Explosion des accouchements par césarienne au Maroc: la CNOPS sévit

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Suite à l’envolée des dépenses y afférentes, la CNOPS a décidé de conditionner le paiement de toute césarienne à la production d’un rapport médical justifiant le recours à cette pratique.

Le 17/04/2019 à 11h40

La Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (Cnops) a décidé de payer, à partir du 1er mai prochain, toute césarienne, non médicalement justifiée, sur la base du forfait de l’accouchement par voie basse.

«Les producteurs de soins (cliniques, hôpitaux publics, etc.) ont été invités à joindre à leur dossier de facturation un compte-rendu précisant l’indication médicale du recours à la césarienne programmée ou d’urgence: la raison motivant le recours à cet acte, le rapport bénéfices-risques de l’intervention et les conditions de sa réalisation», souligne la Cnops dans un communiqué.

La décision de la CNOPS, poursuit la même source, est motivée par le taux anormalement élevé du recours à la césarienne. En 2017, la Caisse a enregistré 30.583 cas d’accouchement, dont 18.522 réalisés par césarienne (61%). Ce taux était de 35% en 2006, puis il a bondi à 43% en 2009 juste après le relèvement du tarif national de référence de 6.000 dirhams à 8.000 dirhams.

Le secteur privé, qui s’accapare 90% du nombre d’accouchements, enregistre un taux supérieur du recours à la césarienne, se situant à 66% contre seulement 25% dans le secteur public. Certaines structures privées d’hospitalisation à Casablanca, Rabat, Fès, Agadir, Kénitra et El Jadida, ont même franchi la barre de 80% en 2017. Elément qui retient l’attention, relève la CNOPS: 72% des femmes césarisées en 2017 étaient âgées entre 20 et 35 ans.

Les taux enregistrés à la CNOPS contrastent avec les recommandations de l’OMS (taux maximum de 15%), ou encore avec la moyenne des 36 pays adhérents à l'Organisation de coopération et de développement économiques (27,9%), dont la Turquie, la France, le Japon, l’Allemagne, l’Espagne, etc. et des pays comme l'Égypte (55,5 %), l'Argentine (43,1 %) ou la Colombie (36,9 %), selon un rapport de l’OMS publié en 2018.

Consécutivement, les dépenses des césariennes sont passées de 13 millions de dirhams en 2006 à 130 millions de dirhams en 2017, alors que l’alignement des prestataires de soins sur un taux ne dépassant pas 25% (à l’instar du taux constaté au niveau du secteur public) aurait permis à la Caisse de faire des économies de plus de 70 millions de dirhams en moyenne par an.

Pour maîtriser l’envolée de ce poste, la CNOPS a décidé de conditionner le paiement de toute césarienne à la production d’un rapport médical justifiant médicalement le recours à cette pratique. 

Selon l’Organisation mondiale de la santé, «bien qu’elle permette de sauver des vies, il arrive souvent qu’elle (la césarienne) soit pratiquée sans être médicalement nécessaire, risquant alors d’exposer la mère et l’enfant à des problèmes de santé à court, moyen et long termes». Selon un rapport de l’OCDE publié en 2017, les actes médicaux inutiles et les gaspillages représentent 20% des dépenses de santé.

Par Ayoub Khattabi
Le 17/04/2019 à 11h40