Israël établit un lien entre la reconnaissance du Sahara marocain et la tenue du Forum du Néguev

Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, et le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita, lors du Sommet du Néguev, le 28 mars 2022 en Israël.. JACQUELYN MARTIN / AFP

Le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen a affirmé, ce lundi 3 juillet, que son pays se prononcera définitivement sur la marocanité du Sahara lors du prochain Forum du Néguev, dont l’organisation est prévue au Maroc et qui a été maintes fois reporté, notamment à cause de la situation inflammable dans les territoires palestiniens.

Le 03/07/2023 à 12h05

La reconnaissance par Israël de la marocanité du Sahara est liée à la tenue du Forum du Néguev, dont l’organisation au Maroc a été maintes fois reportée. C’est en substance ce qu’a affirmé, ce lundi 3 juillet, le ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen. «Nous travaillons actuellement sur cette question et notre plan est de rendre publique notre décision finale au Forum du Néguev», a déclaré le chef de la diplomatie israélienne devant des médias, rapporte l’agence Reuters, soulignant qu’il s’attend à ce que l’événement se déroule finalement en septembre prochain.

Par cette sortie, Eli Cohen semble répondre à son homologue marocain Nasser Bourita. Pour ce dernier, le Maroc est disposé à accueillir la deuxième édition du Forum du Néguev à la rentrée, mais espère pour cela que le contexte politique sera favorable.

Dans l’attente d’un «contexte favorable»

S’exprimant le vendredi 23 juin à Rabat, lors d’un point de presse à l’issue de ses entretiens avec le chef du Département fédéral suisse des Affaires étrangères, Ignazio Cassis, le ministre des Affaires étrangères a dit souhaiter que «le contexte sera favorable à la tenue de cet évènement important d’une part, mais aussi à ce qu’il produise des résultats, d’autre part». Le chef de la diplomatie marocaine a expliqué qu’il y avait des tentatives pour organiser ce Forum durant l’été, mais malheureusement, des problèmes d’agenda et de dates ont empêché sa tenue, évoquant le contexte politique qui pourrait empêcher cette réunion de produire les résultats escomptés.

Lors du même point de presse, Nasser Bourita a affirmé que le Maroc, dont le roi Mohammed VI préside le Comité Al Qods, réitère son rejet des violations et agissements unilatéraux israéliens dans les territoires palestiniens. Le Royaume dénonce ainsi les récentes attaques israéliennes sur la ville de Jénine, en Cisjordanie, qui ont fait plusieurs victimes et blessés et exprime la solidarité totale du Maroc avec le peuple palestinien. «Le Royaume rejette aussi la récente décision du gouvernement israélien d’expansion des colonies en Cisjordanie et note avec satisfaction les réactions internationales refusant la politique israélienne de colonisation», a ajouté Bourita.

Une position constante sur la question palestinienne

La reconnaissance par Israël de la marocanité du Sahara a été évoquée à plusieurs reprises. La ministre israélienne des Transports, Miri Regev, y avait fait référence le 31 mai dernier à Rabat. En visite officielle, le président de la Knesset, Amir Ohana, a été encore plus explicite, en déclarant que son pays «devrait aller vers une reconnaissance du Sahara marocain», que «des discussions sérieuses entre (les) deux gouvernements sont en cours» et qu’il croit que «le Premier ministre Netanyahou annoncera sa décision dans un avenir proche», rappelle le politologue Mustapha Sehimi.

Mais «c’est sans doute mal appréhender la diplomatie du Royaume que compter sur un infléchissement de ses positions, en particulier pour ce qui est de la question palestinienne. La solidarité du peuple marocain est totale. Les principes défendus par SM Mohammed VI, président du Comité Al Qods, sont des constantes: un processus de règlement négocié sur la base de deux États avec Jérusalem-Est comme capitale de l’État palestinien», écrit-il dans une chronique publiée par Le360.

Le forum du Néguev repose sur une dynamique régionale profitable à tous les peuples de la région. En attestent les thèmes abordés: la sécurité alimentaire, l’éducation et la recherche. En somme, ce forum vise à transformer la vie des citoyens des pays qui y adhèrent par le truchement d’une coopération concrète et sectorielle. Il tend aussi, selon l’expression d’un diplomate marocain à «immuniser les accords avec Israël, en leur conférant un contenu, parce que les turbulences diplomatiques ne manqueront jamais».

Avec le changement de gouvernement en Israël, le Forum du Néguev est devenu un moyen pour amorcer une dynamique politique qui conduit à la désescalade. La tenue de son prochain sommet au Maroc est un levier pour la désescalade.

Une organisation régionale nommée «Amena PD»

En attendant, l’administration américaine a décidé la création d’un poste d’Envoyé personnel du Département d’État chargé du suivi des Accords d’Abraham, dont le Forum est une émanation, et nommé Daniel Shapiro à ce poste. La perspective globale est de mettre en place une plateforme de coopération multilatérale couvrant des secteurs comme la santé, l’économie, le changement climatique, l’eau et la sécurité. Le Forum du Néguev, appelé à changer de dénomination (probablement pour devenir «Amena PD», pour «Association des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord pour la paix et le développement»), sera une organisation régionale, avec une présidence tournante et un sommet annuel.

Par Tarik Qattab
Le 03/07/2023 à 12h05