Les défis qui attendent la finance participative au Maroc, selon Fitch Ratings

Banques participatives. DR

D’après l’agence de notation américaine, la finance participative doit surmonter plusieurs contraintes comme la faiblesse de son capital et l’offre limitée en produits pour poursuivre sa croissance au Maroc.

Le 17/03/2023 à 15h25

Le secteur de la finance islamique pourrait augmenter sa croissance au Maroc, à condition de lever certains obstacles qui entravent son développement. C’est ce que recommande Fitch Ratings, dans une récente note intitulée: «L’industrie marocaine de la finance islamique est naissante, et fait face à des défis clés».

D’après l’agence de notation américaine, «le potentiel de croissance à long terme du secteur de la finance islamique au Maroc est important, soutenu par la population majoritairement musulmane du pays». Elle «pourrait également contribuer à stimuler l’inclusion financière, car environ 56% de la population adulte du Maroc, n’avait pas de compte bancaire en 2021, selon la Banque mondiale, avec environ 19% de la population non bancarisée, citant des raisons religieuses comme un obstacle, soit parmi les plus élevés au monde».

Pour atteindre ce cap, le secteur devrait au préalable relever certains défis, comme la faiblesse de son capital. En effet, la finance verte ne pesait que 2,7 milliards de dollars fin 2022 et ne détenait qu’une part de marché de 2% en termes d’actifs. Un ratio inférieur à celui d’autres pays d’Afrique du Nord comme la Tunisie (5,1%), l’Egypte (4%), et l’Algérie (2,4%), selon le Conseil des services financiers islamiques, précise le rapport.

Selon Fitch, cet écart est principalement dû à la création récente de cette finance dans le Royaume qui remonte à 2017. Point positif: ces actifs qui ont augmenté de 20% en 2022, un rythme plus rapide que la croissance des actifs des banques conventionnelles estimée à 7,6%. L’Etat marocain souhaite relever ce taux, pour atteindre les 5% de part de marché d’ici 2024.

L’offre limitée de produits constitue également un frein majeur à la croissance du secteur. Pour le moment, seules les filiales islamiques des banques conventionnelles et des guichets islamiques proposent des services dans ce sens. «L’offre de produits islamiques est fortement concentrée sur les prêts hypothécaires murahaba (83% du total des financements à fin 2022). Cependant, la part des banques islamiques dans le total des prêts au logement était de 7,9% fin 2022, en hausse de 19,6% en glissement annuel, contre presque zéro en 2018. En comparaison, les prêts au logement conventionnels ont chuté de 1,5% au cours de la même période», souligne l’agence de notation.

Autre contrainte, et pas des moindres, l’insuffisance de liquidité. A en croire Fitch, les banques islamiques marocaines sont confrontées à des problèmes de liquidité, notamment en raison de la forte proportion des comptes non rémunérés qui représentaient 71% du total des dépôts du secteur à fin 2022. Ce qui limite l’intérêt des clients à placer des dépôts auprès de ces banques. «En 2020, la banque centrale (BAM, NDLR) a introduit le produit de dépôt Wakala Bil Istithmar, qui permet aux banques islamiques d’accéder aux liquidités des banques conventionnelles (y compris leurs sociétés mères) et d’autres entités, telles que celles du secteur public et les entreprises», rappelle-t-elle.

Toujours selon l’organisme, les banques islamiques offrent également des dépôts d’investissement aux clients. Cependant, «ceux-ci ne sont pas garantis par le fonds d’assurance des dépôts des banques participatives, comme en Malaisie. Cela pourrait affecter la demande des consommateurs pour ces produits», constate-t-il.

Outre ces contraintes, la finance participative devrait aussi relever d’autres défis comme une meilleure réglementation du secteur, sensibiliser davantage le public pour lui permettre de mieux comprendre son fonctionnement, et les rassurer sur la conformité des banques islamiques à la charia, selon le rapport.

Par Elimane Sembène
Le 17/03/2023 à 15h25