Le temps est à l’action en Arabie saoudite, dont le prince héritier et homme fort, Mohammed ben Salmane, multiplie les initiatives préparatoires au prochain sommet de la Ligue arabe, prévu le 19 mai prochain dans la capitale Riyad. Et le moins à dire, c’est que du temps à perdre, «MBS» n’en dispose pas. C’est la raison pour laquelle son pays a organisé, ce 14 avril, une réunion de la plus haute importance, censée baliser le terrain au retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe, après 12 ans de suspension.
Y étaient conviés les six pays formant le Conseil de coopération du Golfe (CCG), en plus de l’Égypte, de la Jordanie et de l’Irak. Mais pas l’Algérie, qui assure pourtant la présidence de la Ligue arabe jusqu’au passage de témoin à l’Arabie saoudite, et qui avait milité pour que cette même réintégration de la Syrie soit à l’ordre du jour de «son» sommet. En vain, naturellement. Une double gifle dont certains titres en Algérie, notamment le site TSA (Tout sur l’Algérie), se sont fait l’écho, trahissant bien mal l’humiliation et la grande frustration ressenties par le palais de la Mouradia et au sein de la junte face à une telle expression de mépris et de non-considération. «L’Algérie ne comprend pas la posture saoudienne», s’indigne ainsi TSA, citant «des sources» et pointant du doigt «les petites manœuvres du royaume» (saoudien sur ce coup) qui, «sans doute obnubilé par les relatifs succès diplomatiques dans la région avec le rétablissement des relations diplomatiques avec l’Iran, a entrepris seul des contacts avec de nombreux pays et veut accélérer la réintégration de la Syrie au sein de l’organisation panarabe». Entendez sans même que la présidence en exercice ne soit tenue au courant.
TSA tente certes de se consoler en évoquant le «succès» imaginaire du sommet d’Alger et le rôle fantasmé de l’Algérie au niveau régional et au sein de la Ligue arabe, mais le commentaire trahit plus une réaction d’orgueil qu’une argumentation logique. «En se comportant ainsi, l’Arabie saoudite montre une nouvelle fois qu’elle est gênée par le nouveau rôle de la diplomatie algérienne», lit-on. On n’en saura rien, ni sur les nouvelles marques de cette force algérienne retrouvée ni sur la nature de la gêne que peut éprouver la plus grande puissance arabe qu’est l’Arabie saoudite, au demeurant un des plus riches pays du monde.
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On retiendra que Riyad n’a (toujours) pas jugé utile de discuter du prochain Sommet arabe avec Alger, qui en assure la présidence. Pire, Tebboune n’était même pas informé de la tenue du prochain sommet de la Ligue le mois prochain à Riyad. Une semaine avant que l’annonce ne soit rendue publique par le secrétariat de la Ligue arabe, Tebboune, visiblement hors-sol, fanfaronnait dans une interview avec une journaliste algérienne à Al Jazeera sur le succès extraordinaire du sommet d’Alger et les futures actions à mener.
Il convient de souligner que la présidence algérienne de la Ligue arabe s’est lamentablement limitée à l’organisation du sommet des 1er et 2 novembre dernier et à abriter une réunion préparatoire de deux jours. Personne n’en a plus entendu parler après. Ce n’est évidemment pas ce qu’il convient d’appeler un «mandat». Si cette présidence a duré quatre mois, son action n’a pas tenu plus de quatre jours. Une première dans les annales de la Ligue arabe et sans conteste le mandat le plus court de toute l’histoire de l’instance panarabe.
Qu’est donc devenue la présidence du siècle, annoncée tambour battant par le régime algérien et saupoudrée de superlatifs par le président Abdelmadjid Tebboune? Depuis novembre dernier, très peu de choses se sont produites, pour ne pas dire rien du tout. «Courte aura été la durée et vide aura été le contenu», commentait une source bien informée pour Le360.
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Côté «réalisations», c’est à peine si Abdelmadjid Tebboune a réussi à réunir les factions palestiniennes rivales. De là à amorcer une solution au conflit avec Israël… La Syrie, qu’Alger voulait remettre en orbite dans la galaxie arabe, n’a pas pris part au sommet. Et si l’émir du Qatar, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et le leader palestinien Mahmoud Abbas ont fait le déplacement, tous les autres chefs d’État arabes ont zappé l’événement, dont justement le très influent MBS.
Désarçonné par l’annonce de l’organisation du Sommet de la Ligue arabe en mai en Arabie saoudite, le régime algérien a essayé, au début, de mettre du baume sur la gifle. Il a distribué à sa meute médiatique des éléments de langage, en vue de transformer une débâcle en chimérique percée. Le sommet de Riyad s’inscrirait ainsi dans la lignée de celui d’Alger. La junte cite comme preuve le retour de la Syrie dans la Ligue arabe, un sujet qu’elle a ardemment défendu. Il convient de rappeler que l’Arabie saoudite et les Émirats ont toujours fait partie du bloc qui a plaidé pour le retour de la Syrie. Le bloc le plus hostile à la Syrie est incarné par le Qatar. Quant au Maroc, il ne s’oppose pas à ce que la Syrie regagne son siège à la Ligue arabe.
La réunion qui se déroule ce vendredi à Djeddah, non seulement en l’absence du pays qui préside la Ligue arabe, mais aussi sans même que ce dernier en soit informé, constitue un affront trop manifeste pour que le régime d’Alger persiste dans ses efforts pour cacher une humiliation. Pourtant, ce régime devrait savoir que ce n’est pas parce que le duo Tebboune-Chengriha répète à longueur de journée que l’Algérie est une puissance régionale et «une force de frappe» que les autres pays finiront pas s’en persuader. La réalité n’est pas une affaire de slogan. Et le prochain sommet de la Ligue arabe est un miroir cruel du poids régional du régime d’Alger.