Le philosophe Michel Onfray à propos de l’Algérie: «On sait très bien que ce pays nous déteste depuis 1962»

Le philosophe français Michel Onfray, invité de Laurence Ferrari sur le plateau de l'émission La Matinale, sur CNEWS, mardi 30 août 2022.

Le philosophe français Michel Onfray, invité de Laurence Ferrari sur le plateau de l'émission La Matinale, sur CNEWS, mardi 30 août 2022. . DR

Quelques jours après la visite d’Emmanuel Macron en Algérie, le philosophe français Michel Onfray a réagi avec véhémence sur le plateau d’une chaîne française aux rapports qu’entretient la France avec le régime au pouvoir en Algérie, qu’il qualifie de «mafia».

Le 31/08/2022 à 14h00

Invité sur le plateau de l’émission La Matinale, animée par Laurence Ferrari, sur la chaîne française CNEWS, mardi 30 août 2022, le philosophe Michel Onfray n’a pas mâché ses mots s’agissant du récent déplacement du président Emmanuel Macron en Algérie.

Venu présenter son nouveau livre Puissance et décadence. Une politique de civilisation sur le plateau de La Matinale, Michel Onfray est revenu sur le déplacement d’Emmanuel Macron en Algérie, apportant son point de vue sur les relations qu’entretiennent Alger et la France.

La France rendue responsable d’une révolution ratéeDes rapports tant politiques qu’idéologiques que le philosophe a illustré à la lumière d’un passage de son nouveau livre dans lequel celui-ci écrit: «Nous allons couler parce que nous, Français, nous ne nous aimons plus, et que nous ne chérissons que ce qui nous salit, nous souille, nous corrompt, nous humilie, nous détruit».

S’appuyant sur cet extrait, Michel Onfray reproche ainsi au régime d’Alger de rendre responsable la France de tous ses maux et aborde le sujet de l’indépendance du pays, estimant qu’«ils n’ont rien fait de leur révolution», à quelques exceptions près que le philosophe énumère en deux points: «ils ont voilé les femmes et ils se sont effondrés intellectuellement».

S’appuyant sur le livre de Simone de Beauvoir, Tout compte fait, paru en 1972, Michel Onfray évoque «ces gens qui ont défendu le FLN et qui dix ans après l’indépendance nationale en Algérie, disent qu’on n’a pas aidé les Algériens à obtenir leur indépendance pour que les femmes soient voilées, qu’elles quittent l’école, que tout le monde se mette à parler arabe et que in fine, l’idéologie dominante, ce soit l’islamisme».

Ainsi, pour le philosophe, le problème de la France n’est pas tant l’immigration que l’Algérie elle-même. «On sait très bien qu’il y a un problème avec l’Algérie. Il n’y a pas un problème avec l’immigration. Il y a un problème avec l’Algérie parce qu’on les laisse tenir un discours fautif».

«On sait très bien que ce pays nous déteste depuis 1962», a-t-il poursuivi.

La mafia au pouvoir pointée du doigtEt ce problème algérien tient en un mot pour Michel Onfray, la «mafia» au pouvoir. «Je suis désolé, mais j’ai vu un peu la mafia là-bas et si ça ne se passe pas bien en Algérie -pauvre peuple algérien et vive le peuple algérien-, c’est parce qu’il y a une mafia. Et cette mafia, on s’en va lui demander pardon, lui présenter nos excuses, on va chercher des gens pour qu'ils écrivent l’histoire pour que le pouvoir puisse y trouver son compte», explique-t-il ainsi se souvenant d’un voyage effectué sur les traces de Camus en Algérie.

Alors qu’il écrivait un essai philosophique sur cet auteur (L'ordre libertaire, paru en 2012), Onfray se souvient avoir «découvert en allumant la télévision le soir à 20 heures que nous étions encore en 1960, que le FLN est là, fait toujours la loi et nous explique que si ça ne se passe pas bien en Algérie, c’est à cause des Français ».

Rebondissant par ailleurs sur la déclaration d’Emmanuel Macron invité par Abdelmadjid Tebboune en Algérie, dans laquelle le président français estime qu’«entre la France et l’Algérie, ce qui reste c’est une histoire de respect, et d’amitié, et j’ose, une histoire d’amour», Michel Onfray réagit avec véhémence en concluant qu’«une histoire d’amour, il (Emmanuel Macron) ne sait pas ce que c’est. Il n’a pas aimé, ce monsieur, pour parler d’amour entre ces deux pays où nous sommes dans la domination».

Plutôt que de parler d’amour, il convient davantage, pour Michel Onfray, de faire preuve de «virilité» afin de pouvoir composer avec la «fierté» du peuple algérien qui a une certaine conception de l’honneur et à qui il faut parler en lui disant qu’on va le «défendre contre sa mafia».

Et de conclure, «il y a de l’argent en Algérie, le problème ce n’est pas la France. Il y a une rente pétrolière, c’est même l’expression de M. Macron. Avec ce gaz et avec ce pétrole, ils auraient la possibilité de faire un pays florissant. Ce pays n’est pas florissant, ce n’est pas la faute aux Français qui ont quitté ce pays en 1962».

Par Zineb Ibnouzahir
Le 31/08/2022 à 14h00