Le gouvernement a adopté récemment un décret-loi complétant la loi portant Code du médicament et de la pharmacie, texte qui a pour objectif de lutter contre la promotion et la vente illégales de médicaments sur Internet et dans des points de vente autres que les pharmacies. Ce phénomène sévit depuis des années dans le secteur, et n’en finit pas de s’amplifier, bien qu’il soit difficile d’en circonscrire l’étendue exacte.
«Comme il s’agit de réseaux parallèles éparpillés, informels et totalement opaques, nous ne disposons d’aucun chiffre estimatif. Cependant, nous avons la conviction que le phénomène prend de l’ampleur jour après jour», affirme Mohamed Lahbabi, président de la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc (CSPM), dans une déclaration pour Le360.
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Pour étayer son propos, notre interlocuteur évoque la prolifération, sur les réseaux et médias sociaux, des annonces proposant à la vente des produits pharmaceutiques de contrebande. Et cela «concerne tous les types de médicaments, allant du paracétamol aux stimulants sexuels, en passant par les corticoïdes et même des médicaments détournés de leur utilisation pour des fins illégales, notamment pour l’avortement», relève-t-il.
Outre les médicaments, la liste comprend également des compléments alimentaires, des dispositifs médicaux et autres produits de santé dont l’enregistrement est nécessaire auprès de l’Agence nationale du médicament avant leur mise en vente. Or, «la majorité, si ce n’est l’intégralité des produits pharmaceutiques en vente sur les réseaux sociaux, ne l’est pas, et une bonne partie n’a aucune traçabilité», déplore-t-il.
Une coordination accrue entre les autorités et les professionnels
Afin d’endiguer le phénomène, les pharmaciens ont frappé à toutes les portes, notamment celle du ministère public, dont la présidence a réagi en adressant aux procureurs généraux du Roi dans les différents tribunaux du pays une correspondance les appelant à lutter contre cette pratique.
Dans ce sens, le procureur du Roi près la Cour de cassation a exhorté la Police judiciaire à coordonner avec l’Agence nationale du médicament (anciennement la Direction des médicaments et de la pharmacie) et les services régionaux du ministère de la Santé pour repérer les points de vente et de distribution illégaux de médicaments.
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Le président de la CSPM propose d’aller plus loin, d’abord avec la mise en place d’un portail national dédié au signalement de toute page ou publicité proposant ce type de produits et, ensuite, avec la création de commissions ou brigades mixtes pour constater les fraudes et les sanctionner.
Mohamed Lahbabi plaide ainsi pour «une coordination étroite entre les autorités en charge de la lutte contre la cybercriminalité et les spécialistes, notamment les inspecteurs du ministère de la Santé». Car si les brigades de lutte contre la cybercriminalité sont performantes et dotées de compétences pointues, ses éléments restent étrangers au domaine médical et pharmaceutique. Il leur est par conséquent difficile de différencier les produits en vente libre de ceux nécessitant des autorisations ou des certificats spécifiques pour leur mise sur le marché et leur vente au grand public via un quelconque circuit.