L’eurodéputée française d’origine syrienne qui a fait de la libération des peuples opprimés son credo et de l’Algérie son héros refait à nouveau parler d’elle au Maroc. Non pas qu’on veuille absolument en parler, bien au contraire, mais parce que l’élue de la France insoumise s’est cette fois-ci arrogée le droit de parler au nom du peuple marocain.
Le 12 avril, Rima Hassan a fait très fort en partageant le post d’un pseudo compte d’information en ligne résolument anti-marocain et étrangement pro-algérienn, lequel décrétait: «Israël envoie des officiers de Tsahal au Maroc dans le cadre des exercices militaires de l’African Lion sous le commandement américain. Malgré le génocide sur Gaza, le Maroc continue sa coopération y compris militaire avec Israël». En repostant cette publication, Rima Hassan l’a accompagnée de sa propre analyse de la chose, affirmant avec une certitude arrogante: «Le peuple marocain ne veut pas de la normalisation avec Israël.» Et pour prouver ses dires, celle-ci a partagé une vidéo publiée par un média marocain illustrant la manifestation pour Gaza organisée à Rabat le week end dernier.
«De quoi je me mêle?» C’est en substance ce qui lui a été rétorqué sur les réseaux sociaux par une partie de ce «peuple marocain» au nom duquel elle parle afin de lui rappeler quelques essentiels qu’elle fait mine d’oublier. À savoir tout d’abord qu’au Maroc, si ces manifestations pro-Gaza sont autorisées, contrairement à l’Algérie qu’elle ne cesse d’ériger en exemple, elles le sont tout autant que le droit à soutenir les accords entre Israël et le Maroc et à l’exprimer. Comme dans toute société démocratique, au Maroc, on est en droit d’observer des opinions différentes et d’en débattre.
On peut, au Maroc comme sous d’autres cieux, «stand for Gaza» et contre Israël, s’offusquer de l’horreur de cette guerre qui a fait des victimes des deux côtés sans vouloir rentrer dans un décompte macabre, être du côté des palestiniens sans être pro-Hamas, défendre une solution à deux États et militer activement pour la paix par les canaux diplomatiques, chose que faisait déjà le Maroc alors que Rima Hassan n’était pas encore née et n’était même pas encore à l’état de projet. Si Rima Hassan connaissait si bien ce peuple au nom duquel elle parle, elle saurait que la question palestinienne n’a jamais fait l’unanimité au Maroc. Elle saurait aussi que cette manifestation organisée à Rabat où des slogans ont été scandés contre André Azoulay, conseiller du Roi, sont une ligne rouge pour beaucoup d’entre nous. Parce qu’au Maroc, contrairement à la Mecque des révolutionnaires dont elle se revendique être la fille spirituelle, il n’est pas tolérable de verser dans cette confusion sournoise entre antisionisme et antisémitisme. Notre histoire est là pour nous rappeler qui nous sommes, jusqu’au dossier de candidature du Maroc pour l’inscription du caftan, son art et son savoir-faire au patrimoine immatériel de l’UNESCO qui rappelle à tous les origines amazighes, arabes et juives de nos traditions ancestrales.
Si Rima Hassan connaissait aussi bien le «peuple marocain», elle saurait que les sujets qui touchent pour la peine tous les Marocains et qui mettent tout le monde d’accord ne sont pas ceux pour lesquels ils manifestent, sans quoi on serait dans la rue tous les dimanches pour protester contre le scandale d’État de la filière des viandes rouges et l’augmentation injustifiée des prix des hydrocarbures.
En mettant tous les Marocains dans le même sac, celui du «peuple marocain», Rima Hassan fait montre d’une ignorance totale dont la bêtise interroge sur les responsabilités du poste qu’elle occupe au Parlement européen, et d’un dédain inacceptable en nous ôtant jusqu’au droit de penser différemment. Dans son jargon révolutionnaire inspiré de celui de la junte militaire voisine dont elle s’est faite l’ambassadrice, Rima Hassan oppose sciemment «le peuple» au pouvoir, lequel serait sourd et insensible à la voix des Marocains. Un post qui fait écho à celui du 24 septembre 2024, dans lequel elle lançait: «On se demande ce qu’attend le Roi du Maroc pour rompre ses relations avec Israël». C’est pourtant ici, au Maroc, ce pays dont elle conteste l’intégrité territoriale en soutenant les milices armées du Polisario à l’origine d’attaques terroristes sur notre sol, que Rima Hassan est venue se «ressourcer» dans l’arrière-pays au début de l’année.
Que cherche Rima Hassan si ce n’est à semer la discorde au sein de la société marocaine en soufflant sur les braises des souffrances palestiniennes – auxquelles personne n’est insensible – pour mieux faire croire à un fossé entre pouvoir et peuple. Pourquoi Rima Hassan ne met-elle pas ses fantasmes de Hirak au service du «peuple algérien»? Pourquoi ne met-elle pas son militantisme à géométrie variable au service des 250 détenus d’opinion emprisonnés en Algérie? Pourquoi ne s’offusque-t-elle pas de l’absence de manifestations pro-Gaza en Algérie? On pourrait continuer longtemps à rallonger la longue liste des incohérences qui caractérisent Rima Hassan dont le double discours devient de plus en plus gênant à entendre.
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