Élections au Mexique: l’insécurité, bête noire de la future présidente

Le candidat à la mairie du Parti Morena, Mario Perez Flores, s'exprimant lors d'un rassemblement électoral dans la municipalité de Maravatio, dans l'État de Michoacan, au Mexique, le 14 mai 2024. Les criminels de la ville de Maravatio utilisent des menaces ou des balles pour s'assurer que leurs candidats favoris sont élus le 2 juin, date à laquelle le pays choisira également un nouveau président. Dans tout le pays, 28 candidats ont été tués depuis le début du processus électoral le 23 septembre, selon l'organisation non gouvernementale Data Civica. AFP or licensors

De nombreux Mexicains considèrent que l’insécurité est le défi le plus urgent de celle qui succédera au président sortant Andrés Manuel López Obrador lors du scrutin de juin, dans un pays frappé par la violence criminelle.

Le 19/05/2024 à 06h55

Pour succéder à Andrés Manuel López Obrador dans ce pays comptant au total quelque 100.000 disparus, la favorite de la gauche au pouvoir Claudia Sheinbaum fait face à sa rivale de centre droit Xochitl Galvez.

Quel est le bilan sécuritaire du président sortant?

Plusieurs cartels se disputent le contrôle de l’acheminement de la drogue vers les États-Unis (Jalisco Nueva Generación, Sinaloa, Golfo), ainsi que d’autres activités (trafic de migrants, extorsions ou encore vol de combustibles).

La violence a explosé à partir de décembre 2006 à la prise de fonction de l’ex-président Felipe Calderón (2006-2012) qui a lancé une offensive militaire contre les cartels. Cela a contribué à la balkanisation des cartels.

Depuis, le Mexique a enregistré au total plus de 420.000 assassinats et plus de 100.000 disparitions.

Par rapport à ses prédécesseurs, Andrés Manuel López Obrador, au pouvoir depuis 2018, a changé de stratégie, répétant qu’il préférait s’attaquer aux causes de la violence comme la pauvreté et le manque de formations et d’emplois pour les jeunes.

Le taux d’homicides pour 100.000 habitants est passé de 28 en 2018 (d’après la Banque mondiale) à 23,3 en 2023, d’après Insight Crime.

Ce ratio place cependant toujours le Mexique parmi les pays les plus violents du monde et de l’Amérique latine, entre le Honduras (38 homicides pour 100.000 habitants) et le Brésil (22).

Le Mexique enregistre quelque 30.000 homicides par an, environ 80 par jour. Six États sur 32 concentrent près de la moitié des homicides, d’après le gouvernement.

Les trois quarts des homicides sont liés à des affrontements entre groupes criminels, affirme le président López Obrador.

Que proposent les deux candidates favorites?

Largement en tête dans les sondages, l’ex-maire de Mexico Claudia Sheinbaum promet, comme López Obrador, de s’attaquer aux causes de la délinquance «pour que les jeunes aient le droit à une vie qui ne soit pas liée au crime organisé». Elle promet également de «lutter contre l’impunité».

Claudia Sheinbaum s’appuie sur son bilan à la tête de la capitale (2018-2023), où le nombre d’homicides a baissé (742 en 2022 contre 1.309 en 2019, d’après l’Institut national de statistiques).

Sa recette? «S’attaquer aux causes, plus et mieux de police, renseignements, enquête et coordination», résumait-elle fin 2023.

Pour sa part, l’opposante Xochitl Galvez a placé sa campagne sous le slogan «Pour un Mexique sans peur».

Elle promet de poursuivre les criminels les plus recherchés avec l’appui de l’armée, de construire une prison pour les plus dangereux, et d’améliorer le salaire des policiers.

Qu’impliquerait le retour de Trump?

Impossible de parler de la sécurité au Mexique sans mentionner le grand voisin du nord. Washington demande au Mexique de lutter contre le trafic de fentanyl qui tue des milliers d’Américains. Mexico a porté plainte aux États-Unis contre les fabricants des armes qui sèment la mort sur son territoire.

C’est un secret de polichinelle: des agents américains sont présents sur le sol mexicain, au grand agacement parfois des Mexicains (surtout envers l’agence anti-drogue DEA).

Face à un possible retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, les experts anticipent une pression accrue sur le Mexique pour lutter contre le trafic de drogue et la migration clandestine.

«Face à ce scénario, le Mexique doit préparer un plan B de réajustement intégral de sa relation bilatérale», selon Arturo Sarukhán, ex-ambassadeur du Mexique aux États-Unis.

«Nous sommes en train de préparer les deux scénarios» résultant de la présidentielle américaine à venir, confirme un membre important de l’équipe de campagne de Sheinbaum, parlant également des questions économiques.

Que disent les experts?

Pour l’analyste Raúl Benítez, le Mexique doit améliorer la coordination entre juges, policiers, procureur et agences de renseignements. Ce que selon lui, Claudia Sheinbaum a réussi à la tête de la mairie de Mexico.

Le défi consiste à transposer cette méthode à la tête d’un pays de 129 millions d’habitants, ce qui demande d’immenses ressources pour réparer «une chaîne judiciaire brisée», selon Carlos Rodríguez, consultant en sécurité et renseignement.

Par Le360 (avec AFP)
Le 19/05/2024 à 06h55