Ce que risque le Maroc en suspendant ses exportations agricoles vers l’Afrique subsaharienne

A présent sécurisé, le passage frontalier d'El Guerguerat sera doté d'une zone logistique de distribution et de commerce.

Des camions au niveau du passage frontalier d'El Guerguerat.. MAP

Revue de presseEn suspendant ses exportations agricoles vers les pays d’Afrique subsaharienne afin de préserver l’approvisionnement du marché local, le Maroc met en danger un positionnement installé depuis des années et tout un écosystème. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Eco.

Le 27/02/2023 à 20h58

Pour pallier toute pénurie de produits alimentaires et une nouvelle flambée des prix, le gouvernement a suspendu les exportations marocaines des fruits et légumes vers le marché africain. Mais est-ce une bonne décision? C’est la question à laquelle le quotidien Les Inspirations Eco tente de répondre dans son édition du mardi 28 février. La réponse est non.

Techniquement, le volume des exportations a baissé à hauteur de 70% suite à cette décision. Au lieu d’une centaine de camions qui franchissent la frontière, ce ne sont plus qu’une trentaine actuellement qui font la traversée.

«A en croire des spécialistes, le moment n’est aucunement opportun pour instaurer de telles mesures, car cela va à l’encontre des efforts fournis par le Maroc pour décrocher une position aussi confortable», souligne le quotidien, citant Mohamed Bajeddi, agro-économiste et consultant international. Pour lui, arrêter d’exporter d’une façon aussi impromptue représente une aubaine pour des concurrents qui ne demandent qu’à ce que le Maroc soit écarté de leur chemin et plus particulièrement en Afrique. «A mon sens, c’est du suicide surtout qu’il s’agit d’une situation temporaire», prévient-il.

La décision est d’autant plus injustifiable que le pays a besoin d’exporter et de drainer de la devise. «Cette décision de suspendre les exportations ne mettra pas seulement en danger l’image que le Maroc s’est construite avec abnégation, elle perturbera également l’écosystème», ajoute Les Inspirations Eco. A commencer par les transports routiers. «Le secteur compte bien des transporteurs qui ne desservent que l’Afrique. Ces derniers subiront l’impact de plein fouet», précise Rachid Tahri, secrétaire général de la Fédération du transport et de la logistique. Pour l’heure, aucune mesure pour atténuer l’impact n’a été instaurée.

Pour rappel, la même mesure pour l’exportation de la tomate, prise l’année dernière, a perturbé toute la filière et des producteurs ont même délaissé la culture. Pour les transporteurs, «la décision est tombée comme un couperet. Nous n’étions pas avertis et il n’existe aucun document officiel…De plus, il n’est pas normal que nous atteignions un tel niveau de prix alors que le Maroc dispose de plans comme Maroc vert et Génération green», s’indigne Mohamed Zamrani, président par intérim de l’Association marocaine des exportateurs en Afrique et à l’étranger (AMEP Afric).

A préciser que les exportateurs marocains ont reçu le soutien de l’Union nationale du patronat mauritanien et de la Fédération du commerce, lesquelles leur ont proposé de cultiver en Mauritanie leurs produits en mettant à leur disposition des terres agricoles, l’accès à l’irrigation et même les semences et les fertilisants. Il est prévu que des importateurs mauritaniens effectueront une visite officielle au Royaume pour étudier la proposition.

Par Nabil Ouzzane
Le 27/02/2023 à 20h58