Désolée de vous imposer un sujet violent, écœurant, pour dénoncer cette cruauté que subissent des millions de fillettes à travers le monde: l’excision et l’infibulation.
Pour l’excision, on coupe la totalité ou une partie du sexe féminin: clitoris, grandes et petites lèvres. L’ablation se fait à vif, par des femmes expertes, avec un couteau, sans anesthésie, sans hygiène, entraînant infections, hémorragies graves, problèmes urinaires, complications lors des accouchements, stérilité et décès.
L’infibulation, moins courante que l’excision, consiste à coudre l’entrée du vagin en laissant une petite ouverture pour le passage du sang des règles et de l’urine. Appelée aussi excision pharaonique, elle est souvent accompagnée de l’excision totale du sexe féminin.
L’opération est faite par des femmes, sauvagement, juste avant la puberté, pour protéger la virginité. La fillette est rouverte avec un couteau à la veille du mariage.
L’excision s’effectue dès la naissance, les premières années de la vie ou à la puberté. Mais aujourd’hui, dans les villes, elle s’effectue dans les 40 jours qui suivent la naissance et avant les 5 ans à la campagne.
Selon les croyances, les femmes non excisées sont impures. Les hommes refusent de les épouser.
Ces pratiques sont un moyen de contrôler le corps des femmes et leur sexualité: on ampute le plaisir sexuel qu’elles peuvent ressentir en se touchant, afin qu’elles n’aient pas de rapports sexuels avant le mariage. On tue son désir pour qu’elle reste fidèle à son mari.
Ces pratiques dateraient des pharaons (3.000 ans avant Jésus-Christ). Elles sont sacrées dans certaines cultures et considérées comme une obligation religieuse.
Ces mutilations génitales féminines concernent 31 pays: un peu en Asie, et surtout au Moyen-Orient, particulièrement en Irak, au Yémen, au Soudan et en Egypte.
Au Mali, au Soudan, en Érythrée, en Sierra Leone, en Guinée, en Somalie, à Djibouti, 4 filles sur 5 sont excisées. En Côte d’Ivoire et au Sénégal, le tiers des femmes seraient excisées.
Dans certains pays, ces pratiques n’intéressent que quelques régions. Dans d’autres, elles sont généralisées. En Égypte, le phénomène touche toutes les régions, toutes les classes sociales, les musulmans et les coptes, qui sont des chrétiens orthodoxes. Pourtant, ni le christianisme ni l’islam n’en parlent!
En 1998, des religieux de plus de 35 pays musulmans se sont réunis à l’université Al-Azhar, au Caire, pour condamner ces barbaries. L’Église orthodoxe copte l’a condamnée. Mais la tradition est tenace!
L’excision et l’infibulation sont un grand tabou. Dans les films égyptiens, dans lesquels plusieurs générations ont baigné, il n’y a jamais eu allusion à ces mutilations. Moi-même j’ai été stupéfaite en découvrant ces chiffres. Oum Kalthoum était excisée! Naoual Saadawi (1931-2021), grande féministe égyptienne, en a été victime. Elle en parle dans son livre «La face cachée d’Eve». Ces pratiques ont été interdites en Egypte en 2008, mais la loi ne sévit pas. L’Egypte reste l’un des pays où le nombre est le plus élevé.
Pire, 80% d’entre elles sont réalisées en milieu médical! Officiellement c’est pour éviter les infections. Mais cela prouve que l’habitude reste bien enracinée dans les mentalités.
Au Maghreb, l’excision n’existe ni en Lybie, ni en Tunisie, ni en Algérie, ni au Maroc. Mais elle fait partie des traditions de plusieurs régions en Mauritanie. Considérée comme un rite de purification, elle permettrait une meilleure hygiène.
Pour lutter contre ces mutilations, la majorité des pays concernés a élaboré depuis 1965 des législations avec une pénalisation, qui n’est pas toujours appliquée. Une diminution de ces pratiques est notée, mais elle est timide et varie de pays en pays.
L’infibulation est en baisse et l’excision diminue avec l’instruction des femmes: plus les mères ont un niveau d’instruction élevé, plus elles protègent leurs filles. Elles restent plus courantes en milieu rural.
Mais la pénalisation du phénomène a fait apparaître des «mutilations légères», comme en Mauritanie: une entaille dans le clitoris, sans ablation totale, pour le rendre insensible.
Pour contourner la loi, on procède à la méthode appelée mounas. On applique sur le clitoris une gomme végétale issue d’un arbre résineux. L’effet corrosif de la gomme atrophie le clitoris comme par une brûlure et le rend insensible.
En Mauritanie, la moitié des fillettes de moins de 14 ans sont excisées, de même que 67% des femmes de 15 à 49 ans!
L’excision reste un problème universel puisqu’elle continue d’être pratiquée même par des populations immigrées dans les continents américain, australien et européen.
En France, les mutilations génitales sont punies de 10 ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende, qu’elles soient effectuées en France ou dans les pays d’origine. Mais la pratique s’exerce secrètement. Parfois, ce sont les grands-parents, vivant en France ou ailleurs, qui volent la fillette pour la mutiler, même si les parents sont contre.
En France, chaque année, 124.000 filles sont excisées! Dans le monde, chaque minute, 4 filles sont excisées.
Le 6 février a été la Journée internationale contre les mutilations génitales féminines.
Plusieurs organismes internationaux militent pour l’élimination de ces mutilations. Les Nations unies fixent 2030 pour mettre fin à ces barbaries. Dans tous les pays concernés, des associations font des campagnes de sensibilisation.
Des médecins bénévoles reconstituent la partie du sexe coupée, pour redonner de la dignité à ces victimes, massacrées pour préserver la domination masculine.