Le «Chemin de la félonie… détails de la conspiration», tel est le titre racoleur du dernier épisode de ce que les Algériens appellent le «dahdouhisme», pour qualifier les tissus de mensonges que les services de renseignements algériens ne cessent produire dans leurs geôles.
A la veille de l’ouverture des Jeux méditerranéens, qui a eu lieu samedi 25 juillet à Oran, il fallait bien sûr s’attendre à une nouvelle basse manœuvre du régime algérien, très inquiet du risque de voir des manifestations populaires éclater à la faveur de la présence des délégations des pays du pourtour méditerranéen dans cette cité de l’ouest algérien.
Des craintes d’autant plus justifiées que le président algérien s’est rendu sur place pour sa première sortie dans l’intérieur du pays, depuis son élection en décembre 2019. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le peuple oranais a totalement boudé Abdelmadjid Tebboune.
Ainsi, et alors qu’il était attendu au tribunal militaire pour s’expliquer devant les juges sur sa désertion et ses déballages sur l’armée à travers les réseaux sociaux, c’est finalement dans un nouvel enregistrement vidéo que Mohamed Benhalima s’est livré, mercredi dernier dans la soirée, à de nouveaux «aveux».
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Selon une transcription de ses propos faite par l’agence de propagande officielle algérienne (APS), «Benhalima a expliqué qu’il a commencé, une fois en contact avec les terroristes Larbi Zitout, Amir Boukhors et Assia Guechoud, à découvrir leurs véritables intentions et qu’il était tombé dans le traquenard d’un complot makhzeno-sioniste ourdi contre l’Algérie».
Et en quoi consiste ce complot marocain ou israélien qui viserait l’Algérie? Selon les aveux dictés par les renseignements algériens, Benhalima dit avoir dévoilé «la main du Makhzen» lors de son placement sous contrôle judiciaire en France pour résidence illégale. Là, écrit l’APS, «un certain Walid Kebir, résidant au Maroc qui a participé au Hirak populaire en Algérie et ayant des relations avec Hichem Aboud et Mehdi Ghani a essayé de le transférer au Maroc. Une destination vers laquelle la terroriste Assia Guechoud a aussi tenté de le convaincre à choisir. Et de dévoiler, dans ce cadre, que le terroriste Zitout l’a informé que Amir Boukhors a un contact direct avec le Makhzen marocain et qu’il recevait des sommes colossales des autorités marocaines».
Finalement, Benhalima dit avoir décidé «de fuir vers l’Angleterre au lieu du Maroc en se faisant passer pour un juif».
Maroc par-ci, Makhzen par-là… Il ne restait qu’à saupoudrer toute cette bouillasse de «terrorisme», un ingrédient incontournable dans toutes les sauces insipides concoctées par la junte algérienne. Ainsi tous les opposants algériens en exil, taxés de «terroristes» et présumés liés au Maroc, sont accusés de «financement du terrorisme».
«Benhalima a dit avoir pris contact avec Abdellah Drissi, “bras droit“ du terroriste Larbi Zitout, lequel lui a affirmé qu’il collectait avec d’autres personnes des dons dans les mosquées pour les envoyer en Afghanistan, et que des “chefs d’entreprises finançaient les activités du mouvement terroriste Rachad“», continue l’APS.
Comble des contradictions dans ces «aveux» extorqués, Benhalima affirme que Zitout, dit agent du Makhzen, lui aurait conseillé d’éviter Amir Boukhors, pourtant lui aussi «agent du Makhzen», doublé d’un «terroriste» appartenant au mouvement Rachad de Zitout.
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Rien d’étonnant dans ces accusations de «complot visant l’Algérie», quand on sait que la «main étrangère» a aussi servi à envoyer plusieurs généraux en prison. C’est le cas de l’ancien patron des renseignement extérieurs, le général-major Mohamed Bouzit, démis de ses fonctions en janvier 2021, puis jeté en prison en septembre 2021 au prétexte d’une présumée connivence avec une partie étrangère et autre atteinte à la sécurité nationale. Une accusation qui a également valu la prison à un autre général-major, Mohamed Kaidi, l’un des meilleurs «jeunes» cadres de l’armée algérienne, limogé en novembre 2021.
Ce qui est plutôt étonnant, c’est que de plus ou moins illustres «extradés» n’ont jamais été soumis à la méthode dahdouhiste.
Pourquoi les services algériens n’ont-ils jamais réussi à «fabriquer» des aveux à l’adjudant-chef Guermit Bounouira, l’ex-boîte noire de l’ancien chef d’état-major de l’armée algérienne, Gaïd Salah, mort en décembre 2019? Extradé de Turquie en 2020, Bounouira avait pourtant remis à l’ancien diplomate et opposant Larbi Zitout une masse d’importants documents classés «top secret», relatant les pratiques mafieuses des généraux algériens. Ces documents, tombés aux mains des renseignements turcs, ont été également remis au général fugitif Ghali Belksir, ancien chef d’état-major de la gendarmerie algérienne.
Où sont également les aveux du gendarme Mohamed Abdallah, lui aussi extradé d’Espagne et qui était en contact permanent avec tous ces opposants algériens que cite aujourd’hui Benhalima?
Ce qui est certain, c’est que plusieurs médias algériens proches des généraux avaient distillé, dès mars dernier, une allégation foncièrement propagandiste, selon laquelle le Maroc s’apprêtait à profiter des Jeux méditerranéens pour envoyer à Oran, au sein de sa «forte délégation», des «espions» qui «roulent également pour le Mossad israélien». Et c’est justement cette propagande, remise au goût du jour par les «aveux» de Benhalima, qui a servi d’alibi ces derniers jours pour s’acharner sur les journalistes marocains venus couvrir ces Jeux.