Les confessions de Moulay Ismaïl Alaoui. Ep1: «J’ai rencontré Hassan II en 1948 chez mes grands-parents»

Les confession de Moulay Ismaïl Alaoui, ancien ministre et ex-Secrétaire général du Parti du progrès et de socialisme.

Le 24/03/2023 à 21h00

VidéoMoulay Ismaïl Alaoui est l’un des témoins privilégiés de l’histoire contemporaine du Maroc. Ancien secrétaire général du PPS et ex-ministre au sein du gouvernement Youssoufi, il a accepté de partager avec nous quelques souvenirs de son long cheminement politique. Dans ce 1er épisode, il nous raconte comment, dès 1944, sa conscience politique a commencé à se forger.

Nous sommes en janvier 1944. En réponse à la présentation du Manifeste de l’Indépendance (11 janvier de la même année) signé par des dizaines de nationalistes, l’armée française mène une répression aveugle des manifestations qui ont eu lieu dans plusieurs villes. Salé, ville de militants notables et érudits, a eu son lot de morts, par dizaines.

«L’armée française, sans demander l’autorisation, a investi plusieurs maisons, dont la nôtre. Ses soldats montaient sur les toits pour surveiller la rue. Ils ne connaissaient rien de nos coutumes et traditions, alors que des femmes vaquaient à leurs habituelles tâches quotidiennes. Cela a été un grand choc pour moi», se remémore Moulay Ismail Alaoui, qui n’avait même pas quatre ans à l’époque.

Et c’est à ce moment-là, ajoute-t-il, qu’il a commencé à s’intéresser à la politique.

Enfant aussi, ce membre fondateur du Parti du progrès et du socialisme (PPS), qu’il a dirigé de 1997 à 2010, se souvient du jour où il est allé sur la colline de Betana, inhabitée à l’époque, pour guetter le train qui ramenait Feu Mohammed V de Tanger. Nous sommes en 1947 et le défunt monarque avait fait à Tanger un discours historique malgré les réticences des autorités du protectorat.

Salé, Kénitra et Fès

Moulay Ismail Alaoui était admis dans une école française, mais son père tenait absolument à ce qu’il apprenne la langue arabe et les rudiments de l’islam. Il assistait à des cours du soir et les week-ends à domicile avec l’aide de deux érudits de l’époque.

Un groupe d’adolescents dont il faisait partie consacrait de longues réunions à débattre de divers sujets d’actualité avec, au centre, l’actualité du Maroc et son évolution.

Jusqu’en 1955, le père de notre invité était mouhtassib, haut fonctionnaire qui avait plusieurs tâches, dont celle d’arbitrer les litiges et de contrôler les prix.

À son retour au Maroc, Mohammed V le nomma pacha de Kénitra, puis de Fès. Un arrachement pour Ismail Alaoui, qui a dû s’éloigner de ses amis en fonction des pérégrinations de son père.

Avant l’âge de 15 ans, notre interlocuteur se rappelle avoir pris part à la rédaction d’une Constitution pour le Maroc. Un exercice inspiré de ce qu’ils avaient appris sur la Révolution française.

Une chanson pour Mohammed VI et un discours devant Moulay El Hassan

La première rencontre de Moulay Ismail Alaoui avec la famille royale remonte à l’année 1947. Mohammed V était venu rendre visite à sa famille, qui avait offert un dîner en son honneur, à Salé. À 7 ans, le petit Moulay Ismail a été chargé de répéter une petite chanson de bienvenue devant la famille royale, laissant le soin à ses cousins, plus calés en langue arabe, de donner lecture à des discours.

Une année plus tard, soit en 1948, c’était Moulay El Hassan, alors Prince héritier, qui rendait visite aux grands-parents de Moulay Ismail Alaoui, Meryem El Gabbas et Omar El Khatib.

Cette fois, il a été chargé de lire un petit discours rédigé par son grand-père, mais contre rémunération: des friandises. Moulay El Hassan, qui lui corrigeait son élocution en arabe, a fini par l’embrasser et le congratuler.

Par Fatima El Karzabi, Adil Gadrouz et Said Bouchrit
Le 24/03/2023 à 21h00