Après la LPL, le Maroc entend mobiliser une LCM auprès du FMI: de quoi s’agit-il?

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Lors de son dernier point de presse, mardi 20 décembre 2022, le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, a fait savoir que le Maroc pourrait mobiliser une Ligne de crédit modulable (LCM) à partir du mois de mars prochain. Conditions d’admissibilité, commission de tirage, taux, etc. Voici tout ce qu’il faut en savoir.

Le 22/12/2022 à 14h32

Le mécanisme d’une Ligne de crédit modulable (LCM) a été conçu pour répondre à la demande de financement émanant de pays présentant une politique et des antécédents économiques très solides, explique une fiche technique du FMI.

Cet instrument s’inscrit dans le cadre de la réforme engagée par le FMI pour modifier les conditions auxquelles il accorde des prêts aux pays qui traversent des «difficultés de trésorerie». A ce jour, trois pays ont fait appel à la LCM (la Colombie, le Mexique et la Pologne), mais aucun d’entre eux n’a jusqu’ici effectué de tirage sur sa ligne de crédit. Selon le FMI, la LCM a pu fournir à ces pays une assurance précieuse et a aidé à renforcer la confiance des marchés en période d’accentuation des risques.

Les pays présentant des paramètres économiques fondamentaux et des antécédents de politiques économiques très solides peuvent postuler à la LCM dès qu’ils se trouvent confrontés à de réelles ou potentielles tensions sur leur balance des paiements. Grâce à son caractère modulable, la LCM permet au FMI de répondre aux besoins spécifiques de chaque pays, eu égard à la souplesse de ce mécanisme qui permet d’effectuer des tirages sur la ligne de crédit à tout moment pendant une période déterminée.

Contrairement à la LPL, la LCM assure aux pays admissibles l’accès immédiat à un montant élevé de ressources du FMI sans conditionnalité continue. Elle fonctionne comme une ligne de crédit renouvelable qui peut être ouverte pour un ou deux ans, avec réexamen des conditions d’admissibilité à la fin de la première année. Lorsqu’un pays décide de tirer de la ligne de crédit, le remboursement doit être effectué sur une période allant de 3 ans et un trimestre, à 5 ans. Le montant d’accès aux ressources du FMI n’est pas plafonné et le besoin de financement est évalué au cas par cas.

A quel coût? Le coût de l’emprunt au titre de la LCM est identique à celui de la LPL. Trois composantes forment la structure de ce coût (la commission d’engagement, le taux du prêt et la commission de tirage). En effet, lorsque le Maroc décide de faire appel aux ressources du FMI à titre de précaution, il verse une commission d’engagement qui lui sera remboursée au prorata s’il décide de tirer sur ces ressources pendant la période concernée. Cette commission d’engagement augmente selon le niveau d’accès disponible sur une période de 12 mois (15 points de base jusqu’à 115% de la quote-part, 30 points de base pour 115 à 575% de la quote-part, et 60 points de base pour plus de 575% de la quote-part).

A l’instar des autres accords avec le FMI, le taux du prêt comprend, d’une part, le taux d’intérêt des Droits de tirages spéciaux (DTS), qui est déterminé par le marché, et une marge (actuellement, 100 points de base), qui constituent ensemble le taux de commission de base, et, d’autre part, des commissions additionnelles, qui dépendent du montant du crédit et de la période pendant laquelle il reste impayé.

Une commission additionnelle de 200 points de base est versée sur un encours de crédit supérieur à 187,5% de la quote-part. Si l’encours du crédit reste supérieur à 187,5% de la quote-part après trois ans, la commission additionnelle passe à 300 points de base. Ces commissions additionnelles sont destinées à décourager l’utilisation des ressources du FMI à grande échelle et de manière prolongée.

Il faut compter également une commission de tirage de 50 points de base, appliquée au montant de chaque tirage.

Pour pouvoir bénéficier d’une LCM, le Maroc doit répondre à une série de conditions exigées par le FMI.

Celles-ci servent à mesurer la confiance du FMI dans la politique économique du pays et dans sa capacité à prendre des mesures correctives le cas échéant.

Le processus de qualification du pays membre repose sur la vérification des principes suivants.

• La solidité des fondamentaux économiques et du cadre institutionnel

• La fermeté continue de la politique économique, tant à l’heure actuelle que par le passé

• L’engagement pris par le pays de maintenir le même cap à l’avenir.

Outre l’évaluation très positive des politiques menées par le pays lors des plus récentes consultations au titre de l’article IV, les critères d’admissibilité d’un pays à la LCM sont les suivants.

• Viabilité de la situation extérieure

• Compte de capital dominé par des flux de capitaux privés

• Antécédents d’accès continu aux marchés de capitaux internationaux à des conditions favorables

• Situation relativement confortable des réserves au moment de la demande de LCM à titre de précaution

• Santé des finances publiques, et notamment viabilité de la dette publique

• Inflation maintenue faible et stable grâce à une saine politique monétaire et de change

• Absence de problèmes de solvabilité bancaire constituant une menace immédiate de crise bancaire systémique

• Contrôle efficace du secteur financier

• Intégrité et transparence des données statistiques.

Par Ayoub Khattabi
Le 22/12/2022 à 14h32