En Algérie, il y a d’un côté les effets d’annonce, plus grandiloquents et ronflants les uns que les autres. À leur accorder un tant soit peu de crédit, on se croirait en plein miracle du Han. Construction, lancée plutôt deux fois qu’une, de la plus grande station de dessalement d’eau de mer au monde. Une capacité à ravitailler en blé, et presque sans peine, non seulement le pays, mais des nations aussi khoubzivores que le Maroc ou encore l’Égypte. Des zones franches en veux-tu, en voilà avec les pays du Maghreb et le Sahel pour une «prospérité» partagée à même de marquer un immense bond en avant de tout le tiers-monde… Les exemples déclamés les yeux dans les yeux par le régime d’Alger sont légion. On passera sur le «fait» que tout ou presque a été conçu, exécuté et mené à bien en Algérie ou par des Algériens, des Pyramides de Gizeh, ainsi que toutes les autres, à la découverte de l’Amérique, en passant (mais bien sûr!) par la conquête musulmane de l’Andalousie et jusqu’à la construction de la Tour Eiffel, dressée grâce au métal et aux ouvriers algériens. Il ne serait absolument pas étonnant si un jour, l’humanité découvre les origines bien algéroises ou constantinoises de Youri Gagarine ou encore Neil Armstrong. Ou les deux, pourquoi pas?
Sauf que, d’un autre côté, il y a l’épreuve du réel. Et celui-ci veut non seulement qu’aucun de ces mégaprojets n’a la moindre chance de voir le jour, mais que même l’existant misérable des Algériens est secoué au quotidien par des mesures d’austérité, voire de privation de leurs droits économiques et sociaux les plus élémentaires. Pour les droits politiques et de l’Homme, on repassera. Du lait en poudre introuvable, des lentilles qui s’achètent à prix d’or –et celui-ci atteint des sommets en ce moment– de sauvages bousculades pour le Graal suprême: des bonbonnes de gaz dans un pays pourtant exportateur. Sans oublier les interruptions à répétition d’électricité et d’eau potable dans les plus grandes villes, la capitale Alger comprise.
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C’est d’ailleurs sur ce dernier registre que le régime vient encore une fois de briller, apportant la preuve de sa totale impéritie. Les autorités du pays voisin viennent ainsi de décréter… une coupure nette de l’approvisionnement en eau de la 2ème plus grande agglomération du pays: Oran et toute sa région. Les arrêts par intermittence ou sporadiques d’approvisionnement en eau, les Algériens en ont la triste habitude. Mais là, et du 21 au 26 mai courant, il y aura walou. Même la désespérée collecte de bidons et de seaux d’eau et leur alignement devant le robinet en attendant une heure ou deux de baraka ne servira strictement à rien. Il n’y aura plus d’eau. Nothing.
1,7 million de «chouha-da»
L’annonce officielle de cette nouvelle marque de grandeur de la «Force de frappe» a été faite par le tout aussi officiel Houari Khoudja, directeur général de la SEOR (Société de l’eau et de l’assainissement d’Oran), et ce, via le non moins officiel quotidien Al Khabar, porte-voix de la junte algérienne. Officiellement toujours, l’on apprend qu’au moins 800.000 Algériens, équivalant à 200.000 ménages, n’auront plus accès à cette ressource vitale pendant une semaine et que, même après, il faudra compter plusieurs semaines avant un retour à la «normale». Aux bidons et aux seaux, donc, à remplir d’eau pendant les rares heures de délivrance. Et l’on se demande encore pourquoi nos frères algériens sont souvent à fleur de peau!
Même pour annoncer de mauvaises nouvelles, qui finiront par tomber, le régime d’Alger ment. Vérification faite, l’aire urbaine d’Oran desservie par la SEOR compte non pas 800.000, mais 1.700.685 d’habitants selon un décompte qu’on qualifierait de... tout à fait officiel et remontant à 2020. À noter que la raison de cette soif chronique à venir est une série de pannes et «soucis d’entretien» dont la station de dessalement de Chatt El Hillel d’Ain Témouchen, opérationnelle en 2010, fait l’objet. Quand on sait que Tebboune a annoncé en septembre, devant l’assemblée générale de l’ONU, pouvoir dessaler 1,3 milliard de m³ d’eau par jour d’ici fin 2024, l’espoir est permis de voir toute l’Algérie non seulement regorger d’eau, mais transformée en Atlantide!
D’ici la concrétisation du déluge biblique promis par Tebboune, les habitants de la deuxième agglomération en Algérie auront, chaque jour, des angoisses existentielles face aux robinets. Un comble, une hérésie dans un pays soi-disant pétrolier et gazier!
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Plus criminel encore, personne parmi les administrateurs du régime d’Alger ne semble s’en offusquer outre mesure. On a fait le tour pour vous: pas un mot d’excuse n’a été formulé à l’adresse des Oranais, au sens très large. Pour la SEOR comme pour les autorités, c’est cela ou des coupures nettes d’eau pendant l’Aïd Al-Adha ou encore l’été. Alors, pour vous, ce sera peste ou choléra? Dans un pays normal où les choses se passent normalement, une telle impéritie vaut démission générale, voire suicide collectif. C’est oublier que nous sommes «au pays du monde à l’envers», comme le résument si bien Jean-Louis Levet et Paul Tolila, auteurs du best-seller «Le mal algérien» qui décrypte, entre autres, les rouages d’une bureaucratie algérienne aussi tentaculaire qu’incompétente.
«Mentez, calomniez…»
Pendant ce temps-là, le régime d’Alger regarde ailleurs, préférant là encore maintenir mordicus sa stratégie du «Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose» ou sa variante «Mentez, calomniez…». Opiniâtre, ou incurable, partisan de son dada «Il faut mentir comme un diable, non pas timidement, non pas un temps, mais hardiment et toujours» du même Voltaire, le président-candidat Abdelmadjid Tebboune redouble d’ingéniosité en ces temps de pré-campagne.
Dernière trouvaille, les incroyables récoltes céréalières issues du radieux désert algérien. Portail d’information un temps crédible, mais désormais sous la botte (de foin) du régime d’Alger, TSA parle même «de dunes de blé dans le Sahara algérien». Prodigieux. Ainsi, à Adrar, dans le sud du pays, la moisson des céréales bat son plein et promet des records: 1 million de quintaux. Yallah! Des vidéos, de la télévision publique algérienne qui plus est, ont même immortalisé ces milliers, dizaines et même centaines de milliers de camions qui défilent entre les champs et les points de collecte. Depuis, les images ont été supprimées des comptes officiels algériens, bien que...
Nous sommes loin des 30 millions de tonnes «techniquement faisable» par l’Algérie, comme l’a certifié Tebboune le 30 mars 2022 déjà devant, tenez-vous bien, le secrétaire d’État américain Antony Blinken. Mais l’intention y est.
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Sauf que c’est archifaux, qu’Adrar en est loin, même si un million de quintaux, c’est peu de chose dans l’absolu et que les images dont se targue le régime et ses médias sont un pur produit, d’une application pour débutants se basant sur l’intelligence artificielle. Du pur brain washing, à l’état primaire.
Cédons néanmoins à la tentation de rappeler la fabuleuse déclaration de Tebboune devant Blinken. C’est une perle. «Avec un pays très vaste, nous pouvons aider l’Afrique en termes de fourniture de céréales. On peut le faire. Il est techniquement faisable d’atteindre une production de 30 millions de tonnes. Nous avons besoin de 9 millions de tonnes et pouvons exporter 21 millions de tonnes vers le Maroc, la Tunisie et l’Égypte sans aucun problème». Un morceau d’anthologie immortalisé sur le site du Département d’État US. Hâbleur professionnel, le président-candidat oublie que les paroles passent, mais que les écrits restent. Du haut de sa sénilité prouvée, il ignore que l’Algérie est l’un des plus grands importateurs de céréales au monde. Conflit Russie-Ukraine oblige, le pays n’arrive même pas à s’approvisionner actuellement. Avant de chercher à exporter les céréales vers le Maroc, l’Égypte et la Tunisie, l’Algérie ferait mieux de chercher à assurer sa propre sécurité alimentaire et réduire un tant soit peu sa quasi totale dépense des céréales, et autres produits, venant d’ailleurs.