Soudan du Sud: entre Dinka et Nuer une guerre qui n’en finit pas

Bernard Lugan.

ChroniqueUne fois l’indépendance obtenue en 2011, le nouvel État, qui prit le nom de Soudan du Sud, fut présidé par Salva Kiir, un Dinka; le vice-président Riek Machar étant, quant à lui, Nuer. Cependant, très rapidement, les Dinka durent faire face aux revendications des Nuer, ce qui déboucha sur une féroce guerre civile.

Le 08/04/2025 à 11h09

Le Soudan du Sud a obtenu son indépendance le 9 juillet 2011 à la suite de la partition du Soudan. Depuis, les deux principales ethnies du pays, à savoir les Dinka et les Nuer, s’affrontent.

En 2011, au terme d’une période transitoire de six années, un référendum a permis aux Sudistes de décider la sécession de l’État soudanais. Cette indépendance, obtenue après six décennies de lutte, ne marqua cependant pas la fin de la guerre au Sud-Soudan. En effet, plusieurs problèmes demeuraient. Le principal était que les Sudistes ne constituent pas un ensemble ethniquement homogène. La rivalité entre Dinka, Nuer, mais aussi Chillouk, était même une constante sur laquelle Khartoum allait jouer pour affaiblir le nouvel État dont la naissance privait le Soudan de 50% de ses revenus pétroliers. Le retour des réfugiés et des déplacés posa également d’énormes problèmes économiques, sociaux, sanitaires, etc.

Une fois l’indépendance de 2011 obtenue, le nouvel État, qui prit le nom de Soudan du Sud, fut présidé par Salva Kiir, un Dinka; le vice-président, Riek Machar, étant quant à lui Nuer. Cependant, très rapidement, les Dinka durent faire face aux revendications des Nuer, ce qui déboucha sur une féroce guerre civile qui dura de 2013 à 2018.

En plus de la rivalité séculaire opposant les deux peuples, le conflit était nourri par les souvenirs de la longue lutte pour l’indépendance qui dura des années 1950 à 2011. Le cœur du problème était que, durant ces six décennies, les combats avaient été essentiellement livrés par les Dinka, dirigés alors par John Garang, le leader emblématique du SPLA (Sudan People’s Liberation Army-Armée populaire de libération du Soudan). Quant aux Nuer, ils avaient changé régulièrement de camp, rejoignant tantôt les Dinka, tantôt épaulant les forces de Khartoum. De telles tergiversations avaient laissé des souvenirs «mitigés» aux indépendantistes dinka qui estimaient avoir seuls la légitimité pour gouverner le pays.

«La première guerre entre Dinka et Nuer se termina avec l’accord de paix de 2018, qui prévoyait le partage du pouvoir au sein d’un gouvernement d’union nationale. Mais, sur le terrain, la paix ne fut jamais véritablement respectée.»

Cette première guerre entre Dinka et Nuer se termina avec l’accord de paix de 2018, qui prévoyait le partage du pouvoir au sein d’un gouvernement d’union nationale entre le Dinka Salva Kiir, Président, et le Nuer Riek Machar, Vice-président.

Mais, sur le terrain, la paix ne fut jamais véritablement respectée. Le fragile accord de partage du pouvoir conclu en 2018 entre le président Salva Kiir, soutenu par les Forces de défense du peuple du Soudan du Sud (SSPDF), et son rival, le vice-président Riek Machar, vola en effet rapidement en éclats. Puis, au début de l’année 2025, les incessantes escarmouches se sont transformées en un nouveau conflit ouvert entre Dinka et Nuer. Le 4 mars dernier, une étape nouvelle a même été franchie quand un groupe de miliciens Nuer, se réclamant de l’Armée blanche, «proche» du vice-président Machar, a attaqué un camp militaire des SSPDF à Nassir, près de la frontière avec l’Éthiopie, entraînant de sanglantes représailles sur les populations civiles.

Cette nouvelle guerre a poussé des milliers de civils sur les routes de l’exil. Selon Nicolas Haysom, chef de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS), en raison de la reprise des hostilités, à la mi-mars 2025, plus de 63.000 personnes étaient ainsi réfugiées dans les provinces voisines ou en Éthiopie. Depuis, les affrontements n’ont pas cessé.

Par Bernard Lugan
Le 08/04/2025 à 11h09

Bienvenue dans l’espace commentaire

Nous souhaitons un espace de débat, d’échange et de dialogue. Afin d'améliorer la qualité des échanges sous nos articles, ainsi que votre expérience de contribution, nous vous invitons à consulter nos règles d’utilisation.

Lire notre charte

VOS RÉACTIONS

0/800