Affaire Bab Darna: les dessous du report sine die du décret d’application de la Vefa

Une réunion du Conseil de gouvernement, sous la présidence de Saâd-Eddine El Othmani. 

Une réunion du Conseil de gouvernement, sous la présidence de Saâd-Eddine El Othmani.  . DR

Lors de sa réunion hebdomadaire, hier, jeudi, le conseil gouvernement a décidé de reporter sine die l’examen et l’approbation du projet de décret garantissant la restitution des échéances payées en cas de non-exécution du contrat de vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement (VEFA). Explications.

Le 03/01/2020 à 13h38

Pour expliquer ce report, le communiqué émis à l'issue du conseil du gouvernement fait état de la volonté «d’approfondir le débat et d’améliorer le texte». Selon nos informations, ce projet a fait l’objet d’un débat houleux lors de cette réunion gouvernementale hebdomadaire. On a notamment reproché à Nouzha Bouchareb, ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, de vouloir faire cavalier seul en sortant ce décret qui tombe en plein scandale de l’escroquerie du groupe immobilier Bab Darna.

Quatre ans après la promulgation de la loi sur la Vefa, la précipitation avec laquelle le projet de décret a été présenté devant le conseil du gouvernement soulève, en effet, bon nombre d’interrogations. Certains y voient une forme de récupération politique, voire une manière de couvrir l’échec du gouvernement dans la gestion de la crise «Bab Darna», au prétexte de protéger les droits des consommateurs.

Nouzha Bouchareb, qui s'est défendue à ce sujet la semaine dernière devnt les députés au parlement, avait insisté sur le fait que le ministère de l’Habitat qu'elle dirige n'était pas le seul concerné par l’affaire Bab Darna.

Elle est revenue quelques jours plus tard avec ce projet de décret, sans qu'il n'y ait eu aucune concertation préalable avec les autres acteurs et départements concernés par la Vefa.

«Nous sommes les premiers concernés par ce décret. Nous n’avons pas reçu la mouture finale présentée par la ministre», regrette à ce propos Kamil Taoufik, président de la Fédération nationale de la promotion immobilière (FNPI).

Persuadée que ce décret ne va pas résoudre le fond du problème, la FNPI appelle à une refonte de la loi sur la Vefa qui, à ses yeux, avait été calquée sur le modèle français existant, malheureusement inadapté au Maroc. La preuve en est que les sociétés immobilières étatiques n’appliquent pas le nouveau texte de loi modifié en 2016 et ont recours aux mêmes pratiques utilisées par les professionnels du secteur privé, indique la FNPI.

«Nous voulons un texte applicable. La révision de la loi aura le mérite d’élargir le débat en associant les représentants élus de la nation», estime Kamil Taoufik, qui est par ailleurs président du groupe de l’alliance RNI-UC à la première chambre du parlement.

Finalement reporté au cours du conseil de gouvernement, le projet de décret impose aux promoteurs de fournir une caution bancaire ou de souscrire à une assurance en vue de garantir la restitution des avances versées par les acheteurs en cas de non-exécution des termes des contrats de Vefa.

La sortie d’un tel décret suppose avant tout la satisfaction des conditions préalables à sa mise en œuvre. Or, à titre d’exemple, la FNPI dit n’avoir aucune visibilité sur la nature du produit d’assurance adapté aux promoteurs immobiliers.

«Les banques, les compagnies d’assurances, les promoteurs immobiliers, le ministère de l’Intérieur, le ministère des Finances, les notaires, etc. Il y a lieu de rassembler tous les acteurs concernés autour d’une même table pour s’accorder sur un texte consensuel», soutient le président de la FNPI.

Par Wadie El Mouden
Le 03/01/2020 à 13h38