C’est en France que VelyVelo a vu le jour en 2017 sur le papier. Trois ans plus tard, cette start up fondée par trois Franco-Marocains se lance dans le bain en pleine pandémie du Covid-19. Une folie? Un peu, oui, car il en faut bien un brin pour se lancer dans l’entreprenariat. Un acte irréfléchi? Loin de là, à en croire le développement fulgurant de cette jeune entreprise aux grandes ambitions.
Enfin, dernière actualité en date, la nomination parmi les derniers 10 demi-finalistes d’Asmaa Chakir Alaoui à la 5e édition du Prix Business with attitude 2021 organisé par le magazine Madame Figaro, qui entend mettre en lumière et accompagner les créatrices d’entreprises innovantes et engagées.
Le360 vous présente l'expansion de cette start up, avec Asmaa Chakir Alaoui, sa CEO.
Velyvelo, c’est quoi?VelyVelo propose un concept sur-mesure de location longue durée de vélos à assistance électrique, accompagné d'un service complet pour les professionnels allant de l'assurance à la réparation en passant par la formation. C’est ainsi pour répondre aux besoins suscités par l’explosion des commandes de repas à domicile et l’essor des plateformes de livraison urbaine que VelyVelo propose des véhicules rapides et maniables, pour s’insérer facilement dans la circulation dense de la ville, mais aussi et surtout robustes, afin de tenir la route sur plusieurs centaines de kilomètres parcourus par semaine.
L’entreprise s’adresse à une large cible de clients allant des professionnels de la livraison à tous les professionnels qui souhaitent se déplacer en milieu urbain en adoptant une mobilité douce et efficace. On pense ainsi aux artisans, aux infirmières libérales, aux agents immobiliers mais aussi aux particuliers pour leurs trajets domicile-travail. A l’heure actuelle, VelyVelo compte ainsi parmi ses plus gros clients en France, les plateformes de livraison Uber Eats, Deliveroo et Just Eat.
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Côté tarifs, le vélo supplante le traditionnel scooter thermique avec un tarif de 50 à 100 € par mois, assurances, réparations et dépannage inclus et côté chiffres, la start up compte déjà 600 vélos, 3 millions de kilomètres parcourus et 100 tonnes de CO2 économisés.
Vous faites partie des dix demi-finalistes du Prix business with attitude 2021. Que représenterait pour vous l’obtention de ce prix?Ce prix me tient particulièrement à coeur car il met à l’honneur l’entreprenariat féminin tout en ciblant des projets à la fois audacieux et engagés, chose qui fait sens pour moi car je trouve cela important, en cette période de crise, de ne pas parler que de rentabilité mais aussi d’engagement.
Je suis aussi très attachée à cet évènement car il y a quelques années encore, je faisais partie des équipes de EY (cabinet d'audit financier et de conseil) qui co-organisent le prix avec Madame Figaro, et je me rappelle encore de moi en train de faire passer les entretiens aux candidates. Et puis quelques années plus tard, me voilà de l’autre coté de la barrière. Enfin, je suis surtout très honorée de figurer aux côtés d’entrepreneures très inspirantes.
Etre une jeune entrepreneure en France aujourd’hui implique-t-il de relever des défis en particulier?Je trouve que la question se pose de manière globale et pas seulement à l’échelle de la France. Etre une femme entrepreneure est très compliqué et dans le secteur de la mobilité encore plus car c’est un secteur très masculin.
Les femmes sont malheureusement très peu représentées dans le monde entrepreneurial, peut-être par peur, parce qu’effectivement ce n’est pas facile de sortir de sa zone de confort et d’aller vers le monde de l’entreprenariat.
J’aimerais voir plus de femmes avoir l’audace de se lancer dans des projets auxquels elles croient et pas de les faire porter par des hommes. Toutefois, force est de constater qu’être entrepreneur, que l’on soit un homme ou une femme, est compliqué en soi, car il faut trouver les partenaires adéquats et les financements qu’il faut.
L’activité de votre entreprise, créée en 2017, a été lancée en pleine pandémie. Comment expliquez-vous son essor en période de crise?La crise, en dépit de toutes les difficultés qu’elle engendre, a été une vraie opportunité pour VelyVelo car, si malheureusement le monde a été mis à l’arrêt, les livraisons des repas à domicile ou des colis issus du e-commerce ont quant à elles beaucoup progressé.
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Cette belle croissance de la livraison nous a donc profité et à vrai dire la crise nous a fait l’effet d’un vrai coup d’accélérateur avec l’emergence également des «Coronapistes» (aménagements cyclables provisoires créés lors de la pandémie de Covid-19 en 2020 dans le but de fluidifier la circulation urbaine, décongestionner les transports publics, favoriser le respect des distances de sécurité et encourager un mode de transport décarboné). Outre le succès de la livraison, on constate aussi depuis deux ans un élan vers les mobilités douces.
Pensez-vous qu’il y aura un avant et un après covid pour le secteur de la restauration/livraison? Autrement dit, dans quelques mois, pensez-vous que les livraisons auront toujours autant la cote qu’en ce moment? Si oui, pourquoi?Je ne pense pas que cet essor de la livraison ne soit qu’un effet de mode lié à la crise car celle-ci nous a appris à revoir certains modèles économiques, notamment celui de la restauration. Aujourd’hui, pour avoir le même niveau de chiffre d’affaires qu’avant la crise, les restaurateurs doivent gagner en créativité et intégrer dans leur activité de base la livraison et la formule «à emporter». Cela est d’autant plus nécessaire qu’on ne sait pas jusqu’à quand on devra continuer à respecter des mesures de distanciation et de limitation du nombre de tables dans les restaurants.
Le bon sens voudrait donc que cette croissance se poursuive dans le temps.
Quelle est la clé de votre succès en quelques mots?Ce qui est chouette avec VelyVelo, c’est qu’on propose une solution écologique et économique. Et c’est pour ça que ça marche. On promet à nos clients de réduire de 50% leurs coûts et d’avoir une démarche éco-responsable. C’est un business qui a donc su profiter de la crise mais qui a aussi permis aux gens de prendre conscience de la nécessité de changer de véhicules et de gagner en développement durable.
Est-ce que l’écologie était le point de départ de votre entreprise et d’après vous, une démarche éco-responsable peut-elle être associée à un business rentable?Non, à vrai dire, l’écologie n’était pas le point départ de la création de VelyVelo. Il s’agissait plutôt d’une histoire de coûts et de performances.
Nous sommes partis du constat qu’un scooter thermique est très coûteux en termes de carburant, d’assurance, de pièces détachées et de réparation. Tout cela représente environ 5% du chiffre d’affaires d’un restaurateur et l’idée était donc de réduire ces coûts avec l’usage d’un vélo électrique. Pour vous donner un ordre d’idée, un scooter thermique coûte à l’entreprise 250 euros par mois alors qu’un vélo ne représente que 100 euros par mois de charges.
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Outre les économies, nous nous sommes aussi penchés sur la question de la performance. Aujourd’hui, dans une agglomération bondée, le vélo est plus rapide qu’un scooter parce qu’il peut emprunter les voies de bus, les pistes cyclables, et prendre en sens inverse les rues limitées à 30 km/h. Sans compter qu’en moyenne, un vélo a une vitesse de 18 km/h contre 15 km/h pour un scooter.
La question écologique a couronné le tout car notre démarche épousait parfaitement un concept éco responsable qui est d’ailleurs devenu depuis l’ADN et le leitmotiv de Vely Velo.
Pourquoi aujourd’hui est-il important selon vous d’être une entreprise éco responsable?Je conseille vivement aux investisseurs et aux entrepreneurs de se consacrer à tous les sujets qui tournent autour du développement durable parce que c’est l’avenir.
Nos villes vont se transformer, notre quotidien aussi et il faut qu’on accompagne cette transformation. On ne peut pas continuer à afficher les mêmes niveaux de consommation que ces dernières années et cette crise sanitaire nous a amené à réfléchir à notre mode de consommation et à la manière dont on pense la ville. Cette réflexion là relève aujourd’hui de l’urgence et de la nécessité de repenser tout notre écosystème afin de le rendre plus durable dans le temps.
Des projets de développement en France et au Maroc?Après deux ans de recherche et de développement, de prototypage, et donc d’activité qui ne génère pas de chiffre d'affaires, car nous avons monté ce projet de toute pièce avec des fonds propres, je suis très heureuse qu’on ait pu faire une levée de fonds à la hauteur de nos espérances et de l’ordre de 600.000 euros. Cela nous a permis de continuer à nous déployer, de nous développer dans d’autres villes en France, avec l’ouverture d’un hub à Lyon il y a quelques jours et d’un prochain à Bordeaux, le 3 mars.
Nous considérons aussi sérieusement le marché marocain qu’on devait déjà appréhender depuis septembre 2020 mais avec la crise, nos projets ont été ralentis. Nous comptons toutefois pouvoir bientôt proposer notre solution innovante au Maroc, d’autant que le pays est précurseur sur des sujets de développement durable et d’énergie verte. Et puis, nous avons aussi la chance d’être accompagnés par le groupe Akwa car notre entreprise fait partie du programme Fifty sprints (programme visant à accélérer et accompagner les startups marocaines avec des projets innovants à fort potentiel de croissance sur le plan national et international).
Quels seraient les conseils que vous pourriez donner à de jeunes entrepreneurs qui craignent de se lancer en cette période difficile?Croire en son projet, être persévérant car c’est un long process, qui est aussi épuisant et qui peut rebuter, de fait, beaucoup de gens. Mais à mon sens, le vrai impératif est de trouver les bons partenaires et les bons associés. Il faut que l’équipe qui crée la start up soit complémentaire et qu’elle partage la même vision de la stratégie à mener.