Le campagne d’invisibilisation, dont font l’objet les victimes présumées des journalistes Omar Radi et Souleimane Raissouni, fait actuellement rage. Les participants à cette campagne occultent souvent d’accorder un minimum d’intérêt aux deux plaignants, respectivement Hafsa Boutahar, qui accuse de viol Omar Radi, et Adam Muhammed, qui affirme avoir été sexuellement agressé par Souleimane Raissouni.
C’est le cas de Hassan Aourid, ancien wali et chercheur, auteur de plusieurs ouvrages, qui s’est exprimé au micro du site d’information arabophone Lakoum pour exprimer son soutien aux deux journalistes, placés en détention préventive et qui ont entamé il y a plusieurs jours une grève de la faim. Si Hassan Aourid a rappelé à juste titre que Omar Radi et Soulaimane Raissouni ont droit à un procès équitable, d’autant que selon lui «le Maroc a pris un virage courageux il y a 20 ans en faveur de la liberté d’expression, du respect des droits humains», celui-ci a pourtant décidé de faire complètement abstraction des chefs d’accusation qui pèsent sur les deux hommes, minimisant ainsi les charges retenues par la justice marocaine.
Appelant à leur remise en liberté provisoire, Hassan Aourid tient alors à justifier cet appel en rappelant que «le journalisme n’est pas un crime», ou encore que «l’audace n’est ni une trahison ni une désobéissance», que «la société moderne ne peut être sans liberté d’expression»,ait et enfin que «le Maroc a besoin de tous ses enfants»… Autant de vérités, ou plutôt d’évidences, qu’énonce ici Hassan Aourid. Toutefois, en égrenant ces punshlines en guise de plaidoyer, celui-ci situe les deux affaires sur un terrain bien particulier, celui de la liberté d’expression et de la presse, présentant ainsi les deux hommes comme des prisonniers d’opinion, alors que ceux-ci font l’objet d’accusations de viol.
Bien qu’il ait rappelé que les deux hommes actuellement en détention préventive ont droit à un procès juste et équitable, Hassan Aourid ne semble pourtant pas accorder ce même droit aux victimes présumées, lesquelles brillent par leur absence dans son discours. Faut-il y voir un oubli ou une volonté d’occulter totalement la probabilité de la culpabilité de ces deux hommes dans les faits qui leur sont reprochés?
Du côté de Hafsa Boutahar et d’Adam Muhammed, qui accusent Omar Radi et Souleimane Raissouni de viol, l’heure est à l’indignation. «Je ne comprends vraiment pas cette obstination et cette insistance à faire de mon affaire une question politique et à faire valoir la profession de l'accusé dans le dossier», s’insurge ainsi Adam Muhammed dans un post publié sur son compte Facebook en réaction à l’intervention de Hassan Aourid.
Adam Muhammed dénonce ainsi la volonté de «créer une propagande "ratée" visant la communauté internationale», tout autant que la politisation d’une affaire «sur son dos». Réagissant à l’appel de Hassan Aourid à faire preuve de sagesse afin d’«arrêter cette absurdité», Adam Muhammed, l’interpelle: «n'y a-t-il pas parmi vous des personnes qui ont "supposé", ne serait-ce qu'une fraction de seconde, qu'il y avait une victime qui a souffert de l'exclusion et de la persécution des droits-de-l'hommistes?».
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Hafsa Boutahar, victime présumée de Omar Radi, a quant à elle choisi de répondre en vidéo à Hassan Aourid. Elle dit avoir été «stupéfaite» en découvrant les propos tenus par l’écrivain. Dénonçant les contre-vérités qu’il y formule, la jeune femme rappelle qu’en défendant les droits des deux journalistes, Hassan Aourid ne lui accorde, à elle, aucun droit. Et de condamner cette nouvelle tentative de ramener son affaire à une question de liberté d’expression.
«Il est de mon droit de porter plainte contre tout individu qui porterait atteinte à ma dignité quand bien même celui-ci serait journaliste», martèle-t-elle, disant avoir confiance en l’indépendance d’une justice qui, espère-t-elle, fera respecter ses droits.