Blé: voici la quantité que le Maroc devrait importer pour pallier l’insuffisance de la campagne céréalière

Une récolte de blé.

Le Maroc devrait accroître ses importations de blé tendre pour pallier l’insuffisance de la récolte céréalière à l’issue de la campagne agricole 2023-2024. Un défi à sa portée, dans un marché international certes volatil, mais qui affiche actuellement des prix abordables.

Le 02/04/2024 à 16h32

Le Royaume devrait encore connaitre une mauvaise campagne céréalière à cause de la persistance du stress hydrique. Si l’on se fie aux projections de Bank Al-Maghrib (BAM), qui s’est basée sur des données au 10 mars 2024, la production céréalière nationale avoisinerait les 25 millions de quintaux à l’issue de cette campagne, très loin des 55,1 millions de quintaux (dont 29,8 millions de quintaux de blé tendre) une année auparavant. Soit une baisse de plus de 50%. Ce qui serait l’une des pires récoltes enregistrées au Maroc.

D’après l’institution dirigée par le wali Abdellatif Jouahri, cette importante chute de la moisson résulte de la baisse de la pluviométrie, engendrée par des conditions climatiques globalement défavorables. «Le cumul pluviométrique a atteint 170,5 mm, en baisse de 15,6% par rapport à la campagne précédente et de 12,3% en comparaison avec la moyenne des cinq dernières années. Ces conditions auraient affecté la superficie emblavée des céréales qui se serait située autour de 2,5 millions d’hectares contre près de 3,7 millions une année auparavant», indique Bank Al-Maghrib. La banque centrale souligne en outre que la situation du couvert végétal est inférieure de 19,1% par rapport à la campagne précédente et de 12,3% comparativement à la moyenne des cinq dernières années.

Importation de 10 millions de tonnes de blé tendre

Interrogé par Le360, Omar Yacoubi, président de la Fédération nationale des négociants en céréales et en légumineuses (FNCL), exprime aussi son inquiétude par rapport à cette situation mais rassure sur la disponibilité du stock en blé tendre dans l’industrie. «Au niveau industriel, les quantités de blé écrasées varient entre 420.000 et 450.000 tonnes par mois et on devrait rester sur ce rythme», affirme-t-il.

Selon notre interlocuteur, le Maroc devrait importer 10 millions de tonnes de cet «or brun» durant la présente campagne agricole pour pallier l’insuffisance de la prochaine récolte céréalière. «Il va falloir mieux s’organiser en termes de logistique, notamment dans la logistique portuaire pour éviter les encombrements, pour relever ce défi qui est à notre portée », soutient M. Yacoubi.

La baisse actuelle des cours du blé devrait aussi faciliter ces approvisionnements. «Pour le moment, le blé est disponible au niveau international. Il y a certes eu une baisse importante des cours sur le marché mais depuis quelques semaines ils sont repartis à la hausse. Les niveaux sont abordables comparés à ceux observés au cours des derniers mois. Mais nous sommes sur un marché volatil qui n’est pas à l’abri d’éventuels soubresauts», prévient le président de la FNCL.

Plus d’1,6 million de tonnes importé entre janvier et mars 2024

C’est justement pour se prémunir de ces aléas du marché international, surtout depuis le déclenchement du conflit russo-ukrainien, que le Maroc a entrepris, ces dernières années, une diversification de ses achats. Une stratégie qui a porté ses fruits. Ainsi, en 2023, les négociants marocains se sont procuré 4.758.263 tonnes de blé tendre sur le marché international, contre 5.275.917 tonnes en 2022. La France (plus de 2,3 millions de tonnes), l’Allemagne (1.160.619 tonnes) et la Roumanie (357.837 tonnes) étaient respectivement ses trois premiers fournisseurs.

Le Top 5 des fournisseurs de blé tendre du Maroc durant le premier trimestre 2024 (source: Fédération nationale des négociants en céréales et en légumineuses)

FournisseursQuantités de blé tendre
France1.025.184 tonnes
Allemagne254.661 tonnes
Ukraine97.797 tonnes
Russie84.207 tonnes
Roumanie77.542 tonnes

Cette politique s’est poursuivie en 2024, avec l’importation de 1.616.406 tonnes au cours des trois premiers mois de l’année, dont 609.350 tonnes réceptionnées durant le mois de mars, d’après les statistiques de la FNCL consultées par Le360. La France reste le premier fournisseur du Royaume avec 1.025.184 tonnes, devant l’Allemagne (254.661 tonnes), et l’Ukraine 97.797 tonnes (dont 67.949 tonnes en mars), qui confirme son retour en force et consolide son rang de troisième fournisseur. La Russie (84.207 tonnes) et la Roumanie (77.542 tonnes) complètent le Top 5.

«Importer à partir de l’Ukraine est difficile et compliqué, à cause de l’embargo de la Russie. C’est très difficile de trouver un bateau ou des marchandises. Il n’empêche, les opérateurs ne ménagent aucun effort pour surmonter ces obstacles et cela finit par payer», reconnait Omar Yacoubi.

L’octroi de primes forfaitaires devrait également encourager les négociants marocains à accroître leurs approvisionnements. Dans une circulaire datée du 31 janvier 2024, l’Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses (ONICL) avait annoncé la mise en place d’une prime pour la constitution d’un stock de 10 millions de quintaux (1 million de tonnes) de blé tendre importé, du 1er février au 30 avril 2024.

L’Office avait également annoncé, le 21 novembre 2023, la mise en place d’un nouveau système de restitution à l’importation de blé tendre pour encourager l’achat de 2,5 millions de tonnes du 1er janvier au 30 avril 2024.

Par Elimane Sembène
Le 02/04/2024 à 16h32