Poutine accuse l'Ukraine de «terrorisme» et réunit son conseil de sécurité

Une femme attend qu'un bateau traverse la rivière Siverskyi Donets, à côté d'un pont détruit dans la ville récemment reprise de Sviatohirsk, dans la région de Donetsk, le 9 octobre 2022, au cours de l'invasion russe de l'Ukraine.

Une femme attend qu'un bateau traverse la rivière Siverskyi Donets, à côté d'un pont détruit dans la ville récemment reprise de Sviatohirsk, dans la région de Donetsk, le 9 octobre 2022, au cours de l'invasion russe de l'Ukraine. . Yasuyoshi CHIBA / AFP

Le président russe Vladimir Poutine réunit ce lundi 10 octobre 2022 son conseil de sécurité après avoir accusé Kiev d'avoir commis un «acte terroriste» en organisant l'explosion qui a partiellement détruit samedi le pont de Crimée reliant la Russie à la péninsule annexée.

Le 10/10/2022 à 06h39

«Les auteurs, les exécutants et les commanditaires sont les services secrets ukrainiens», a résumé hier, dimanche, Vladimir Poutine, à l'issue d'une réunion avec le chef du Comité d'enquête russe, selon une vidéo diffusée par le Kremlin. «Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un acte terroriste visant à détruire une infrastructure civile russe d'importance critique», a-t-il ajouté.

C'était la première réaction de Vladimir Poutine à l'explosion survenue samedi -un nouveau revers majeur pour la Russie au moment où ses forces sont en difficulté en Ukraine.

Le Kremlin a indiqué que le président russe convoquait en ce lundi son conseil de sécurité, qui rassemble les principaux ministres, responsables politiques et représentants des services de sécurité et de l'armée russes.

Kiev n'a ni confirmé ni démenti son implication. Le président Volodymyr Zelensky s'est contenté d'ironiser dans une vidéo sur le temps «nuageux» samedi en Crimée -allusion probable à la fumée de l'incendie- «bien qu'il y faisait également chaud».

Il a promis dans la même vidéo une Crimée «sans occupants», l'Ukraine, soutenue en cela par l'immense majorité de la communauté internationale et les Nations unies, n'ayant jamais accepté l'annexion en 2014 par Moscou de la péninsule.

Volodymyr Zelensky a également qualifié les militaires russes de «terroristes», après des frappes sur des immeubles d'habitation de Zaporijjia, ville du sud de l'Ukraine, qui ont fait entre 12 et 17 morts selon les bilans, trois jours après de précédents bombardements qui y avaient fait 17 morts.

«Mal absolu»«Aucun sens. Le mal absolu. Des terroristes et des sauvages. Depuis celui qui a donné cet ordre jusqu'à celui qui l'a exécuté», a écrit le président ukrainien sur son compte Telegram. Cette frappe russe «a détruit des appartements privés, où des gens vivaient, dormaient sans attaquer personne».

Selon l'armée de l'air ukrainienne, quatre missiles de croisière, deux missiles tirés depuis des avions de chasse et d'autres missiles de type antiaérien ont été utilisés contre la ville.

L'armée russe a elle affirmé hier dimanche avoir mené des frappes avec des «armes de haute précision» contre des unités de «mercenaires étrangers» dans la région.

Non loin de là, la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d'Europe, a été reconnectée au réseau électrique dimanche.

La veille, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) avait annoncé que l'installation avait perdu sa dernière source d'alimentation électrique externe en raison de nouveaux bombardements, et qu'elle s'appuyait sur des générateurs d'urgence pour fournir le courant dont elle a besoin pour assurer certaines fonctions de sécurité, dont le refroidissement de ses six réacteurs, tous à l'arrêt.

«Notre équipe à Zaporijjia confirme que la ligne d'alimentation extérieure perdue hier (samedi) a été rétablie et que (la centrale) est reconnectée au réseau —un soulagement temporaire face à une situation toujours intenable», a écrit le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, sur son compte Twitter.

Reprise du traficQuelques heures après l'énorme explosion sur le pont de Crimée samedi, le trafic automobile et ferroviaire y avait repris partiellement. Les poids lourds ont cependant été renvoyés vers des ferries dans un premier temps.

La déflagration a fait s'effondrer sur plusieurs travées l'une des voies routières de ce pont construit à grands frais, inauguré par Vladimir Poutine en 2018.

Un convoi ferroviaire de wagons citernes de carburant a en outre pris feu.

Le ministère russe des Transports a assuré dimanche que les trains de passagers «circulaient selon le plan habituel».

Les autorités russes avaient dès samedi attribué l'explosion à un camion piégé dont le propriétaire est un habitant de la région russe de Krasnodar.

Kiev avait menacé à plusieurs reprises de frapper ce pont symbole de l'annexion de la Crimée, qui sert aussi à l'approvisionnement des troupes russes en Ukraine.

Des images de vidéosurveillance diffusées sur les réseaux sociaux ont montré une puissante explosion au moment où plusieurs véhicules circulaient sur le pont.

Selon les enquêteurs, l'attaque a fait trois morts: le conducteur du camion ainsi qu'un homme et une femme qui circulaient en voiture.

L'armée russe, en difficulté sur le front de Kherson dans le sud de l'Ukraine, a affirmé samedi que l'approvisionnement de ses troupes n'était pas menacé.

Depuis début septembre, les forces russes ont été obligées de reculer sur de nombreux points du front. Elles ont notamment dû se retirer de la région de Kharkiv (nord-est).

Face à une armée ukrainienne galvanisée et forte des approvisionnements en armes occidentales, Vladimir Poutine a décrété fin septembre la mobilisation de centaines de milliers de réservistes et l'annexion de quatre régions ukrainiennes, bien que Moscou ne les contrôle que partiellement.

A New York, l'Assemblée générale de l'ONU se penche à partir de ce lundi 10 octobre 2022 sur une résolution condamnant l'annexion de ces quatre régions, les Occidentaux espérant prouver l'isolement de la Russie sur la scène internationale.

Le projet de texte vu par l'AFP condamne les annexions «illégales» des régions ukrainiennes de Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson après des «soi-disant référendums et souligne que ces actions n'ont «aucune validité» au regard du droit international.

Le 10/10/2022 à 06h39