Le Maroc souhaite se connecter à la cinquième génération de haut débit mobile (5G), avec le soutien de la Finlande. L’annonce a été faite à l’issue d’une rencontre qui s’est déroulée le 6 août dernier à Helsinki, entre la ministre finlandaise des Affaires étrangères, Elina Valtonen, et le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, qui y effectuait une visite de travail.
Avancée technologique d’importance, le réseau 5G se distingue par son débit qui peut atteindre 400 mégabits par seconde, soit dix fois plus que celui de la 4G. Il dispose aussi d’une faible latence (une milliseconde contre environ 200 millisecondes pour la 4G), le temps que vont mettre vos données à passer d’un point à un autre sur un réseau. «Par exemple, la 5G permet à un orchestre de jouer à distance et de proposer une belle symphonie, ou de créer des supporters virtuels dans les stades, installés dans leurs salons. Ce qui est impossible avec la 4G », schématise l’expert en IT et télécoms Khalid Ziani, contacté par Le360.
S’inspirer du plan numérique 5G finlandais
Le Royaume gagnerait donc à renforcer son partenariat numérique avec la Finlande qui est devenue une référence dans le déploiement de la 5G. Dans ce pays nordique, le taux de connexion à la 5G est en augmentation depuis 2020. La couverture des ménages urbains est passée de 12,4% à près de 95% en 2023, selon la plateforme mondiale spécialisée dans les données statistiques, Statista. La capitale Helsinki détenait le taux le plus élevé avec 51%. La couverture des ménages ruraux avait également atteint près de 78% l’année dernière.
Notre interlocuteur estime que le Royaume a beaucoup à apprendre de l’expérience finlandaise, surtout si l’on sait que le processus d’implémentation de la technologie 5G dure environ six à sept ans, entre la date d’attribution des fréquences et le déploiement sur tout le territoire. Et une fois les fréquences attribuées, les trois opérateurs doivent équiper leurs antennes télécoms (20.000 au total actuellement) qui couvrent le territoire en 2G, 3G et 4G.
«La Finlande, qui a déjà lancé son plan numérique pour la 5G en 2018, peut aider le Maroc à mettre en œuvre ce projet. Le Royaume, qui doit déployer la 5G dans un bref délai, pourrait notamment s’inspirer de la méthode efficace utilisée par cet État nordique», soutient-il.
Ce pays de plus de 5,6 millions d’habitants héberge aussi le siège de Nokia. L’entreprise finlandaise, naguère connue dans la fabrication de téléphones et de smartphones, est désormais spécialisée dans les services de réseau de données et l’activité d’équipement de télécommunications. «La Finlande abrite le centre R&D de Nokia qui est aujourd’hui, avec Huawei et Ericsson, l’un des rares fabricants d’antennes et d’équipements pour la 5G destinés aux opérateurs télécoms», souligne Khalid Ziani.
Mutualiser les infrastructures télécoms pour accélérer le processus
Selon la même source, l’adoption de cette technologie de haut débit nécessite, au préalable, la généralisation de la fibre optique sur l’ensemble du territoire marocain, y compris les réseaux de fibre optique jusqu’au domicile (FTTH) pour remplacer l’ADSL. Un grand chantier que le Maroc doit accélérer, en prélude à l’organisation de la Coupe du monde 2030 qui exige une connexion de très haut débit notamment dans les stades et autres zones de rassemblement. «Les deux autres co-organisateurs, l’Espagne et le Portugal, ont déjà respectivement déployé 85% et 90% du réseau FTTH sur leur territoire. Le Maroc doit se fixer comme objectif de connecter 85% des ménages en FTTH en 2030», préconise-t-il.
Pour relever ce challenge, il faudra impérativement que les trois opérateurs télécoms mutualisent leurs infrastructures, ce qui n’est toujours pas le cas. Une absence de collaboration qui est d’ailleurs l’une des principales causes du retard dans le processus de déploiement de la 5G au Maroc, dont le lancement était prévu avant fin 2023 par l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT).
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Là aussi, l’expertise finlandaise pourrait être utile. «Le Maroc devra augmenter le nombre d’antennes pour passer de 20.000 à 30.000, parce que pour la 5G, le périmètre couvert par chaque antenne est plus court. Ces antennes coûtent très chères. Plusieurs pays européens, dont la Finlande, ont trouvé un moyen qui permet de mutualiser ces infrastructures, en recourant à des opérateurs d’infrastructures indépendants», indique Khalid Ziani.
Malheureusement, il n’existe pas au Maroc de dispositions réglementaires pour «l’octroi de licences ou d’autorisations spéciales par l’ANRT pour que ces opérateurs indépendants puissent investir dans les infrastructures et les mettre à la disposition des opérateurs télécoms », déplore-t-il.
Cette mutualisation des infrastructures permettra également de couvrir plus de territoires, notamment les zones rurales non desservies. «Au Maroc, à l’heure actuelle, seules les parties denses à savoir les grandes villes, sont couvertes par le FTTH et éventuellement la 5G quand les fréquences vont être attribuées. Ce n’est pas rentable pour les opérateurs télécoms de déployer le haut débit dans les zones rurales où les recettes sont faibles», explique le spécialiste en télécoms.