Le texte préliminaire de la dernière résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental, dont le vote est prévu à la fin de ce mois d’octobre, annonce d’emblée la couleur. Dans le premier état du texte de la résolution, rédigé par les Etats-Unis d’Amérique et que Le360 a pu consulter, il est d’emblée fait référence à Horst Köhler, l’ancien envoyé personnel au Sahara, pour les «efforts qu’il a déployés pour organiser les tables rondes qui ont donné un élan au processus politique».
«Le processus politique» est une expression-clef dans le texte de la résolution proposé par les Etats-Unis aux membres du Conseil de sécurité. En effet, tout en saluant la nomination de Staffan de Mistura, le nouvel envoyé personnel d’Antonio Guterres au Sahara, la résolution l’exhorte «à une reprise constructive du processus politique», en s’appuyant sur les progrès réalisés par son prédécesseur.
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Le texte de la résolution souligne davantage l’importance des deux tables rondes, organisées respectivement le 5 et 6 décembre 2018 ainsi que le 21 et 22 mars 2019, avec la participation du Maroc, du Polisario, de l’Algérie et de la Mauritanie.
La résolution «encourage la reprise des consultations entre l’Envoyé personnel et le Maroc, le front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie». Elle incite à faire participer des femmes et des jeunes à ces négociations. Quand on sait que la gérontocratie est la marque patente aussi bien du système algérien que des responsables du Polisario, cette exhortation à renouveler le genre et l’âge des négociateurs sonne comme un appel au changement qui n’est pas sans rappeler celui du Hirak.
L’Algérie, citée neuf foisL’Algérie, qui se défend d’être une partie au conflit du Sahara, est citée neuf fois dans la première mouture de la résolution du Conseil de sécurité. En effet, l’Algérie est nommée cinq fois et il y est fait référence quatre autres fois avec l’expression «Etat voisin».
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Comme s’il appréhendait la teneur de la dernière résolution du Conseil de sécurité, le régime militaro-politique qui dirige l’Algérie, a mandaté le ministère des Affaires étrangères pour faire part de son refus de participer aux prochaines tables rondes, organisées sous l’égide des Nations-Unis. Amar Belani, un responsable au ministère algérien des Affaires étrangères, a déclaré à cet égard, le 12 octobre à l’agence de presse algérienne (APS), que son pays ne participera pas aux prochaines tables rondes sur le Sahara. Affirmant que le format des tables rondes «n’est plus à l’ordre du jour», le responsable algérien a qualifié cette option d’«obsolète».
Selon toute apparence, ce qui paraît «obsolète» pour le système algérien revêt une actualité brûlante pour la communauté internationale. Les tables rondes sont en effet l’unique format de négociations, préconisé par le Conseil de sécurité à l’adresse de l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU et des parties au conflit. Que va faire dès lors le régime algérien après avoir claironné sur tous les toits le décès des tables rondes et son refus d’y participer? Quelle suite va-t-il donner à cette sommation du Conseil de sécurité: «renforcer l’implication dans le processus politique et progresser vers la une solution politique»?
En tout cas, la communauté internationale est de plus en plus consciente du frein que constitue le conflit du Sahara au développement et à l’essor des peuples du Maghreb et du Sahel. Le premier état du texte de la résolution reconnaît «qu’une solution politique à ce différend de longue date et une coopération renforcée entre les Etats membres de l’Union du Maghreb arabe contribueraient à la stabilité et à la sécurité, conduisant à leur tour à des emplois, à la croissance et à des opportunités pour tous les peuples de la région du Sahel».
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D’ailleurs, le texte de la résolution demande expressément à faire valoir «l’esprit de réalisme et de compromis» dans les négociations.
La rupture du cessez-le-feu et le recensement des réfugiés à TindoufLe texte note «avec une profonde préoccupation la rupture du cessez-le-feu». Il pointe d’ailleurs du doigt le Polisario qui a décrété l’état de guerre au Sahara occidental. Se déclarant préoccupé par les violations des accords existants et réaffirmant qu’il importe de respecter pleinement ces engagements, le Conseil de sécurité rappelle à cet égard «au Polisario le respect des engagements pris envers l’ancien envoyé personnel du SG de l’ONU au Sahara».
Autre point qui ne va pas plaire au Polisario et à son soutien algérien, c’est la demande expressément formulée par le texte de la résolution au sujet du recensement des réfugiés dans les camps de Tindouf. A ce sujet, l’Algérie et le Polisario se sont toujours opposés au recensement des populations, supposément réfugiées à Tindouf, annonçant des chiffres fantaisistes et hypertrophiés.
A l’instar des précédentes résolutions du Conseil de sécurité, aucune mention n’est faite à un référendum d’autodétermination. Cette option est définitivement enterrée par la communauté internationale. C’est l’esprit de réalisme, de compromis et de pragmatisme qui prévalent en revanche dans la dernière résolution du Conseil de sécurité.
La nouvelle résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara proroge par ailleurs d’une année le mandat de la Minurso, jusqu’au 31 octobre 2022.
Paniqué, le régime algérien lance un SOS en direction de MoscouLe régime algérien, qui a pris connaissance du texte de la résolution du Conseil de sécurité, a supplié les Russes d’accorder une audience à trois responsables du Polisario. «Le représentant spécial du président russe pour le Moyen-Orient et l'Afrique, Mikhaël Bogdanov, également vice-ministre russe des Affaires étrangères a reçu mercredi à Moscou une délégation du Secrétariat général (SG) du Front Polisario, en vue d'examiner les perspectives de règlement du conflit au Sahara occidental», annonce une dépêche de l’APS, datée du 20 octobre. Cette délégation, composée de trois personnes, a obtenu un rendez-vous furtif grâce aux bons offices des militaires algériens.
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Objectif de ce rendez-vous: obtenir des amendements par la Russie du texte, présenté par les Américains. La question qui se pose dès lors: quelle suite vont accorder les Russes à la supplique des Algériens?
Cette question est parasitée par un brouhaha médiatique au sujet d’une prétendue crise sourde entre le Maroc et la Russie. Interrogé sur les ressorts de cette campagne médiatique, un haut responsable à la diplomatie marocaine confie, interrogé par Le360: «je ne comprends ni les ressorts et encore moins le timing de ces prétendues tensions entre Rabat et Moscou à la veille de l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara». Et d’ajouter: «les personnes qui affirment qu’il existe une crise muette entre les deux pays connaissent très mal la diplomatie russe qui est frontale, offensive et ne fait pas dans les messages subliminaux». Et d’ajouter: «la Russie n’est pas l’Union Soviétique et elle a une approche globale en Afrique. Elle ne prend pas parti exclusivement pour un camp et pense d’abord à ses intérêts stratégiques dans une région. Dans la presse russe, il n’existe pas d’ailleurs une seule ligne sur une crise avec le Maroc». Et de conclure: «le vrai test pour les relations entre Rabat et Moscou, c’est la résolution du Conseil de sécurité».
Lors des trois dernières résolutions du Conseil de sécurité (2018, 2019 et 2020), la Russie s’était abstenue de voter. Agira-t-elle de même cette année ou fera-t-elle pression pour modifier le texte présenté par les Américains? C’est toute la question.