Le PJD au bord de l’explosion: guerre ouverte entre Benkirane et Ramid

Mustapha Ramid et Abdelilah Benkirane

Mustapha Ramid et Abdelilah Benkirane . Le360 : Adil Gadrouz

Rien ne va plus entre Abdelilah Benkirane et Mustapha Ramid au sein du PJD. Les attaques du premier, accusant Ramid de passivité et de manque d’engagement lors de la campagne électorale de 2011, ont suscité la colère du second, qui rétorque. La scission n’est pas loin.

Le 27/10/2017 à 10h29

Contacté par le360, Abdelilah Benkirane, le secrétaire général du PJD, s’est refusé à tout commentaire. Particulièrement serein au vu du contexte tendu, et c'est peu dire, au sein de sa formation, il nous répond ne pas vouloir surenchérir quant à la sortie de Mustapha Ramid, son frère d'armes au sein du PJD, «pour éviter toute scission au sein du parti et préserver son unité». Mais le coup est déjà parti.

La diatribe d’Abdelilah Benkirane, samedi 21 octobre, lorsqu’il a présidé la rencontre nationale des élus communaux de sa formation politique a fini par faire réagir. De l’intérieur même du PJD et par la voix de Mustapha Ramid, un des ténors du parti. Lors de sa sortie, où il mettait fin à une longue période de silence, Benkirane s’était, entre autres, attaqué aux siens, notamment s’agissant de la campagne électorale ayant précédé les élections de 2011. «Celui qui avait mené à ce moment-là la campagne électorale numéro 1, c’était bien moi. Soyons clairs, certains sont partis au Haj (pèlerinage de la Mecque), d’autres se sont contentés du peu qu’ils pouvaient. D’autres encore ont même refusé de prendre part à ce scrutin», a dit Benkirane. La flèche s’agissant du pèlerinage et du refus est adressée au même Ramid.

Dans un long post Facebook, publié jeudi 26 octobre dans la nuit, Ramid se dit supris par de tels propos. C’était juste avant de démonter, point par poit, les arguments de son secrétaire général. Pour celui qui occupe actuellement le poste de ministre d’Etat en charge des Droits de l’Homme, Benkirane a fait d’abord un hors sujet. «La rencontre devait être consacrée à l’action des élus communaux. Les propos du frère secrétaire général n’avaient donc aucun lien avec le sujet et ne font que creuser les différends et conflits entre nous», a dit Ramid. Pour lui, non seulement cette sortie porte atteinte aux règles devant régir toute divergeance de points de vue «entre frères», mais dénote un «certain extrémisme» et une «certaine pensée unique».

Ramid, celui-là même qui incarnait le soutien indéffectible à Benkirane, reproche également à ce dernier de ne pas faire ce qu'il dit: sa sortie contredit ses propres orientations et directives appelant à la sérénité et l'unité des rangs.

«Je tiens à préciser que je suis le seul à être concerné par le pèlerinage de la Mecque et le refus de participer aux élections. Et le frère secrétaire général ne sait que trop que ma décision était motivée par ma volonté de donner l’exemple. Le parti avait besoin d’une dose d’éthique qu’incarnait la non-participation de certains de nos frères et sœurs à ce scrutin. Je suis d’ailleurs rentré au Maroc dès l’entame de la campagne électorale pour porter aide et assistance à nos candidats, notamment à Casablanca, Sidi Bennour, Oujda, Berkane, Tiznit, Laâyoune et Boujdour», se défend Ramid.

«En agissant de la sorte, le frère secrétaire général réduit à néant tous les effort passés et présents de ses frères, à un moment crucial de la vie du parti. Il donne l’impression que le parti, c’est lui et que c’est lui le parti», ajoute le ministre. Et de s’interroger si de tels propos auraient été tenus s’il avait défendu l’idée d’un troisième mandat pour Benkirane à la tête du parti. C’est là où le bât blesse. Ramid, franchement et farouchement opposé à un troisième mandat de Benkirane à la tête du PJD, promet de revenir plus en détails sur cette question.Autant dire que les différends entre les leaders du parti de la Lampe ne sont pas près de prendre fin. «Je m’attendais à des excuses ou au moins des éclaircissements, je n’ai rien obtenu. C’était donc à moi de m’expliquer», précise Ramid.

Des excuses ou des éclaircissements de Benkirane, il y a très peu de chances qu'il y en ait. En revanche, ce qu'il y a de sûr, c'est que le PJD connaît sa crise la plus grave et qu'une guerre des chefs est déjà en cours.

Par Tarik Qattab
Le 27/10/2017 à 10h29