Transport urbain par autobus: Alsa Maroc et City Bus monopolisent, à eux deux, près de 90% du marché

Un bus d'Alsa-Casablanca.

Un bus d'Alsa-Casablanca. . DR

Le marché de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus est très largement dominé par deux opérateurs: Alsa Maroc et, dans une moindre mesure, City Bus. Le Conseil de la concurrence parle d’un «duopole», voire même d’un marché «monopolistique».

Le 13/07/2022 à 15h17

L’avis du Conseil de la concurrence relatif au fonctionnement concurrentiel de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus au Maroc, publié mardi 12 juillet 2022, fourmille d’informations inédites sur ce marché.

On y apprend notamment que la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus concerne 37 contrats en cours d’exécution, dont 29 sont de type gestion déléguée, 7 en concession et un seul en contrat d’affermage.

Ces contrats couvrent près de 343 collectivités territoriales, pour une population desservie de près de 18,83 millions d’habitants. En 2020, ces sociétés délégataires ont réalisé un chiffre d’affaires de 1,5 milliard de dirhams, mobilisant un parc de près de 3.203 bus.

© Copyright : Conseil de la concurrence

A en croire les données compilées par le Conseil de la concurrence, deux sociétés dominent outrageusement ce marché, que ce soit en termes de volumes d’activités, de présence dans les grandes agglomérations du Royaume ou de taille de la flotte. Il s’agit de City Bus (Meknès, Fès, Tétouan, Oujda, Fquih ben Saleh, El Jadida et la conurbation de Rabat-Salé-Témara), et surtout d’Alsa Maroc (Marrakech, Agadir, Tanger, Khouribga, Rabat-Salé-Témara et Casablanca.

Le Conseil de la concurrence souligne dans son avis que «l’analyse des parts de marchés de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus montre que les deux premiers opérateurs (Alsa et City Bus) détiennent une part de marché qui varie entre 80 et 90% durant la période 2018-2020. Les entreprises restantes (Lux transport, Foughal bus, Karama bus, Vectalia Maroc, Lima Bus et Rokia Bus) ont chacune une part de marché qui varie entre 0 et 6%».

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Seules les sociétés Alsa et Vectalia Maroc ont réalisé une évolution positive durant la période 2018-2020, estimée respectivement à près de 22,5 points avec une part de marché de 72.5% en 2020 et 1,5 point avec une part de marché de 3.5% en 2020. Ces évolutions positives sont dues à l’adjudication de nouvelles exploitations des villes de Casablanca de Rabat-Salé-Témara pour la société Alsa, à la fin de 2019 et pour Vectalia Maroc qui a remporté le marché de la ville de Safi.

Les opérateurs privés restants (Lux transport, Foughal bus, Karamabus, Lima Bus et Rokia Bus, etc.) affichent des régressions de leurs parts de marché durant la période 2018-2020, dont la plus notable est celle de la société City bus qui a perdu près de 16 points, avec une part de marché divisée par deux.

En complément à cette analyse de la structure du marché en terme de chiffre d’affaires, une répartition des opérateurs privés d’après la flotte de bus exploitée en 2020, conforte le constat de la dominance d’Alsa avec 53,2%, suivie par City Bus avec 26,2% de la flotte de bus totale, au nombre de 3.203 autobus.

Ces données, couplées à d’autres (notamment celles relatives au nombre de fois où les opérateurs ont participé aux appels d’offres lancés), confortent l’idée que le marché de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus est fortement concentré.

«Si plusieurs opérateurs sont actifs sur le marché de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus, la dynamique concurrentielle semble se structurer en réalité autour de deux principaux acteurs, à savoir Alsa et City bus», résume le Conseil de la concurrence.

Toutefois, ajoute-il, «la position de la société Alsa semble relativement se renforcer au regard de la structure constatée du marché et de son évolution». Cette situation se traduit dans les faits par une «limitation avérée de l’intensité concurrentielle dans les grands centres urbains». Ce qui, estime le Conseil de la concurrence, rend ce marché «duopole», voire même «monopolistique de fait».

Dans son avis, le Conseil a formulé une série de recommandations pour améliorer le fonctionnement de ce marché. Il préconise notamment de «régionaliser» la Stratégie nationale de la mobilité urbaine, ainsi que de revoir le statut et le cadre juridiques régissant les sociétés de développement local (SDL), en vue de professionnaliser ces entités et leur donner les moyens juridiques et matériels à même de jouer pleinement leur rôle de régulateurs de ce marché.

Le Conseil de la concurrence propose également d’assurer une concurrence libre et loyale dans le marché de la gestion déléguée du transport public urbain et interurbain par autobus, notamment en établissant une grille d’évaluation actualisée des offres, fondée sur des critères objectifs, davantage focalisés sur le business plan des soumissionnaires.

Il s'agit aussi, selon les recommandations de cette institution, de préciser, comme préalable à tout appel à la concurrence, le degré de partage des risques industriels et commerciaux, et du coût de l’investissement global entre le délégant et le délégataire.

Par Amine El Kadiri
Le 13/07/2022 à 15h17