Quand les poules auront des dents!

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ChroniqueEntre nous, il vaut mieux laisser de côté ces théories de remplacement.

Le 16/04/2022 à 11h35

Comme vous avez dû le constater, les élections françaises sont très suivies au Maroc. On les surveille comme du lait sur le feu. C’est une habitude, un réflexe de toujours.

Les Marocains connaissent les candidats à l’Elysée et savent très précisément ce que chacun représente. Ils connaissent même des pans entiers de leur vie privée. Mais ils ne connaissent pas forcément le nom du Premier ministre espagnol ou anglais!

Il y a la France pour mille raisons, et certainement les Etats-Unis pour mille (et une) raisons. Et c’est tout!

Tous les autres viennent après, y compris l’Algérie dont la seule question qui nous intéresse reste: sera-t-il (le prochain président) moins anti-marocain que les autres?

Je vous laisse analyser les raisons de cet étrange état de fait qui n’est pas nouveau, et qui n’est pas près de s’estomper. Il est si bien ancré dans notre réalité que l’on est tentés de l’expliquer, pour résumer, par cette formule creuse: «C’est la nature qui veut ça».

Bien sûr qu’il y a un peu plus que la nature pour analyser et comprendre. Il y a l’histoire. Il y a les intérêts économiques, la proximité culturelle, les diasporas, etc.

Ceux qui demandent le remplacement de la langue française par l’anglaise, ou même l’espagnole, doivent réfléchir à ces questions. On ne remplace pas une langue comme ça, en un claquement de doigts. Une langue, ça a des racines et des prolongements. C’est toute une histoire.

Qu’on le veuille ou non, la langue a «épousé» il y a longtemps le parler marocain pour nous donner la langue que l’on parle aujourd’hui: ce «3aranssia » (mélange arabo-français) que l’on appelle darija, la seule langue que tous les Marocains parlent et comprennent.

Ces «épousailles» entre langues ont fait que la langue française «à la marocaine» n’est pas ou n’est plus une langue étrangère. Passé un certain temps, une langue s’incruste dans la société et les mentalités, dans les codes administratifs et culturels.

Une langue n’est pas une dent que l’on va remplacer le jour où on a mal. Autrement dit, on ne remplace pas une langue à cause d’une vexation ou d’une crispation politique. Remplacer une langue, c’est la révolution: il faut tout casser et repartir de zéro ou presque. Mustapha Kamel l’a fait en Turquie, mais il n’avait pas trop le choix parce qu’il devait inventer un nouveau pays à partir des cendres de l’ancien empire ottoman…

Entre nous, il vaut mieux laisser de côté ces théories de remplacement. La darija ne remplacera jamais l’arabe. Et l’anglais ou l’espagnol ne sont pas près de remplacer le français. Ou alors quand les poules auront des dents!

Par Karim Boukhari
Le 16/04/2022 à 11h35

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Bonjour Monsieur Karim Boukhari. Parlons peu, mais parlons bien. Si le Maroc veut être en phase avec le monde moderne, le monde technologique, le monde scientifique et le monde économique, ses cadres sont obligés de maîtriser l'anglais, sinon on se condamne à jouer en amateur et encore. Darija, amazighe, l'arabe et le français sont des langues enracinées au Maroc, chacune dans son domaine. Il n'y a rien à remplacer, il y a à rajouter et nous ne serons ni les seuls, ni les premiers. Pour ce qui est de Mustafa Kemal Atatürk, il n'a remplacé aucune langue, il a tout simplement remplacé l'alphabet arabe par l'alphabet latin pour occidentaliser la langue turque. Cordialement.

Pour finir avec la langue française ,il faut fermer toutes les écoles publiques qui sont les créations du protectorat français au maroc,dénaturer les diplômés marocains formés dans le pays du colonisateur,blâmer ceux qui ont pris la relève après le départ des administratifs fr,sans oublier de fermer les hôpitaux ,détruire les routes ,les bâtiments construits par le colonisateur,tout simplement pour être démocratique et patriote à la manière du parti de l'istiqlal interdire aux très riches marocains d'aller en france passer des jours dans les hôtels de luxe avec les devises envoyés par les MRE, quant à moi,je m'incline devant mes anciens enseignants français du collège jusqu'à l'université qui m'ont formé pour servir mon pays en tant qu'enseignant au supérieur !

« On ne remplace pas une langue comme ça, en un claquement de doigts. » Exact ! même si elle est une langue seconde et n’est pas la langue maternelle. L’exemple formel s’illustre dans la célèbre interview de Klaus Altmann - connue sous Klaus Barbie - en 1972 en Bolivie. Le journaliste français Ladislas Hoyos lui pose soudainement la question fatale en français : « N’êtes-vous jamais allé à Lyon ? » Et le tortionnaire de Jean Moulin lui répond en allemand qu’il n’est jamais allé à Lyon. Il a parfaitement compris la question formulée dans une langue qu’il prétendait ne pas connaitre !

Je ne pense pas que ce soit si complexe que ça de remplacer le français par une autre langue. D'autres pays l'ont fait sans grandes difficultés. L'exemple le plus frappant c'est celui du Rwanda. Après le génocide et que le pays s'est senti (où plutôt à été) trahi pas la France ils ont décidé de basculer dans le camp des anglo-saxons, et il l'ont fait. une décennie après la France et la francophonie essayent de se rattraper mais je pense qu'il est trop tard. Au Maroc l'anglais est en train de monter en puissance. Pour vous dire plus de 50% des annonces d'emploi exige un niveau élevé d'anglais pour tous les recrutements de cadres et cadres intermédiaires. On parle d'anglais courant pas le basic. Le comble c'est que parfois des sociétés du CAC40 l'exige aussi. C'est l'effet de la mondialisat

Brilliant dear Karim !

On défend la langue de Moliere par qui on gagne notre pain 🍞, et nos prix du Goncourt entre autres, on défend le français, Moliere et sa langue, qui nous a submergé d'éloges et d'enveloppes pleines de générosité et de mots gentils qui nous encouragent d'avoir peur de perdre tous les avantages d'être francophone

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