Une conférence internationale qui s’est tenue à Casablanca, le mardi 2 juillet, a permis l’émergence d’une kyrielle de pistes de solutions pour faire face à l’épineuse question du stress hydrique. Cette rencontre, intitulée «Du stress à la sécurité hydrique, quelles solutions face à la complexité de l’eau» s’insère dans le cadre de la 8ème édition du Salon international des technologies de l’eau et de l’assainissement (SITeau), organisée du 2 au 4 juillet, par Field Attitude, la Coalition marocaine pour l’eau (COALMA) et ses partenaires.
Les participants à cette rencontre ont d’abord tenu à souligner la faiblesse de la mobilisation et l’absence de volonté politique au niveau mondial pour faire face aux défis que pose la raréfaction des ressources hydriques.
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Au niveau national, la récurrence des sécheresses et les restrictions imposées parfois à l’utilisation de l’eau ont certes forcé une certaine prise de conscience des enjeux de la question de l’eau, ont constaté certains participants, mais cela est loin d’être suffisant, insistent-ils. De ce fait, des efforts sont à consentir à tous les niveaux, selon les différents intervenants.
Ainsi, soulignent-ils, au niveau des pouvoirs publics, il est indispensable d’en finir avec le fonctionnement en silos qui amène les différents départements ministériels à travailler de manière isolée sans synergies ni partage d’informations. «L’approche du silo ne marche pas», martèle Abdelghani Chehbouni, de l’Université Mohammed VI polytechnique (UM6P).
Un modèle agricole à changer
Pour y remédier, M’hamed Belghiti, directeur adjoint à la direction de l’irrigation et l’aménagement de l’espace agricole (ministère de l’Agriculture), appelle à l’«inter-ministérialité», déplorant que le Conseil supérieur de l’eau et du climat ne se soit plus réuni depuis 2001!
L’État a été également appelé à réguler le secteur de l’eau et à changer le modèle agricole pour prendre en compte la donne du stress hydrique. Et pour cause: dans certaines régions, des projets agricoles ont été tout bonnement abandonnés du fait que les nappes phréatiques ont été asséchées, fait savoir Abdelghani Chehbouni.
Dans cette même optique, Abderrahman Mahboub, chargé de mission au ministère de l’Équipement et de l’Eau, a insisté sur la notion d’empreinte hydrique, volume total d’eau utilisée pour produire un produit ou un service.
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Ce qui revient à dire qu’il faut changer de mode de consommation de l’eau dans le domaine de la production agricole et industrielle. Un changement qui concerne tout autant l’usage domestique, est-il noté, nécessitant un effort de sensibilisation du consommateur pour en faire un acteur engagé dans la rationalisation de l’utilisation de l’eau, selon Jean Pascal Darriet, directeur général de Lydec. Certains participants ont d’ailleurs appelé à en finir avec le tabou du coût de l’eau qui doit être reflété par les prix facturés aux consommateurs.
D’ailleurs, rappelle Moncef Ziani, du Conseil économique, social et environnemental (CESE), cette rupture a été l’une des recommandations du Nouveau modèle de développement (NMD). Le même intervenant a appelé à instaurer le principe de préleveur-payeur et pollueur-payeur.
Poursuivre la construction de barrages
L’autre levier à activer selon d’autres intervenants est l’innovation, dont l’importance a été soulevée notamment par Abdoulaye Sène, secrétaire exécutif du 9ème Forum mondial de l’eau au Sénégal et par Lamia Housni, directrice Business Development à OCP Green Water. Pour cette dernière, l’innovation sert surtout à réduire le coût de la production, en parlant du dessalement d’eau de mer dont elle souligne l’importance comme une solution pour faire face au stress hydrique.
En plus de l’alternative que constitue le dessalement, des participants à la rencontre ont également appelé à poursuivre la politique de la construction des barrages. Et ce, en défiant deux facteurs qui sont, a priori, de nature à décourager la poursuite de cette politique, souligne Moncef Ziani.
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Le premier est la récurrence de la sécheresse. En fait, explique-t-il, même en période de sécheresse, des inondations peuvent survenir. Dans ce cas, un barrage servira à la fois à protéger les régions exposées à ces crues et à retenir les volumes d’eau qu’elles apportent au lieu de leur déperdition dans la mer, précise-t-il.
Le deuxième facteur est le fait qu’il ne reste globalement que des «sites à problème», où la construction de ces infrastructures coûte deux fois plus cher, alors que les sites favorables ont déjà été utilisés à cet effet il y a plus de 15-20 ans, ajoute Moncef Ziani.
De même, lors de cette rencontre, il a été souligné le rôle important de l’interconnexion entre les bassins hydrauliques, appelée autoroutes de l’eau, qui vise à détourner les eaux des bassins où elle est excédentaire vers des bassins déficitaires.