C’est dans l’intimité feutrée de Dar Souiri, écrin patrimonial d’Essaouira, que s’est ouvert jeudi 1er mai le 21ème Printemps musical des alizés. Le coup d’envoi a été donné par un concert dédié à Brahms, réunissant la violoncelliste Emmanuelle Bertrand et les solistes de l’Orchestre national d’Île-de-France autour de son premier sextuor à cordes.
«Un concert d’ouverture, c’est toujours un moment chargé d’émotion, d’autant plus quand on célèbre Brahms», déclare Emmanuelle Bertrand. «C’est une musique qui nous traverse, qui parle à chacun de nous, musiciens comme auditeurs», continue-t-elle, encore émue. Et le choix du lieu n’est pas anodin. «Dar Souiri est un lieu magique, avec une acoustique idéale et une proximité rare entre la scène et le public», ajoute-t-elle.
Selon elle, l’œuvre du compositeur allemand est un miroir de la vie. «Brahms, c’est la musique de la vie, il fait naître toutes les émotions humaines. Pour une violoncelliste, c’est un bonheur particulier: son écriture chaude et profonde nous rapproche de la voix humaine», explique-t-elle.
La musicienne n’a pas fini de jouer sur la scène souirie. «Ce soir encore, j’aurai le plaisir de jouer le Concerto pour violoncelle de Schumann avec l’Orchestre philharmonique du Maroc», annonce-t-elle.
Concert de l'orchestre national d'Île de France, à Dar Souiri, le 1er mai 2025. (A.Et-tahiry/Le360)
Présent dans la salle comble, André Azoulay, président fondateur du festival, avait les yeux qui brillent. «Je crois que nous avons vécu ce soir l’un des plus beaux concerts de musique de chambre que j’aie jamais entendus», déclare-t-il. «Il aurait fallu pousser les murs pour accueillir tout le monde. Cette musique est chez elle ici, à Essaouira et personne ne peut nous contredire», poursuit-il.
«Brahms, ce soir, était marocain. Il était souiri», affirme le président. «C’est la magie de la musique universelle, sans frontière, ni passeport, elle nous relie, nous dépasse, et nous incarne», insiste-t-il poétiquement.
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«Il y a vingt et un ans, à la création du festival, beaucoup étaient sceptiques. On me répétait que ce n’était pas notre musique, mais dès la deuxième édition, ces barrières ont vite été oubliées», se rappelle André Azoulay. «Depuis, le festival n’a cessé de grandir et d’attirer des artistes d’exception ainsi qu’un public toujours plus nombreux. Notre seul défi aujourd’hui, c’est l’espace pour accueillir tout le monde», se réjouit-il.
Mais, au-delà des notes et des ovations, c’est un engagement culturel et pédagogique qui se joue chaque année à Essaouira. «Dès la première édition, nous avons accueilli de très jeunes musiciens marocains. Aujourd’hui, ils chantent sur les plus grandes scènes du monde. Et tout a commencé ici, dans cette ville, avec ce festival, qui leur a offert leur première chance», conclut-il, visiblement ému.
Le Printemps musical des alizés se poursuit jusqu’au dimanche 4 mai avec une programmation de 10 concerts supplémentaires, avec Brahms comme fil d’Ariane, et Essaouira comme capitale vibrante, le temps du festival, de la musique de chambre.