J’adore l’aéroport Mohammed V de Casablanca. C’est le plus grand du Maroc, peut-être aussi du Maghreb. Mais ne le dites pas à nos frères algériens, qui auraient trop le seum…
Cet aéroport est la première interface et le premier contact pour toutes ces personnes venues du monde entier et qui découvrent le Maroc. Vous imaginez? C’est d’ailleurs vers cet aéroport que sont souvent dirigés les envoyés de la FIFA, qui supervisent le suivi du Mondial 2030. Entre autres. Voyez-vous, cet aéroport est un petit Maroc, une façade, une vitrine, un tout ce que vous voulez. Et c’est très, très bien comme ça.
Mais ça, mes amis, c’est pour les données objectives. Pour ce qui est du subjectif, du personnel, et pour ainsi dire de l’essentiel, l’aéroport représente à mes yeux ce petit baromètre qui me rappelle d’où je viens, ma réalité… Je le dis souvent à mes amis, cet aéroport ressemble à ce «réveil» à l’ancienne, archaïque, mais ultra efficace: il vous réveille brutalement et sans ménagement aucun. Il vous rappelle à l’ordre!
Me voilà donc de retour dans ce petit Maroc, après un long courrier de nuit. Il est minuit passé, il pleut des cordes dehors, l’aéroport est vide, presque fantôme. À notre arrivée, les guichets de la police aux frontières reviennent à la vie. Mais il y a un «mais». Les deux guichets ouverts sont pris d’assaut par les passagers. Juste à côté, derrière une petite séparation, deux guichets réservés à la «business class» attendent des passagers qui ne viennent pas.
Nous avons donc deux guichets «inondés» et deux autres absolument libres. Que faut-il faire alors? Vous connaissez sans doute la réponse: il faut transvaser, c’est-à-dire ouvrir tous les guichets à tous les passagers. Simple comme bonjour. C’est pourtant impossible!
«Pourquoi vingt dirhams et pas deux? Pourquoi payer pour se faire rembourser quelques mètres plus loin? Comment faire quand on n’a pas d’argent? À quoi devait penser celui qui a décrété qu’on devait payer pour un tel “service”?»
J’ai demandé autour de moi et on m’a conseillé de rester à ma place, parmi le «peuple». Quelqu’un m’a dit: «Vous n’aviez qu’à acheter un billet en première ou en business class!». J’ai répondu que la question n’était pas là et que si tout le monde, policiers et passagers, souhaitait quitter rapidement les travées de cet aéroport fantôme, il n’y avait qu’à ouvrir tous les guichets. De toute façon, il n’y avait aucun passager en «classe affaires».
Rien à faire!
Un peu plus tard, au moment de récupérer mes bagages, un employé vient s’interposer entre moi et le chariot que je tente de tirer. «Il faut payer monsieur, c’est 20 dirhams!». Pardon? L’employé m’explique que je peux régler en devises si je le souhaite. Le principe consiste à payer, marcher une centaine de mètres dehors et aller remettre le chariot afin de récupérer sa mise de 20 dirhams. Mais… pourquoi?
Pourquoi vingt dirhams et pas deux? Pourquoi payer et se faire rembourser quelques mètres plus loin? Comment faire quand on n’a pas d’argent? À quoi devait penser, exactement, celui qui a décrété que les passagers devaient payer pour un tel «service»?
Imaginez le tableau: des dizaines de chariots immobilisés font face à des dizaines de passagers qui trainent leurs lourdes valises jusqu’à la sortie. Voilà, c’est tout.