Autoroute électrique sud-centre: les dessous du deal entre l’ONEE et le consortium Taqa-Nareva-FM6I

On en sait un peu plus sur le schéma retenu pour la réalisation du mégaprojet d’autoroute électrique haute tension entre Dakhla et Casablanca. Confié au consortium Taqa-Narvea-FM6I, ce projet de 3 milliards de dollars va permettre de doubler la capacité de transit du réseau électrique reliant les parcs solaires et éoliens dans le Sahara marocain aux principaux bassins de consommation dans le centre du pays.

Le 21/05/2025 à 08h33

Le projet de liaison électrique en courant continu haute tension (HVDC) de 1.400 kilomètres reliant le centre et le sud du Maroc franchit une nouvelle étape. Il sera réalisé en mode PPP (partenariat public privé), encadré par un protocole d’accord signé entre le gouvernement, l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) et un consortium composé de l’Émirati Taqa Morocco, du Marocain Nareva et du Fonds Mohammed VI pour l’investissement (FM6I). Un accord de développement spécifique sera ensuite signé entre l’ONEE et le consortium.

Le schéma retenu confie au trio Taqa-Nareva-FM6I la mission de financement et de suivi de la réalisation du projet, tandis que l’ONEE assurera l’exploitation de la future ligne en sa qualité d’opérateur du réseau électrique national, explique une source proche du dossier.

Le financement de ce projet de 3 milliards de dollars se fera en mode «project finance», un montage combinant fonds propres et emprunts. Le remboursement des prêts se fera uniquement à travers les flux de trésorerie (cash-flow) provenant de l’ONEE. Ce dernier paiera des redevances qui vont permettre aux développeurs de rembourser à la fois le prêt et le capital investi.

Par ailleurs, à travers des contrats PPA (Power purchase agreement), l’ONEE s’engage à acheter l’énergie issue des capacités additionnelles éoliennes de 1.200 mégawatts (MW) qui seront développées par le consortium Taqa-Nareva-FM6I, ajoute la même source. Ce projet fait partie intégrante du big deal conclu entre l’ONEE et le consortium maroco-émirati. L’électricité verte provenant de ces nouveaux gisements éoliens de 1.200 MW devra ensuite transiter par la nouvelle ligne HVDC pour intégrer le réseau national.

Rappelons que l’ONEE avait initialement retenu deux schémas pour la réalisation de ce projet. Un schéma EPC (Engineering, Procurement, and Construction) relatif à la construction de l’infrastructure, couplé à un mode BOOT (Built Own Operate Transfer) incluant le développement et le financement. Le 15 novembre 2024, cinq opérateurs internationaux ont été shortlistés pour construire la ligne (schéma EPC) suite à un appel à manifestation d’intérêt (AMI). La liste comprend GE Vernova (États-Unis), Siemens Energy (Allemagne), Power China SEPCO1 (Chine), TBEA (Chine) et Larsen & Tourbo (Inde).

Puis, le 2 avril dernier, après plusieurs reports, l’ONEE a décidé d’abandonner le schéma BOOT (financement), annonçant la clôture de l’AMI. L’Office dirigé par Tarik Hammane a voulu concentrer son attention sur les constructeurs déjà désignés dans le cadre de la composante EPC: «Le résultat positif de l’évaluation des candidatures des constructeurs EPC a permis notamment de confirmer l’intérêt des principaux constructeurs pour la réalisation du projet et d’établir un état des lieux précis du marché», avait souligné l’ONEE dans un communiqué.

L’accord conclu cette semaine avec le consortium développeur Taqa-Nareva-FM6I vient donc clore ce long processus de sélection. En toute vraisemblance, le constructeur sera choisi parmi les 5 opérateurs shortlistés dans le schéma EPC de l’AMI.

D’une capacité de 3.000 MW, la nouvelle ligne électrique va permettre d’accroître et d’accélérer le développement de capacités renouvelables dans les provinces du sud en rapprochant les parcs solaires et surtout éoliens éparpillés dans le Sahara marocain des bassins de consommation dans le centre du pays.

À ce jour, la région du sud est connectée au réseau électrique national via une ligne de transmission de 400 kilovolts (KV) qui achemine actuellement environ 1.500 MW. Celle-ci assure déjà l’évacuation de l’énergie produite par les parcs éoliens de Tarfaya (300 MW), Boujdour (400 MW), Foum El Oued (50,6 MW), Aftissat (400 MW), Akhfennir (200 MW) ainsi que les parcs solaires de Boujdour (20 MW) et de Laâyoune (85 MW). Cette ligne est aujourd’hui saturée, d’où le lancement d’un projet d’extension, à l’initiative de l’ONEE, actuellement en cours de réalisation. La nouvelle extension va permettre d’injecter une capacité supplémentaire dans le réseau national et ce, en attendant la mise en service de la future autoroute électrique HVDC, prévue avant 2030.

Par Wadie El Mouden
Le 21/05/2025 à 08h33