En un an, la capitalisation de la Bourse de Casablanca a perdu 129 milliards de dirhams
Si les investisseurs ont été sceptiques, c’est que les principales banques centrales au niveau international, y compris Bank Al Maghrib, ont décidé de resserrer leur politique monétaire pour contrer l’inflation.
«Les investisseurs qui ont été influencés par l’actualité boursière internationale avec -22,4% pour le MSCI Emerging (indice mesurant la performance des marchés boursiers de pays à économie émergente, Ndlr) ont aussi réagi à la hausse de 100 points du taux de Bank Al Maghrib, craignant un freinage de l’économie en 2023», souligne Farid Mezouar.
Selon cet expert du marché boursier, l’alourdissement de l’imposition des banques et des grandes sociétés a aussi contribué à miner le moral des investisseurs. Déclinée dans la Loi de finances 2023, la révision des taux de l’impôt sur les sociétés (IS) prévoit d'ici quatre ans un taux de 40% pour les établissements de crédit et organismes assimilés, Bank Al-Maghrib, la Caisse de dépôt et de gestion, et les entreprises d'assurances et de réassurance.
Le taux de l’IS devrait également atteindre 35% pour les sociétés ayant un bénéfice net égal ou supérieur à 100 millions de dirhams, à l'exception des sociétés de services ayant acquis le statut CFC ou bénéficiant du régime spécifié et des entreprises exerçant dans les zones d'accélération industrielle.
Pourquoi les Bourses de Tunis et d’Egypte résistent-elles au contexte international? A l’international, l'indice Stoxx Europe 600, qui représente 600 des principales capitalisations boursières européennes, a reculé de plus de 12% en 2022, le CAC 40 a quant à lui baissé de 9,50%. Aux Etats-Unis, l'indice Nasdaq, où se concentrent les populaires valeurs technologiques, a dégringolé en 2022 de presque 35% et l'indice élargi S&P 500, le plus représentatif du marché américain, a lui chuté de 20%.
Lire aussi : Liaison des Bourses africaines: le projet d’interconnexion AELP officiellement lancé à Abidjan
A l’image des Bourses européennes et américaines, en Asie, la Bourse de Tokyo a perdu plus de 9% en 2022, sa pire année depuis 2018, tout comme les Bourses de Shanghai (-15,13%) et Shenzhen (-21,63%).
Pourtant, contrairement à la tendance baissière générale, certaines Bourses ont réussi à sortir la tête de l’eau et à se démarquer, à l’image de la Bourse de Tunis qui a terminé l’année avec un rendement annuel de 15,10% et la Bourse d’Egypte qui a enregistré une performance de 22% en 2022.
Selon Farid Mezouar, la Bourse égyptienne a «bénéficié de la dépréciation de la monnaie locale de près de 36% par rapport au dollar, ce qui a encouragé le retour des investisseurs étrangers, notamment en provenance du Golfe».
Il explique également cette performance par le retour de la croissance en Egypte (+ 4,5%) au cours de l’exercice fiscal 2022 et la réaction positive des investisseurs à l’intérêt affiché par les autorités égyptiennes envers le marché boursier, notamment avec des promesses de cotation de groupes publics.
Pour la Bourse de Tunis, le directeur de FL Markets explique que le marché boursier est de taille plus petite, avec une dimension domestique plus marquée, ce qui lui a permis de bénéficier en 2022 d’un faible P/E (ratio cours/bénéfice) et de perspectives de cotation de nouvelles sociétés.
Quel avenir pour la place casablancaise? Interrogé sur les perspectives de la Bourse de Casablanca dans ce contexte international, Farid Mezouar se veut plutôt optimiste et table sur une année positive pour le marché boursier marocain.
Lire aussi : Financement: la Bourse de Casablanca lance une offensive sur les PME
«Au niveau théorique, 2023 devrait être profitable pour les marchés car en dehors d’un nouveau Black Swan, toutes les mauvaises nouvelles sont connues. Ainsi, les investisseurs devraient progressivement s’imprégner des bonnes nouvelles», explique-t-il.
Les résultats annuels des entreprises, positifs pour la majorité des sociétés côtées, en plus des projections de retour de croissance pour l’économie marocaine cette année, devraient également stimuler les cours à la Bourse de Casablanca, selon Farid Mezouar.
«Au Maroc, les résultats annuels de 2022 [qui seront] communiqués en mars 2023 devraient stimuler les cours car les investisseurs ont semblé ignorer la hausse de leurs revenus et de leurs bénéfices semestriels. Par ailleurs, les prévisions de BAM font ressortir une croissance prévisionnelle de 3% en 2023 contre 1,1% en 2022», précise-t-il.