Maâti Monjib parle de tout, sauf de l’essentiel. Répondre, ne serait-ce qu’une fois, à cette question: d’où vient l’argent qui a servi à acheter des biens immobiliers et fonciers enregistrés en son nom et au nom de sa sœur cadette? Une question directe à laquelle cet enseignant universitaire, passé maître dans l’art de louvoyer à travers les mots, se refuse de répondre.
Maâti Monjib affirme vivre de son salaire d’enseignant à l’université. Ce salaire, même pour le plus haut grade dans la hiérarchie des enseignants dans des facultés de sciences humaines, c’est à dire professeur de l’enseignement supérieur (PES), ne dépasse pas 26.000 dirhams nets par mois. Même si Maâti Monjib vivait comme un ascète, et en admettant même qu’il soit un PES, il n’est pas possible que ses revenus de salarié du ministère de l’Enseignement supérieur lui permettent d’acquérir les biens dont il dispose.
L’éditorialiste très bien informé de Chouf TV, Abou Wael Al-Riffi, a dressé la liste des biens acquis par Maâti Monjib. Mais pour bien comprendre les tenants et aboutissants de cette affaire, il convient de rappeler le fond du dossier avant d’énumérer les biens dont l’intéressé est propriétaire.
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Tout a commencé en 1990 quand Maâti Monjib a créé le Centre Ibn Rochd. Si l’objectif affiché de cette structure était de défendre la liberté d’expression, sa forme juridique laisse pour le moins pantois. Monjib a donné à cette association la forme juridique d’une entreprise. Ce qui n’est guère commun. L’objectif de cette monstruosité ou de cette ruse (c’est selon) était de se soustraire à tout contrôle de l’Etat, via le Secrétariat général du gouvernement, qui a pour obligation de vérifier le sort réservé aux financements étrangers qui atterrissent dans l’escarcelle des ONG nationales. La Sarl Ibn Rochd avait comme seuls actionnaires Maâti Monjib et sa sœur Fatéma.
Cette Sarl, aux activités non conformes à une entreprise, a fonctionné en toute impunité jusqu’en 2014, date à laquelle la Cour des comptes a commencé à regarder de plus près les subventions accordées aux ONG nationales, quelle que soit leur forme juridique.
Alerté, le fondateur du Centre Ibn Rochd dissout sa Sarl. Les fonds, eux, sont transférés sur les comptes de l’épouse et de la sœur de Monjib. Un joli pactole de plusieurs millions de dirhams.
Dans la liste des biens appartenant à Maâti Monjib et dévoilés par Abou Wael Al-Riffi, on trouve:- une maison à Harhoura, enregistrée à la Conservation foncière sous le numéro 38/13341.
- Un appartement au quartier de l’Agdal (à Rabat), d’une superficie de 168 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 66544/R.
- Un appartement à Benslimane, d’une superficie de 90 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro13677/25.
-Un terrain d’une superficie de 5.104 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 20321/25.
- Un terrain d’une superficie de 5.950 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 32512/25.
- Un terrain d’une superficie de 17.900 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 32075/25.
- Un terrain d’une superficie de 6.900 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 20579/25.
- Un terrain d’une superficie de 1.590 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéroـ/ 28495C.
- Un terrain d’une superficie de 2.135 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 15215/25.
- Un terrain d’une superficie de 307 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro ـ/68081C.
- Un terrain d’une superficie de 277 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro ـ/15127C.
Quant à Fatéma Monjib, l’associée de son frère dans la Sarl Ibn Rochd qui percevait des subventions de l’étranger, elle est propriétaire des biens suivants:- trois appartements à Benslimane, tous d’une superficie de 70 m2, et enregistrés à la Conservation foncière respectivement sous les numéros 27560/25, 27561/25 et 27559/25.
- Un terrain d’une superficie de 400 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro 18036/25.
- Un terrain d’une superficie de 795 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro ـ/ 28495C
- Un terrain d’une superficie de 307 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro ــ/68081C
- Un terrain d’une superficie de 138 m2, enregistré à la Conservation foncière sous le numéro ـ/15127C.
Il convient de préciser que Fatéma Monjib n’exerce pas d’activité rémunérée et que son mari est un travailleur journalier. Dès lors se pose la question, comment le professeur Maâti Monjib et son unique associée dans la Sarl Ibn Rochd ont acquis autant de biens immobiliers et fonciers, alors même que le premier est un salarié et la seconde sans emploi? C’est cette inadéquation entre les revenus déclarés par les intéressés et les biens dont ils disposent, dignes d’une personne qui fait de la promotion immobilière, qui a attiré l’attention de l’Unité de traitement du renseignement financier (UTRF) qui a saisi le Parquet, lequel a ouvert une enquête pour possible blanchiment de capitaux.
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Au lieu de se victimiser et de lancer des trémolos sur sa page Facebook et sur quelques médias étrangers, toujours prompts à brandir l’étendard du droit-de-lhommisme, même quand il s’agit de criminalité financière, Maâti Monjib devrait éclairer l’opinion publique sur cette question simple et directe: d’où vient l’argent qui a servi à l’achat de tant de biens enregistrés en son nom et au nom de sa sœur?
«Grève de la faim J’annonce que je suis obligé encore une fois d’entamer une grève de la faim pour protester contre... Publiée par Maati Monjib sur Dimanche 11 octobre 2020»
Le360, média souvent vilipendé par Maâti Monjib, reproduira fidèlement la réponse de l’universitaire sur les sources de financement de la liste des biens, dévoilés par Abou Wael Al-Riffi.
La grève de la faim de trois jours annoncée par Maâti Monjib survient au lendemain d’une autre révélation d’Abou Wael Al-Riffi. En effet, dans un éditorial publié hier, dimanche 11 octobre, sur Chouf TV, l’éditorialiste a reproduit une lettre, sous forme d’un ordre de mission, de «l’association marocaine de journalisme d’investigation» (AMJI, une structure créée en 2009 par Maâti Monjib). Cette lettre certifie que El Mustapha Kharbouch est «membre actif du bureau national d’AMJI» et le mandate, tout en prenant en charge ses frais de déplacement, pour participer au congrès international de journalisme d’investigation qui se déroulait du 8 au 11 octobre 2015 en Norvège.
Qui est El Mustapha Kharbouch? Un garçon terrible, déscolarisé prématurément, toxicomane, violent avec ses parents, et neveu de Maâti Monjib. La sœur aînée de Monjib l’a supplié de lui trouver une occupation. Ce dernier l’a enveloppé dans le manteau d’un militant des droits de l’Homme, doublé d’un journaliste d’investigation, et l’a envoyé en Norvège avec l’objectif d’augmenter le nombre des travailleurs clandestins en Europe.
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Cette anecdote a le mérite de nous éclairer sur la falsification des faits dont est coutumier Maâti Monjib. Son neveu, qui n’a jamais écrit deux phrases de sa vie, est devenu un éminent journaliste d’investigation, habilité à représenter le Maroc dans un congrès international. C’est ce mélange des genres, où l’argent en provenance de l’étranger passe dans l’escarcelle familiale et les membres de la famille partent à l’étranger grâce à des billets d’avion achetés par les fonds perçus et grâce à des documents falsifiés, qui accable Maâti Monjib et explique son refus de faire face à la réalité. Dans son déni des faits, l’intéressé a développé un immense talent à faire diversion. Participe de cette optique la grève de la faim de trois jours qu’il vient de décréter. Il est toutefois très peu probable que les enquêteurs de la BNPJ se laisseront détourner de l’origine des fonds qui ont permis à Maâti Monjib et à sa sœur cadette de devenir multipropriétaires.