Les yeux rivés sur le ciel, Karim guette du haut d’une bosse l’atterrissage d’un Boeing 737 sur le tarmac de l’aéroport de Marrakech. «Dans 2 minutes, c’est un appareil de la British Airways qui entamera sa descente finale», lâche cet amateur d’engins volants en consultant son application de tracking de vols. C’est ici, au bord d’une route des plus fréquentées de la ville, le long du mur de clôture de l’aéroport, non loin du quartier Mhamid qu’une communauté de passionnés se retrouvent régulièrement en fin de journée, pour assister au bal spectaculaire des avions.
Mais à la tombée de la nuit, plus personne ne traîne dans les parages. En cause, l’absence d’éclairage sur ce lieu qui se situe pourtant sur une route stratégique faisant la jonction entre deux quartiers peuplés de Marrakech, Mhamid d’une part, Socoma et Massira de l’autre.
En plus du manque patent d’entretien des voies de circulation dont pâtit cette zone de la ville, l’absence d’éclairage public est source d’insécurité chronique. Cette route connaît, en effet, une intensification sans précédent des actes de délinquance. «Il ne se passe pas un jour sans qu'il y ait des agressions sur cette route», témoigne Soufiane, usager régulier, victime d’une agression physique il y a quelques mois.
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Ce n’est pas sans raison que toutes les agressions se déroulent à la tombée de la nuit. Ici, il fait tellement noir le soir, qu’il est difficile pour celui qui étend sa main de la distinguer de l’obscurité. Les motocyclistes, premières victimes de ces actes d'agressions, avouent y aller la boule au ventre.
En effet, sur les quelques descentes sporadiques effectuées sur le terrain, nous avons assisté à deux agressions. La dernière en date, celle d’une femme enceinte de 4 mois conduisant une moto et à qui on a violemment arraché le sac. Sous le choc, elle n’a pas souhaité livrer son témoignage.
En cela, les scénarios d’agressions racontées par les témoins dénotent d’un même modus operandi: les agresseurs agissent souvent en binôme, l’un est censé attirer la victime dans un guet-apens, tandis que l’autre intervient en frappant violemment d’un coup de pierre ou en faisant usage d’une arme blanche.
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Le manque d’entretien de la route justifie également la présence des agresseurs. En plus des quelques hectares d’oliviers, où disparaissent souvent les assaillants, il y a lieu de noter l’existence de fossés qui font office de tranchée.
Un vrai cauchemar pour les habitants des quartiers limitrophes, les plus touchés par l’absence d’éclairage public. «Nous avons sollicité à mainte reprises les autorités compétentes, en vain… Pourtant, nous avons vraiment besoin d’éclairage, ici. Les gens subissent des vols tous les jours, et une dame y a même laissé la vie», se désole Ismaël, président d’une association d’un quartier voisin.
Cette zone immense délaissée creuse le fossé de l’insécurité entre les quartiers de Marrakech. Il existe pourtant une présence policière près de la zone réservée au fret aérien, mais qui ne peut, visiblement, assurer la sécurité de ce vaste territoire.
Par ailleurs, une rumeur colportée par les habitants, selon laquelle le non-rétablissement de l’éclairage est probablement due à la proximité de l’aéroport, justifie le maintien du statu quo.