Meurtre d’un fidèle dans une mosquée en France: d’origine marocaine, le procureur confondu avec le meurtrier par un élu RN

Abdelkrim Grini, procureur de la République française à Alès.

Abdelkrim Grini, procureur de la République française à Alès.

Aveuglé par sa haine de l’islam, un ancien élu du Rassemblement national s’est empressé d’attribuer le meurtre d’Aboubakar Cissé, dans une mosquée d’Alès, à Abdelkrim Grini. Une grosse erreur que l’éditorialiste politique Patrick Cohen n’a pas manqué de corriger comme il se doit.

Le 30/04/2025 à 09h20

Le 29 avril, Patrick Cohen, éditorialiste politique sur les ondes de la radio RTL, a consacré sa chronique du jour à l’expression du racisme anti-musulman qui sévit en France et à ses conséquences. Pour illustrer ce cas de figure, le chroniqueur a pris pour point de départ le post publié sur X vendredi dernier, le 25 avril, par «un ancien élu breton du Rassemblement national, un compte suivi par 60.000 abonnés».

Il s’agit en l’occurrence de Christian Lechevalier, qui se décrit sur son compte X comme «gaulliste et amoureux de la France». L’homme n’en est pas à son premier méfait car en 2019, il était suspendu pendant un an de ses fonctions d’enseignant au lycée Bertrand d’Argentré de Vitré pour des tweets islamophobes et un comportement déplacé envers une élève.

Le post sur X de Christian Lechevalier, le 25 avril 2025.

Ainsi donc, l’ancien élu a récidivé en partageant cette fois-ci un article du site d’extrême-droite Français de souche consacré au meurtre d’Aboubakar Cissé, jeune Malien d’une vingtaine d’années, assassiné dans une mosquée d’Alès en commentant: «Près d’Alès, à la Grande Combe, Abdelkrim Grini a tué au couteau un autre fidèle en pleine mosquée!».

Et Patrick Cohen de s’attarder sur le titre apposé à ce post: «Directement du producteur au consommateur», sous-entendu «qu’ils s’entretuent», analyse l’éditorialiste.

Mais le fait est que «l’ex-élu RN a lu trop vite, ou en out cas trop vite pour ses préjugés racistes. Il a vu un nom arabe, il en a déduit que c’était celui du criminel, mais non. Abdelkrim Grini n’est pas le meurtrier, c’est le procureur», rétablit ensuite Patrick Cohen.

Du Maroc à la France, le beau parcours d’Abdelkrim Grini

Contrairement à Oliver H., le principal suspect dans le meurtre d’Aboubakar Cissé, Abdelkrim Grini n’est pas né en France, mais au Maroc.

«Il est sans doute le seul procureur de France à avoir été titulaire d’une carte de séjour pendant trois ans et demi jusqu’à sa naturalisation à 19 ans passés», rappelle ainsi Patrick Cohen dans son édito.

@france.inter

"Abdelkrim Gini n'est pas le meurtrier, c'est le procureur" [Édito politique, Patrick Cohen] Après le meurtre d’Aboubakar Cissé, un fidèle musulman, dans une mosquée du Gard, le procureur Abdelkrim Grini a dirigé les trois premiers jours d’enquête. Son nom a surgi dès vendredi après-midi sur le fil X d’un ancien élu breton du Rassemblement national… #sinformersurtiktok #apprendresurtiktok #justice

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Faisant le portrait du procureur de cette affaire qui cristallise les tensions entre les extrêmes politiques en France, Patrick Cohen revient en détail sur le parcours de cet homme de 54 ans, né au Maroc et qui a grandi à Montpellier dans le quartier populaire de la Mosson, cette cité que les locaux continuent d’appeler La paillade.

«A 20 ans, raconte-t-il, soit je mettais le feu aux discothèques qui me refusaient l’entrée, soit je faisais des études pour apprendre la loi et faire valoir mes droits», poursuit Patrick Cohen en citant Abdelkrim Grini. «Il a choisi la deuxième option, c’est comme ça qu’il est advenu avocat à 25 ans, il fait condamner ensuite des gérants de boites de nuit grâce à des testings avec constats d’huissier, et qu’il a fait évoluer la loi contre les discriminations».

Puis, il y a 15 ans, Abdelkrim Grini opère un tournant majeur dans sa carrière en quittant le barreau pour la magistrature tout en continuant de servir les mêmes causes, «d’abord comme substitut à Bobigny, puis comme procureur à Roanne et depuis un an, à Alès, où il a été saisi (…) de ce meurtre atroce, d’une sauvagerie inouïe», détaille Patrick Cohen.

«C’est un beau parcours non?», lance-t-il admiratif en conclusion de son portrait.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 30/04/2025 à 09h20