L’inégalité entre l’homme et la femme n’est pas innée ni naturelle.
L’éducation des garçons normalise la violence en en faisant un moyen viril de s’imposer verbalement et physiquement par la force.
Arrajèlle, l’homme, construit sa masculinité selon des normes de genre établies par la société qui lui attribue des rôles bien précis. S’il sort de ces normes, il est critiqué, méprisé et traité de femme: waliti mra (tu es devenu une femme) est la pire des offenses.
Un homme ne doit pas montrer ses émotions, considérées comme de la faiblesse. Au petit garçon, on interdit de se plaindre, de gémir, de pleurer. Willi nta machi mra (tu n’es pas une femme). On lui demande de se défendre et de défendre ses sœurs par ses muscles. Un garçon qui se laisse tabasser dans la rue par d’autres garçons, ou qui ne réagit pas violemment à des insultes adressées à lui ou à ses sœurs, est dévalorisé: khouwafe bhale labnate (peureux comme les filles). Adolescent et adulte, il s’entendra dire qu’il n’a pas de nafs (orgueil).
L’homme ne naît pas violent, on l’éduque à l’être. Les mères en sont grandement responsables!
À travers le monde, la violence faite aux femmes par les hommes est l’une des violations des droits humains les plus graves et les plus répandues.
Le Fonds des Nations unies pour la Population (UNFPA) et ses partenaires se sont mobilisés pour lutter contre cette violence masculine en lançant le concept de masculinité positive: sensibiliser les hommes à utiliser leur masculinité pour lutter contre cette violence et être acteurs des changements pour l’équité du genre.
La masculinité positive, arroujoula al ijabya, vise à ce que les hommes et ceux qui les éduquent développent d’autres manières d’être hommes, en luttant contre la masculinité toxique.
La masculinité toxique normalise et légitime l’agression et la violence à l’égard des femmes. À travers le monde, une femme sur trois est victime de violences de la part de son mari ou du partenaire intime!
Au Maroc, les associations travaillent depuis longtemps sur la masculinité positive, même si elle n’était pas nommée ainsi.
En 2020, un Marocain de 28 ans, Soufiane Hennani, a lancé une plateforme numérique, «Machi rojola» (Ce n’est pas ça être un homme), qui diffuse des vidéos pour lutter contre les agressions sexuelles, le harcèlement et la domination masculine.
Récemment, le ministère marocain de la Solidarité, en partenariat avec le Fonds des Nations unies pour la Population, a lancé une série de vidéos pour promouvoir la masculinité positive. Des hommes connus du grand public qui annoncent qu’un homme peut travailler au domicile sans que sa virilité n’en soit atteinte.
Par exemple, une vidéo où l’homme dit: «Je lave la vaisselle avec ma femme, des fois ensemble, des fois seul». Un homme en situation de handicap dit que dans les maisons où il y a des personnes en situation de handicap, ce sont toujours les femmes qui s’en occupent: la mère, la sœur ou la fille.
La réaction des internautes a été mitigée: certains apprécient la campagne. Pour d’autres, c’est une atteinte à leur virilité, une manière de féminiser les hommes et de les soumettre aux femmes.
Mais réfléchissons: quel mal y a-t-il à ce qu’un homme fasse des travaux ménagers? Pourquoi en sommes-nous arrivés à considérer que c’est honteux?
Le Prophète lui-même n’avait aucune gêne à participer aux travaux ménagers. Plusieurs hadiths rapportent que Aïcha, son épouse, affirmait que le Prophète, chez lui, «était au service de sa famille». «C’était un homme comme les autres, il nettoyait ses vêtements, trayait ses bêtes et s’occupait seul de sa propre personne». «Il cousait ses vêtements, réparait ses chaussures et faisait ce que font les hommes chez eux».
Dans plusieurs régions du Maroc, notamment au Sud, les hommes participent aux travaux ménagers. Ils font de succulents tajines, préparent le thé, passent le balai, servent les invités.
Aujourd’hui, avec la nucléarisation des familles, les jeunes époux participent aux travaux ménagers, surtout quand les épouses travaillent. C’est le concept de masculinités co-responsables. Ils participent aux tâches, s’impliquent dans l’éducation des enfants, les reçoivent de l’école et leur préparent à manger… N’oublions pas que les plus grands cuisiniers dans le monde sont des hommes!
On voit également des hommes, dans l’espace public, tirer des poussettes de leurs enfants ou porter le bébé sur la poitrine à l’aide d’un «kangourou».
Ces hommes enfantent des filles et souhaitent les voir grandir dans une société où les hommes ne violentent pas les femmes. Le harcèlement sexuel, si courant chez nous, fait partie de cette violence qui affecte la sécurité et le bien-être de nos filles.
La masculinité positive vise à engager les garçons et les hommes à œuvrer pour l’épanouissement et l’autonomisation des femmes, en les respectant et en dialoguant avec elles et non en les tabassant pour s’imposer.
Ce qui favorise l’harmonie basée sur la confiance mutuelle et non la méfiance.
Elle permet de lutter contre le viol, le sexisme, le harcèlement sexuel, la drague sauvage et toutes les formes de violence à l’égard des femmes.
L’objectif n’est pas de diminuer la valeur des hommes, mais de valoriser la masculinité en en faisant un levier de développement pour les femmes et pour les hommes.
Utiliser positivement sa masculinité, c’est avoir un comportement respectueux à l’égard des femmes, les considérer comme des êtres humains munis d’un esprit et pas seulement d’un corps sexuel… Sans jamais oublier que les hommes sortent des ventres des femmes.